Une page se tourne à l’aéroport de Saint-Hubert, où les travaux préparatoires du futur nouveau terminal débuteront bientôt avec l’excavation et du nivelage des terrains. Ce projet de 200 millions de dollars doit être livré d’ici la fin de 2024, mais il n’accueillera pas ses premiers passagers avant l’été 2025.

L’aéroport de Saint-Hubert en bref

  • Année d’ouverture : 1er novembre 1927
  • Gestionnaire principal : DASH-L (Développement Aéroport Saint-Hubert de Longueuil)
  • Président et directeur général : Yanic Roy
  • L’Agence spatiale canadienne y a construit son siège social en 1991, avant de s’installer officiellement deux ans après, faisant de l’aéroport un pôle d’innovation.

« À partir de maintenant, c’est une course contre la montre. Il faut réussir à battre l’hiver, autrement dit, on doit achever la préparation du terrain et l’excavation avant le gel », explique à La Presse le vice-président aux affaires corporatives de l’aéroport, Simon-Pierre Diamond.

Mardi, au passage de La Presse, des ouvriers s’affairaient déjà à installer la clôture de sécurité qui séparera la vaste zone de chantier de l’aéroport actuel, afin d’assurer la fluidité des opérations aéroportuaires qui se poursuivent. « Du moment que c’est fait, on va commencer à creuser le nouveau terminal. D’ici environ deux semaines, il va y avoir des camions partout ici, ça va être très actif », souligne M. Diamond.

D’ici l’arrivée de la saison hivernale, la construction de la structure du bâtiment devrait graduellement commencer, selon le vice-président.

Le terminal construit par Porter Airlines – qui sera son principal utilisateur avec Pascan Aviation – sera composé de neuf portes d’embarquement et permettra à terme d’accueillir plus de quatre millions de passagers. « Cela dit, on sait qu’on n’aura pas ce chiffre au jour 1. En fait, pour la première année, on s’attend plus à un million de passagers approximativement », explique M. Diamond.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Les travaux préparatoires viennent de commencer en vue de la construction du nouveau terminal de l’aéroport de Saint-Hubert.

Une volonté d’agrandissement

Pour l’instant, la desserte du terminal sera principalement canadienne et régionale. Porter Airlines assurera la liaison vers les principales grandes villes canadiennes, tandis que Pascan Aviation offrira des vols vers diverses municipalités québécoises. Au total, une quinzaine de vols pourront décoller quotidiennement à partir du nouveau terminal.

En vertu de son bail avec Transports Canada, Aéroports de Montréal (ADM) – l’exploitant de Montréal-Trudeau et de Mirabel – bénéficie toujours d’une clause d’exclusivité pour les vols internationaux. Autrement dit, un avion qui décolle de Saint-Hubert ne peut jusqu’ici transporter des passagers vers les États-Unis ou les destinations soleil.

« Pour l’instant, on veut surtout bien faire accoucher notre desserte domestique. Une fois cet objectif rempli, on réévaluera pour la suite. Mais ce n’est pas le projet. L’aérogare n’a pas de douane, elle n’est pas destinée à l’international », affirme M. Diamond.

Rien n’empêche toutefois que le terminal puisse grossir avec les années, nuance-t-il.

Ça va toujours demeurer du transport avec des petits avions, mais oui, on a l’ambition d’aller chercher d’autres transporteurs éventuellement. On aura besoin à terme d’aller bonifier l’offre pour les passagers.

Simon-Pierre Diamond, vice-président aux affaires corporatives de l’aéroport de Saint-Hubert

En principe, le nouveau terminal aura été achevé d’ici la fin de l’année 2024, mais il faudra prévoir un « délai raisonnable » avant les premiers vols. Ceux-ci devraient avoir lieu dès juin ou juillet 2025, au plus tard, affirme l’aéroport. Un échéancier plus détaillé sera précisé au cours d’une annonce officielle prévue cet automne avec plusieurs partenaires.

En incluant l’hôtel Holiday Inn de 130 chambres qui doit aussi être construit à proximité du nouveau terminal, le projet total coûtera plus de 200 millions. Porter Airlines, le promoteur de l’hôtel et l’aéroport de Saint-Hubert se partageront entièrement la facture. Aucun argent public ne sera donc investi dans le projet.

Encore des craintes

L’expansion annoncée de l’aéroport de Saint-Hubert ne fait pas que des heureux. L’organisme Urgence climatique Montérégie, qui fait partie de la Coalition Halte-Air Saint-Hubert, a notamment demandé en mars un moratoire « afin de pouvoir évaluer tout projet qui puisse se développer afin de voir ses impacts sonores, sanitaires et climatiques ».

Outre l’accroissement du trafic aérien appréhendé, le groupe dénonce que le projet va à contre-courant des enjeux climatiques actuels, d’autant plus que le projet n’a jamais fait l’objet de consultation publique.

« Il n’y a eu aucune étude sanitaire d’impact, malgré le fait qu’il y a une pollution aux GES qui est évaluée à environ 500 000 tonnes par an si l’aéroport est en pleine opération toute l’année. Ça revient à doubler toute la pollution automobile de Longueuil, c’est de cet ordre-là », déplore le membre de la coalition et professeur à l’UQAM Julien Keller, qui déplore que les avions de Porter Airlines « sont bruyants », contrairement à ce que les autorités veulent laisser entendre.

D’un point de vue strictement économique, M. Keller se dit d’ailleurs « convaincu qu’on se dirige vers un fiasco à la Mirabel ». « Ça va être l’éléphant blanc de l’agglomération de Longueuil, on en est persuadés. On ne croit pas en leur modèle économique. Et encore là, il n’y a eu aucune étude d’impact sérieuse », lance-t-il.

Pour Simon-Pierre Diamond, la communication avec les citoyens a permis de faire depuis de « réelles avancées » sur le climat sonore et la question de l’environnement dans les derniers mois. « Il y a un ou deux ans, il n’y avait pas vraiment de discussions. Là, le dialogue est ouvert », évoque-t-il.

« Le projet va se faire avec des avions de dernière génération qui sont beaucoup plus silencieux. À terme, la qualité de vie des riverains va s’améliorer. On est capables de s’équiper de technologies de gestion du bruit qu’on ne pouvait pas nécessairement s’acheter avant », illustre le gestionnaire.

Avec Julien Arsenault, La Presse