La femme d’affaires Marilou est connue pour Trois fois par jour, ses recettes et ses chansons. Directrice invitée de la section Affaires, elle a confié à nos journalistes et chroniqueurs la mission de répondre à ses interrogations d’entrepreneure.

Le mot de Marilou

Avoir des bons mots envers nos employés est un atout nécessaire pour conserver des relations de travail agréables et saines. Mais en mettant récemment en pratique des méthodes de bonification chez Trois fois par jour, je réalise à quel point traduire notre gratitude par une reconnaissance matérielle est puissant. Comment fait-on pour intégrer des principes fondamentaux de justice au sein d’une entreprise ? Est-ce que la bonification est une manière d’y arriver ? Et si oui, comment ?

L’époque où seuls les hauts dirigeants recevaient des bonis annuels est révolue. Les programmes de bonis fonctionnent, observent les experts, si bien que de plus en plus d’entreprises en ont un. Cap sur les nouvelles tendances.

Qu’est-ce qu’un boni ?

Oubliez le voyage dans le Sud ou l’achat d’un chalet mis à la disposition des employés et de leur famille. Même si ce type de reconnaissance fait plaisir à la main-d’œuvre et qu’elle vise à attirer, retenir et motiver les talents, ce ne sont pas des bonis.

« Un boni annuel est en argent et n’est pas garanti chaque année, précise Lucie Guindon, associée adjointe, rémunération chez Normandin Beaudry.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Lucie Guindon, associée adjointe, rémunération chez Normandin Beaudry

Ça demeure de la rémunération, mais ce n’est pas une commission. Les principes d’équité, de cohérence, de clarté et de saine gouvernance doivent s’y retrouver, peu importe le modèle de boni que l’entreprise adopte.

Lucie Guindon, associée adjointe, rémunération chez Normandin Beaudry

« Ce n’est pas un salaire fixe qui rentre chaque semaine, indique pour sa part Guylaine Béliveau, cheffe de pratique nationale, rémunération services-conseils chez Telus Santé. C’est de la rémunération incitative et variable. Ça varie en fonction des performances organisationnelles et individuelles. Les règles doivent être définies et connues de tous en début d’année. »

La recette infaillible : fixer les règles à l’avance

« Ça prend souvent plus de temps en amont pour établir les règles du programme de bonis. Or, en les établissant au début de l’année, on évite les biais, les décisions aléatoires ou subjectives à la fin de l’année », soutient Lucie Guindon.

La spécialiste voit dans sa pratique des entreprises qui versent des sommes de façon aléatoire à des employés qui, à leurs yeux, se sont démarqués. Cependant, certains employés moins habiles à se vanter peuvent être tout aussi performants.

« Quand on verse des montants qui ne sont pas basés sur une structure objective, cohérente, commune à tous ceux qui sont admissibles, ça peut jouer des tours lorsque les organisations font l’exercice de l’équité salariale », avertit la spécialiste.

Si ces sommes ne sont données qu’à des hommes dans une catégorie d’emploi où il y a des femmes, un écart de rémunération sera créé. Il faudra alors augmenter le salaire de cette catégorie d’emploi. « Peut-être que le montant est déjà correct, mais le boni aléatoire vient défaire l’équité déjà établie. »

Les nouvelles tendances

Au-delà des objectifs de profits et de rentabilité, les entreprises ajoutent maintenant les facteurs ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance), observent Lucie Guindon et Guylaine Béliveau. Un gestionnaire peut avoir comme objectif de réduire l’empreinte carbone de l’organisation, par exemple.

Autre tendance : l’admissibilité.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Guylaine Béliveau, cheffe de pratique nationale, rémunération services-conseils chez Telus Santé

Avant, les bonis étaient offerts seulement aux cadres supérieurs. De plus en plus, on voit que c’est ouvert à l’ensemble des employés.

Guylaine Béliveau, cheffe de pratique nationale, rémunération services-conseils chez Telus Santé

S’assurer de faire connaître à tous les employés le programme de bonis est une nouvelle tendance qui émerge. « La direction dit tant qu’à verser des bonis, tant qu’à avoir cette dépense, je veux que les employés comprennent d’où vient leur montant. En disant clairement : voici les priorités de l’année, ça aide les employés à établir leurs objectifs en fonction de ceux de l’entreprise », indique Lucie Guindon.

Les classiques

Le programme récompense l’atteinte d’objectifs qui sont fixés en début d’année. Il peut s’agir de croissance, de profits, de volumes de ventes, de nombre d’accidents de travail, de temps d’attente, etc. À la fin d’année, on vérifie si l’entreprise les a atteints et, parfois, si l’employé les a atteints.

Pour le programme de partage de profits, on détermine une formule de partage en début d’année aussi. Les dirigeants peuvent décider de partager 10 % des profits nets avec les employés et offrir un pourcentage plus élevé du montant à l’équipe de direction.

« On détermine un pourcentage du salaire de base, ce qu’on appelle le boni cible, explique Guylaine Béliveau. Des postes vont avoir 2 %, 5 %, 15 %, tout dépendant de l’industrie et du niveau du poste. »

Un gestionnaire qui a un boni cible de 15 % et un salaire de 80 000 $ aura un montant cible de 12 000 $, soutient-elle. « Mais ça ne veut pas dire qu’il va recevoir 12 000 $. C’est variable à la hausse ou à la baisse en fonction de la performance de l’organisation et de la performance individuelle. »

Oui, ça fonctionne…

« La rémunération par boni est un bon levier de motivation, c’est clair, affirme Guylaine Béliveau. Les bonis sont appréciés des employés, car l’entreprise leur envoie un message positif qu’ils ont contribué au succès de l’entreprise. »

Selon l’enquête annuelle sur la rémunération globale de Normandin Beaudry, qui inclut plus de 500 entreprises canadiennes cette année, 80 % des organisations ont payé des bonis à leurs employés dans la dernière année. Cependant, seulement 65 % des organisations ont un programme formel de bonification.

Pour savoir quel système de bonis a le plus d’impact, il faut d’abord déterminer ce que l’on veut obtenir comme impact, indique Lucie Guindon. Il n’y a pas un programme qui fonctionne pour toutes les entreprises de tous les secteurs, car les objectifs ne seront pas les mêmes.

« Dans une entreprise manufacturière, vous allez vouloir réduire les accidents de travail, le gaspillage de matière première, ce qui sera différent dans une entreprise de service public », cite en exemple Guylaine Béliveau.

« Un programme de bonification vise à reconnaître le succès de l’organisation, la participation des employés à ce succès, mais aussi à ce que les employés se dépassent », conclut-elle.

Consultez l’ensemble des textes de notre section spéciale « Marilou Bourdon, directrice invitée »