Alcan, maintenant fusionnée avec l'australienne Rio Tinto, n'aurait pas payé d'impôts au Québec et au Canada entre 2001 et 2006 et aurait plutôt reçu un remboursement provenant des gouvernements.

Alcan, maintenant fusionnée avec l'australienne Rio Tinto, n'aurait pas payé d'impôts au Québec et au Canada entre 2001 et 2006 et aurait plutôt reçu un remboursement provenant des gouvernements.

C'est ce qu'indique une étude de la Chaire d'études socio-économiques de l'Université du Québec à Montréal (UQAM).

Encore pis, selon les données recueillies provenant du rapport annuel de l'entreprise, le géant de l'aluminium aurait payé 1,5 G$ d'impôts à l'étranger notamment en France, aux États-Unis, en Allemagne au Royaume-Uni et en Australie.

Durant cette période, Alcan a plutôt obtenu un remboursement de 106 M$ des gouvernements canadien et québécois alors que l'entreprise a rapporté des profits de 4,3 G$.

En outre, Alcan serait choyée par les gouvernements et par «leur générosité excessive par rapport aux autres pays occidentaux, qui inondent cette compagnie d'abris fiscaux et de déductions fiscales de toutes sortes ».

Confirmation du côté d'Alcan: l'entreprise «a profité de certains avantages comme bon citoyen corporatif» entre 2001 et 2006, souligne Stefano Bertolli, porte-parole de Rio Tinto Alcan.

L'entreprise a notamment investi dans la recherche scientifique et dans la machinerie, ce qui a permis à Alcan de profiter d'avantages fiscaux.

Toutefois, souligne M. Bertolli, Alcan a versé 25 M$ en taxe sur le capital et 225 M$ d'impôts au Canada en 2007.

L'exemple d'Alcan en est un parmi d'autres, souligne la Chaire, qui a dévoilé les résultats d'une étude portant sur les 450 plus grandes firmes canadiennes en 2005.

Autres conclusions

Selon les auteurs de l'étude - Marc Hasbani, Martine Lauzon et Léo-Paul Lauzon -, le taux d'imposition statuaire des sociétés (provincial-fédéral) était de 47% en 1999 alors qu'il a descendu à 32% en 2005.

«Pendant ce temps, les entreprises canadiennes ont réalisé des profits records dont une augmentation de 20% en 2007», souligne Léo-Paul Lauzon qui s'étonne que cette «bonne nouvelle» n'ait pas été couverte par les médias.

Les observations de l'étude démontrent que 40% des compagnies canadiennes rentables ont payé moins de 20% en impôts fédéral, provincial et à l'étranger sur leurs profits.

Toujours selon l'étude, 20% de grandes compagnies rentables ont payé moins de 5% d'impôts sur le revenu en 2005.

D'autres comme Gaz Métro, Canadien Pacifique, Gildan, Suncor Energy et Gestion ACE Aviation auraient payé moins de 5% d'impôts sur leurs profits pour l'année 2005, constate la Chaire.

En outre, l'étude met également en lumière une autre réalité: l'évasion fiscale augmente au Canada. Selon des données de Statistique Canada, 11 G$ étaient versés dans des paradis fiscaux en 1990 alors que ce chiffre atteignait 88 G$ en 2003.

Les subventions aux entreprises ont également été en hausse. Selon la Fraser Institute, 19 G$ ont été octroyés aux compagnies canadiennes en 2004. Neuf ans auparavant, les subventions étaient de 10 G$.

Un impôt minimum

Les chercheurs recommandent différentes mesures dont celle de taxer équitablement tous les revenus de «ces agents économiques», comme l'avait suggéré le Fonds monétaire international (FMI) en 1995.

Un impôt minimum devrait également être instauré à chaque année pour les entreprises comme cela se fait en Ontario ou aux États-Unis, souligne Léo-Paul Lauzon.

«On ne veut pas surtaxer qui que ce soit, mais nous voulons des mesures fiscales équitables», souligne le chercheur Lauzon qui souligne que les gouvernements «taxent bien souvent le monde ordinaire».

Avec ces mesures, la Chaire croit que les gouvernements pourraient aller chercher environ 30 G$ annuellement.

Conseil du patronat réagit

Le Conseil du patronat a réagi à l'étude indiquant que la méthodologie de cette étude est «spécieuse». Le CPQ souligne également que l'évasion fiscale n'est pas courante au Canada.

«Prétendre comme le fait M. Lauzon que les entreprises pratiquent l'évasion fiscale à grande échelle est non seulement absurde mais équivaut à diffamer des milliers de gestionnaires et de comptables qui y travaillent», a indiqué le président du

CPQ, Michel Kelly-Gagnon.