Encore de nos jours, je suis régulièrement témoin de situations où le choix entre deux candidats se fait en tenant compte de leur beauté respective. Il m’apparaît évident que la beauté d’une personne constitue un avantage indéniable et qu’être une belle personne physiquement aide énormément sa carrière. Qu’en pensez-vous ? – Pierre

Il est vrai que le processus de recrutement ne s’arrête pas à l’évaluation des compétences décrites dans le CV. Un aspect souvent sous-estimé et prévalent lors de l’évaluation des aptitudes en entrevue est le biais de l’apparence ou lookisme, soit la discrimination selon l’apparence physique. Sous l’effet de ce biais, l’apparence joue un rôle important dans le processus de sélection, favorisant souvent les personnes physiquement attirantes lors de l’embauche ou de l’attribution de promotions et d’augmentations salariales. Le talent des candidats, leurs capacités à accomplir des tâches et leurs aptitudes sociales sont alors jugés en fonction de leurs traits physiques. Les manifestations de ce biais se traduisent par des préjugés liés notamment au poids, au style personnel et à la conformité aux normes de beauté de la société.

L’effet multidimensionnel du lookisme

Vous soulignez, bien cher lecteur, la plus connue des dimensions du lookisme. Lorsque l’on pense au biais de l’apparence, la grande majorité d’entre nous pense qu’une personne considérée comme belle par la société est avantagée. Cependant, le lookisme touche aussi les personnes qui ne répondent pas aux critères de beauté. C’est-à-dire qu’elles sont jugées négativement sur la base de leur apparence physique lorsqu’elles sont considérées comme ne répondant pas aux standards de beauté.

Toutefois, la beauté n’a pas que des avantages. Le lookisme comporte aussi une dimension qui, elle, désavantage les personnes considérées comme belles. En effet, malgré les stéréotypes positifs dont bénéficient souvent les personnes physiquement attirantes, le biais de l’apparence peut aussi leur nuire. Ce préjugé peut faire en sorte qu’une « belle » personne soit jugée comme moins intelligente ou moins digne de confiance, ou encore qu’elle soit perçue comme une potentielle source de conflit ou de jalousie dans l’équipe.

Ainsi, comme tout préjugé, le biais de l’apparence repose sur une discrimination très large basée sur des critères subjectifs qui n’ont rien à voir avec les capacités de la personne et qui peut avoir comme conséquence de négliger d’excellents candidats. Cependant, ne vous laissez pas décourager par le lookisme et n’abandonnez pas votre idée d’une carrière de rêve, car certaines astuces peuvent vous aider à vous protéger de ce préjugé !

Déjouez le lookisme

D’abord, utilisez consciemment le biais de l’apparence pour envoyer un message à votre employeur (futur ou actuel). Cultivez une image professionnelle soignée pour renforcer votre crédibilité et démontrer le sérieux que vous accordez à votre travail.

Ensuite, faites votre possible pour contrer la tendance que pourraient avoir certains employeurs à ne vous juger que sur votre apparence. Démontrez clairement vos compétences, votre intégration à l’équipe, votre apport ainsi que votre performance tout en mettant de l’avant votre personnalité. Il est crucial que vous veilliez à ce que vos aptitudes professionnelles et interpersonnelles transcendent les stéréotypes. Mettez l’accent sur vos réalisations, votre attitude et vos objectifs au travail, ainsi que sur les relations que vous avez établies. En démontrant constamment votre valeur ajoutée, vous pourrez neutraliser les préjugés liés à l’apparence. De plus, votre confiance en vous représentera un atout puissant. En vous présentant avec confiance, vous pourrez influencer positivement la perception des autres à votre égard.

Combattez le lookisme

Comme nous l’avons établi, le biais de l’apparence peut affecter ou avoir affecté la carrière de tout un chacun. Face au lookisme, faites partie de la solution, n’hésitez pas à soulever les situations qui semblent injustes ou biaisées auprès d’une personne de confiance au sein de votre entreprise. Participez aux discussions et aux séances de formation sur les biais, et présentez vos idées. Souvenez-vous, personne n’est à l’abri d’entretenir des préjugés ou de subir les effets néfastes des biais des autres.

Vous êtes le gestionnaire de Pierre ?

Votre rôle pour combattre les préjugés et vos biais (conscients ou non) est, en tout temps, des plus importants. L’impact du biais de l’apparence va au-delà des personnes, car il affecte également l’acquisition, l’engagement et la rétention des talents au sein des organisations.

Les biais étant ancrés en chacun d’entre nous, les organisations se doivent de réfléchir à leur culture organisationnelle et de réévaluer leurs critères de réussite en tenant compte de l’existence de ces préjugés. Les leaders doivent accorder la priorité aux compétences et aux connaissances plutôt qu’à l’apparence, garantissant ainsi des processus équitables et transparents. Des pratiques transparentes, notamment un processus de sélection structuré et documenté, peuvent atténuer les biais.

« Même les dirigeants les plus efficaces sont partiaux. Nous voyons le monde à travers d’énormes filtres. Et nous n’avons pas conscience de ces filtres » (traduction libre, David Rock, cofondateur et PDG du NeuroLeadership Institute).

La première étape pour combattre ses biais est d’en prendre conscience. De nombreuses études ont démontré que les personnes ayant pris conscience de leurs préjugés sont plus susceptibles de les changer.

En tant que gestionnaire, il est essentiel d’incarner les valeurs organisationnelles et de corriger tout biais injuste. Les dirigeants doivent dénoncer les doubles standards et les biais implicites afin de créer une culture inclusive. Participez activement aux initiatives visant à promouvoir la diversité et l’inclusion au sein de l’entreprise et incluez vos équipes. Soutenez les programmes qui valorisent la richesse des talents et des perspectives diverses. Enfin, soutenez activement vos collègues et vos employés qui pourraient être victimes de lookisme ou qui signaleraient de telles situations. Intervenez si vous observez des comportements discriminatoires, songez à former vos équipes sur les préjugés et encouragez un environnement de travail respectueux.