La firme Développements McGill a mis en chantier non pas une, mais deux phases de son projet de condos Square Benny en avril dernier. La demande est bonne, dit le président Stéphane Côté. Mais surtout, les coûts de construction auraient été beaucoup plus élevés s'il avait attendu une autre année.

La firme Développements McGill a mis en chantier non pas une, mais deux phases de son projet de condos Square Benny en avril dernier. La demande est bonne, dit le président Stéphane Côté. Mais surtout, les coûts de construction auraient été beaucoup plus élevés s'il avait attendu une autre année.

«Il y aurait eu une surprime à faire les deux phases de façon décalée, tout le monde s'arrache les matériaux et la main-d'oeuvre», explique le promoteur.

La hausse des coûts de construction, entre autres facteurs, a contribué à faire bondir de 5,7% le prix des logements neufs à Montréal en juillet par rapport à l'an dernier. Une augmentation corsée, qui contraste avec la décélération observée à l'échelle nationale par Statistique Canada.

Selon un rapport publié hier, le prix moyen des maisons neuves a grimpé de 2,7% au pays en juillet, un recul par rapport au gain de 3,5% de juin. Ce ralentissement découle en bonne partie du "relâchement du marché de l'Ouest canadien", une région où les hausses avaient été fulgurantes ces dernières années.

À Montréal, la progression des prix, bien que constante, a été beaucoup plus modérée qu'en Alberta et en Colombie-Britannique, rappelle Hélène Bégin, économiste principale chez Desjardins. «Cela fait en sorte que la demande s'apaise beaucoup plus tranquillement ici que dans l'ouest du pays.»

L'avantage est encore aux vendeurs dans la métropole, ce qui explique la hausse assez soutenue des prix, ajoute Mme Bégin. «Le marché est encore en légère pénurie, on parle de cinq vendeurs par acheteur dans l'unifamiliale, alors que l'équilibre est entre huit et dix.»

Les prix progressent toujours vigoureusement dans les quartiers "abordables" comme Rosemont, Saint-Michel et LaSalle, mais se stabilisent dans les secteurs cossus d'Outremont, Westmount et Mont-Royal, note en outre l'économiste de Desjardins.

«Les risques d'une baisse de prix généralisée ne sont pas présents à Montréal, mais il y en a beaucoup plus dans les zones les moins abordables», a souligné Mme Bégin.

Du côté des résidences existantes, les prix ont progressé de 4% dans la grande région de Montréal en août, tandis que le nombre de transactions a reculé de 6%.

Le prix médian d'une maison unifamiliale atteint 225 000$ (+4%), celui des copropriétés, 192 000$ (+3%) et celui des immeubles de deux à cinq logements, 327 000$ (+5%).

«Le marché de la revente est en train de faire un atterrissage en douceur depuis le début de l'année», a dit Michel Beauséjour, chef de la direction de la Chambre immobilière du Grand Montréal.

À l'échelle nationale, c'est l'Alberta qui a vu ses prix atterrir - voire reculer - le plus fortement en juillet. Le coût d'un logement neuf a glissé de 5,4% à Edmonton, et de 0,3% à Calgary, note Statistique Canada.

Les prix ont par ailleurs progressé de 1,6% dans la déjà dispendieuse ville de Vancouver, de 3,7% à Toronto et de 5,4% à Québec.

Le boom albertain des dernières années s'est déplacé un peu à l'est, en Saskatchewan. Le prix des maisons neuves a explosé de 29,6% en juillet à Regina. «Les constructeurs ont imputé l'augmentation des prix à la hausse du prix des combustibles et de l'acier ainsi qu'à l'accroissement des coûts de la main-d'oeuvre», souligne Statistique Canada dans son étude mensuelle.

Baisse de prix généralisée?

Sal Guatieri, économiste chez BMO Marché des capitaux, entrevoit une baisse des prix de l'immobilier au Canada dans l'année qui vient, à l'image du déclin observé aux États-Unis, en Angleterre, en France, en Espagne, en Irlande et en Australie.

«Après six ans d'une croissance insoutenable, les prix ont foncé tout droit dans le mur de l'abordabilité, a écrit l'économiste dans un rapport diffusé hier. La demande fléchit, les inventaires atteignent des niveaux records et plusieurs premiers acheteurs choisissent de louer plutôt que d'acheter.»

Le prix moyen des maisons a bondi de 78% entre 2002 et 2007, un rythme deux fois plus élevé que celui des salaires, souligne Sal Guatieri.

Le marché canadien ne devrait toutefois pas connaître une débandade similaire à celle des États-Unis, poursuit l'économiste, vu la meilleure tenue de l'économie et les critères d'accès au crédit plus serrés.

Le gouvernement fédéral a d'ailleurs adopté des mesures en juillet dernier dans le but de resserrer le marché des hypothèques. La durée maximale des prêts sera ramenée de 40 à 35 ans dès le mois prochain. Et une mise de fonds minimale de 5% sera exigée, alors qu'on pouvait auparavant financer son achat à 100%.