(Ottawa) Le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne, affirme être « en mode solutions » afin de protéger les emplois de l’entreprise biopharmaceutique de Québec Medicago après l’annonce de la fin de toutes ses activités.

La société mère de l’entreprise, Mitsubishi Chemical Group, a indiqué jeudi avoir pris cette décision « au vu des changements importants qui se sont produits sur la scène vaccinale contre la COVID-19 depuis l’autorisation du Covifenz [vaccin contre la COVID-19 conçu par Medicago] ».

Interrogé à ce sujet vendredi durant la période de questions à la Chambre des communes, M. Champagne a indiqué qu’il n’entendait pas ménager ses efforts pour protéger les emplois et la propriété intellectuelle liée à la production de ce vaccin.

« Nous travaillons maintenant à préserver les emplois, à préserver la technologie et la propriété intellectuelle. La priorité, c’est cela aujourd’hui. Nous sommes en mode solutions. [Jeudi], j’ai été en contact avec le maire de Québec, nos collègues du gouvernement du Québec. J’ai même été en contact avec le président de Mitsubishi au Japon. […] La priorité aujourd’hui, ce sont les gens de Québec. On va être en mode solutions pour les prochaines semaines », a affirmé le ministre François-Philippe Champagne.

En février 2022, Santé Canada avait approuvé le vaccin Covifenz, le premier au monde à être produit à partir de plantes. Un mois plus tard, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait toutefois rejeté le vaccin en raison des liens de Medicago avec l’industrie du tabac.

Le cigarettier Philip Morris, qui était un actionnaire minoritaire de Medicago avec une participation de 21 %, s’était par la suite départi de ses titres.

Or, le gouvernement fédéral avait signé un contrat pour acheter jusqu’à 76 millions de doses avec des projets de don de vaccins aux pays à faible revenu, mais ceux-ci n’étaient pas autorisés sans l’approbation de l’OMS.

« À la suite d’une analyse complète de la demande actuelle à l’échelle mondiale, du contexte économique en ce qui concerne les vaccins contre la COVID-19 et des défis auxquels Medicago est confrontée dans sa transition vers une production commerciale, le groupe a décidé de ne pas poursuivre la commercialisation du Covifenz », a indiqué Mitsubishi Chemical Group dans un communiqué jeudi.

Le député conservateur de la région Québec, Gérard Deltell, a soutenu que le gouvernement Trudeau avait fait preuve de « négligence » dans ce dossier en injectant des fonds publics dans une entreprise dont un des actionnaires était le cigarettier Philip Morris.

« Il aurait peut-être fallu être en mode vérifications plutôt qu’aujourd’hui être en mode solutions. En 2003, l’OMS a défini qu’on ne donnait pas de reconnaissance aux entreprises qui étaient détenues par des actionnaires qui sont des cigarettiers. C’est exactement le cas de Medicago. Ça n’a pas de bon sens. C’était déjà connu depuis 2003 que cela ne pouvait pas passer », a argué M. Deltell.

Jeudi, le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, et le ministre François-Philippe Champagne se sont dits déçus de la décision de Mitsubishi Chemicals.

L’attachée de presse de M. Champagne, Laurie Bouchard, a souligné la contribution de Medicago dans le secteur des sciences de la vie grâce à son vaccin fabriqué à partir de plantes.

« Nous nous attendons à la collaboration de toutes les parties impliquées afin de veiller à ce que les intérêts canadiens soient protégés conformément aux obligations légales et contractuelles [de Medicago] envers le gouvernement du Canada », a-t-elle indiqué.

« Et nous continuerons de nous assurer que nous disposons d’une capacité nationale de production de vaccins suffisante pour nous protéger contre les menaces de maladies infectieuses et les pandémies futures. »

Le ministre Jean-Yves Duclos, dont la circonscription est située à Québec, a déclaré qu’il allait « travailler avec le gouvernement du Québec et les leaders économiques de la région, en particulier ceux des sciences de la vie », pour également « protéger les travailleurs et identifier les options pour la suite ».

Le cabinet du ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie du Québec, Pierre Fitzgibbon, a indiqué pour sa part qu’il travaillerait de concert avec Ottawa et Mitsubishi Chemical Group afin de trouver un repreneur pour les installations de Medicago.

Le prêt de 74,5 millions accordé à l’entreprise en 2015 par Québec pour la construction d’un complexe de 245 millions sur l’avenue D’Estimauville, un projet annoncé en 2018 dont l’inauguration se faisait toujours attendre, sera remboursé, a précisé l’attaché de presse de M. Fitzgibbon, Mathieu St-Amand.

« La technologie développée par Medicago est importante pour le secteur des sciences de la vie et nous allons travailler avec nos partenaires pour garder l’expertise et les travailleurs au Québec », a-t-il ajouté.

De passage à Toronto, le ministre des Finances, Eric Girard, s’est dit « optimiste qu’on va trouver des solutions ». « Il faut trouver un repreneur. Il y a une expertise là, et c’est ce qu’on veut conserver », a-t-il affirmé.

Fondée en 1999, Medicago employait plus de 600 personnes dans ses installations de Québec, de Durham (en Caroline du Nord) et de Toronto, pouvait-on lire sur son site internet jeudi soir.

Avec Mylène Crête et Tommy Chouinard, La Presse