Les frères Maxime et Julien Rémillard, les patrons de Remstar ont essuyé une volée de bois vert hier, à Québec où se tenait la deuxième journée d'audiences du CRTC sur la vente de TQS.

Les frères Maxime et Julien Rémillard, les patrons de Remstar ont essuyé une volée de bois vert hier, à Québec où se tenait la deuxième journée d'audiences du CRTC sur la vente de TQS.

Leur engagement récent de diffuser des informations sans avoir de salle de rédaction n'a soulevé que scepticisme dans la capitale.

Pour la ministre des Communications, Christine St-Pierre, le CRTC doit «ramener les télédiffuseurs généralistes à leur mission première qui est d'informer avant ou à tout le moins autant que de divertir». C'était la première fois que le gouvernement du Québec témoignait formellement devant l'organisme de réglementation fédéral.

Pour Mme St-Pierre, «il semble raisonnable et équitable d'exiger un seuil minimal de nouvelles locales et régionales alimentées par des ressources journalistiques professionnelles».

Le président de l'organisme, Konrad von Finkenstein, a clairement indiqué que la question du maintien d'une salle de nouvelles dans les stations «est la clé, selon nous». Il a mis l'ex-journaliste devant un choix déchirant: vaut-il mieux une station sans nouvelles qu'une station fermée? Christine St-Pierre a refusé de répondre. Mais par la suite, en point de presse, elle a indiqué que la question de l'information était primordiale, et qu'il fallait en faire une condition sine qua non.

Après une dure journée à Montréal, Remstar avait décidé de jeter du lest à Québec où l'information locale - c'était prévisible - allait être un enjeu important. S'il obtient la licence de TQS, Remstar promet de faire 10 heures par semaine de production d'information locale, une émission quotidienne de 7h à 9h du matin.

Pas de journaliste sur la liste de paye toutefois; un chef d'antenne fera la revue de presse du jour, recevra des invités, mettra l'accent sur l'information diffusée sur Internet, les vidéos, photos et commentaires que transmettront les auditeurs. Tout sera prévu pour donner un contenu «jeune et dynamique» à cette émission d'affaires publiques de la station qui vise un public de 18 à 49 ans.

La direction de TQS et Maxime Rémillard ont eu du fil à retordre toutefois avec son engagement récent. La diffusion publique d'un démo, le 11 juin à l'occasion de leur réplique devant le CRTC, lui cause des problèmes.

À l'issue de la journée, Maxime Rémillard s'est dit confiant quant à l'accueil que réservera le CRTC aux émissions locales qui «rayonneront dans le réseau». Sans journalistes toutefois. «On va travailler avec la production indépendante; il y aura des commentateurs, des analystes; on va débattre et demander la participation active des citoyens. La nouvelle brute est disponible partout, on va l'analyser et la débattre», a soutenu M. Rémillard.

Pour le président du syndicat des journalistes à Québec, Éric Lévesque, le CRTC devrait saisir au bond une proposition de Catalyst Capital Group, qui promet d'acheter toutes les actions de TQS en maintenant les services d'information à leur niveau actuel.

Cogeco, le partenaire de TQS, avait préféré Remstar comme acheteur. Les syndiqués ont refusé l'offre de Remstar à 97%. L'entreprise des Rémillard soulignait que sa proposition allait passer comme une lettre à la poste, ce qui, à l'évidence, est loin de la vérité, observe M. Lévesque.

À l'Assemblée nationale, le député adéquiste de Vanier, Sylvain Légaré, a pris de court le gouvernement officiellement circonspect à l'endroit de Remstar. Le vice-président Création de Zone 3, Michel Bissonnette, a envoyé une lettre de recommandation enthousiaste à l'endroit de Remstar au CRTC. Or M. Bissonnette est, depuis l'automne, avec John Parisella, un conseiller bénévole auprès du premier ministre Charest.

«Est-ce que le premier ministre va retourner voir les employés de TQS au moment où il fait faire la sale job par ses conseillers!» a lancé le député adéquiste.

Le maire se méfie

Sébastien Proulx, député adéquiste de Trois-Rivières, est venu aussi souligner l'importance des nouvelles locales pour les régions. Selon lui cependant, il faudrait y songer à deux fois avant de prendre une décision entraînant la fermeture des stations.

L'offre de Remstar représente, pour l'ADQ, «un véritable salut pour la chaîne de télévision généraliste au bord de la faillite». Toutefois, la décision de sabrer 270 emplois des salles d'information est «impensable et alarmante pour l'accès à l'information».

Le plus catégorique a été le maire de Québec, Régis Labeaume, qui dit se «méfier énormément du faire faire en actualité et en information». Il a carrément mis en doute le sérieux des engagements subits de Remstar pour la production locale. «Cela a bougé vite en deux jours!» a-t-il dit, ironique.

Pour lui, le CRTC ne doit pas accepter de confier à Remstar la licence de diffuseur que détenait TQS, à moins d'avoir l'assurance que le réseau maintiendra son service d'information. «Sans son service de nouvelles, TQS n'a aucun intérêt pour la population du Québec. Dans ces conditions, sa présence dans notre région n'est pas désirable», a soutenu M. Labeaume.

Il croit même qu'on devrait interdire à TQS de venir dans le marché publicitaire de Québec si elle ferme sa salle d'information dans la capitale.

«Ce serait un marché perdant perdant», a-t-il lancé. Il vaudrait mieux que les ondes publiques restent à Québec disponibles pour un autre diffuseur. Mais pour le commissaire Michel Morin, ancien journaliste de Radio-Canada, il faudrait aussi songer aux répercussions pour les annonceurs qui, dans cette éventualité seraient privés d'un fournisseur pour leur publicité, ce qui pousserait la compétition, TVA et Radio Canada, à faire grimper les prix.