«Combien de temps consacrez-vous à l'analyse de la rémunération des cadres supérieurs des sociétés dont vous recommandez les actions aux investisseurs?»

«Combien de temps consacrez-vous à l'analyse de la rémunération des cadres supérieurs des sociétés dont vous recommandez les actions aux investisseurs?»

La question posée par Claude Lamoureux à un groupe de spécialistes de la finance de Québec suggérait évidemment une réponse du genre: «Pas assez .»

Et le conférencier de poursuivre en associant la «genèse» de la plupart des scandales financiers des dernières années aux motivations pécuniaires des hauts dirigeants.

Claude Lamoureux était le dernier invité de la saison à prendre la parole à l'association CFA Québec (analystes financiers agréés).

Il est encore pour quelques mois le chef de la direction du Régime de retraite des enseignantes et enseignants de l'Ontario (mieux connu sous le nom de Teachers).

Aux portes de la retraite, le Torontois n'en poursuit pas moins ardemment les objectifs de la Coalition pour la bonne gouvernance dont il a été le cofondateur avec le Montréalais Stephen Jarislowsky en 2002.

Même si sa tête toute blanche dirige une équipe de 160 professionnels de l'investissement qui gèrent pour 106 milliards $ d'actif, il se souvient du conseil reçu d'un de ses professeurs, le jour où il a obtenu de l'Université Laval son diplôme d'actuaire: «Investir en pensant à dormir mieux plutôt qu'à manger mieux .»

Pour lui, il faut que les hauts dirigeants d'entreprises cotées en Bourse soient «rémunérés de la bonne façon», mais il ne faut pas qu'ils soient «induits dans la tentation».

«Les conseils d'administration doivent se tenir debout et dire Non, à l'occasion!»

C'est le même message qu'il répète aux membres des comités de rémunération et des conseils d'administration des entreprises dans lesquelles Teachers investit.

Il les invite notamment à considérer la valeur réelle du régime de retraite qu'ils votent à leur président et chef de la direction.

Quand on parle d'une rente de 1 M$ à 65 ans (qui sera éventuellement versée pendant 25 ans) c'est un avantage qu'il faut évaluer à 15 M$, voire 17 M$ si la rente est indexée, précise l'actuaire.

Et souvent, les pdg qui ont vraiment du succès sont moins bien payés que la médiane de leurs semblables.

M. Lamoureux prend par ailleurs plaisir à citer une étude qui prône une nouvelle «façon infaillible» d'obtenir un bon rendement. Celle-ci compare la taille de la maison du président et chef de direction de diverses entreprises avec le rendement qu'elles offrent aux actionnaires.

Les grands propriétaires prennent-ils trop de temps pour gérer leur intendance domestique et pas assez à faire progresser leur société ?

Dans une même industrie, ceux dont la résidence dépasse la moyenne auraient une performance de 3,4 % inférieure à celle des patrons qui ont une maison plus petite que la moyenne.

Selon son président, la Coalition pour la bonne gouvernance a déjà obtenu de bons résultats pour assainir la gestion de certaines entreprises. Mais elle ne se prend pas pour la "mouche du coche" et sait que cela ne résulte pas que de ses efforts.

Et il reste beaucoup de travail à faire, dit-il.

Sur la question de l'utilisation de procurations de vote sur les élections de dirigeants et les autres décisions importantes des conseils d'administration, Claude Lamoureux incite les investisseurs à ne pas baisser les bras.

Il les met cependant en garde contre trois facteurs qui font en sorte que, dans les cas de décisions «serrées», les gestionnaires en place perdent rarement un vote sur leur proposition.

En effet, selon une autre étude qu'il a citée, ce sont ces dirigeants qui supervisent la compilation des procurations, qui dictent les règles du jeu et qui définissent la période pendant laquelle les votes par procuration sont acceptés.

Teachers en quelques chiffres 271 000 membres (enseignants des niveaux primaire et secondaire en Ontario), dont 104 000 retraités 105,7 milliards $ : actif sous gestion au 31 décembre 2006 13,2 % rendement de la caisse sur un an (2006) 15,7 % rendement annualisé sur quatre ans