(Québec) Pierre Fitzgibbon procédera à d’importantes consultations avant de déposer un projet de loi sur l’énergie, mais s’il croit déjà qu’il faudrait réduire les tarifs d’électricité la nuit pour modifier le comportement des consommateurs, il écarte toute hausse pour les consommateurs résidentiels.

« Les Québécois ne veulent pas voir leur taux augmenter, notre premier ministre l’a dit, il ne veut pas voir les taux augmenter. On n’est pas un gouvernement de taxe, on baisse les impôts. Mais il faut aller plus loin. […] Le comportement des Québécois, je parle aussi des entreprises, n’est pas bon. On ne consomme pas bien l’électricité », a laissé tomber le ministre de l’Énergie lors d’une mêlée de presse mercredi.

C’est ce comportement de consommation qu’il cherche à modifier pour économiser de l’énergie, qui sera nécessaire à la décarbonation de l’économie du Québec. Le ministre a réitéré qu’il est moins coûteux pour Hydro-Québec d’encourager les économies d’énergie que de construire de nouveaux barrages ou d’acheter de l’énergie éolienne.

M. Fitzgibbon lancera lundi la consultation publique qui culminera avec le dépôt d’un projet à l’automne prochain. Il rencontrera des dizaines de spécialistes dans une « table de discussion énergétique ». Ils pourront l’aider « à arriver aux 25 térawattheures de réduction, d’efficience énergétique » qui lui permettront de « livrer » son plan énergétique.

Il abordera les thèmes de la gouvernance, de l’équilibre entre l’offre d’électricité et la demande, et la tarification.

Projet de loi à l’automne

Après cette réflexion publique, il publiera un cahier dans lequel il posera une série de questions sur l’avenir énergétique du Québec. Les groupes de pression et des membres de la société civile pourront s’en inspirer pour lui envoyer des mémoires durant l’été. À l'automne, il déposera enfin un projet de loi.

« Je pense que l’exercice qui va commencer la semaine prochaine est très sérieux. On a invité plus de 100 experts […], plus de 50 vont venir, plusieurs vont produire des mémoires directement sur le site du gouvernement. On rencontre les comités autochtones, de la société civile, on va passer l’été à regarder tous les mémoires qu’on va recevoir pour prendre les bonnes décisions. […] On a un manque d’électricité pour nos projets structurants. On va regarder la tarification globale, surtout focalisée sur les industries et le commercial, et on va regarder la gouvernance. Alors, on va passer l’été à regarder ça », a-t-il expliqué.

La nuit

Mais le ministre Pierre Fitzgibbon a déjà quelques a priori. Il est très favorable à une tarification dynamique de l’électricité, qui pourrait coûter moins cher la nuit, alors que la population en consomme moins.

Peut-être qu’on peut moduler pour que ça coûte moins cher. Mon exemple du lave-vaisselle, tout le monde a ri de moi, mais j’ai raison, j’ai absolument raison. Un timer, ça coûte 2 piasses.

Pierre Fitzgibbon, ministre de l’Énergie

Pour changer le comportement, une baisse de prix serait efficace, selon lui. Il cite l’exemple du cycle de lavage de lave-vaisselle, qui serait moins coûteux à 2 h qu’à l’heure du souper. « On peut moduler à la baisse comme incitatif », a-t-il dit.

Pas question d’augmenter les tarifs. Des spécialistes comme Pierre-Olivier Pineau, de HEC Montréal, estiment pourtant que la tarification actuelle de l’électricité est trop douce pour permettre des changements de comportement. Moins l’électricité est chère, moins il est rentable d’investir dans des technologies coûteuses, par exemple la géothermie.

Il recommande par exemple de mettre fin à l’« interfinancement », une politique qui fait qu’en ce moment, les consommateurs commerciaux et industriels du Québec subventionnent en partie l’électricité des consommateurs résidentiels. Cela provoquerait chez ces derniers une hausse des tarifs de 10 à 15 %, qui pourrait être étalée sur quelques années.

Le ministre Pierre Fitzgibbon a toutefois fermé la porte à toute modification de la formule d’interfinancement. Il ne « pense pas que ça doive changer ».

L’histoire jusqu’ici

3 décembre 2022

Pierre Fitzgibbon lance le débat en annonçant qu’il souhaite déposer un projet de loi pour encourager l’économie d’énergie, nécessaire pour électrifier l’économie du Québec. « Pour connaître un peu ce qui se passe dans le monde, nous ne sommes pas sobres », a-t-il dit.

26 janvier 2023

François Legault confirme qu’il tiendra une consultation publique sur l’avenir énergétique du Québec, alors qu’il ambitionne de « faire grossir Hydro-Québec de 50 % » et de gagner la course à la carboneutralité en Amérique du Nord.

4 avril 2023

Hydro-Québec rehausse sa cible d’économie d’énergie, qui passe à 25 TWh.