Les clients qui ne se présentent pas au restaurant après avoir réservé une table pourraient être passibles d’une amende. Devant ce fléau qui prend de l’ampleur, l’Association Restauration Québec (ARQ) souhaite pouvoir imposer une « pénalité » à ceux qui brillent par leur absence sans avoir pris la peine d’annuler.

Des discussions auront lieu en janvier à ce propos entre l’ARQ et l’Office de la protection du consommateur (OPC), nous a-t-on confirmé. Pendant ce temps, les restaurateurs multiplient les stratégies pour éviter que les clients leur posent un lapin. Certains vont même jusqu’à dresser une liste noire de gens reconnus pour ne pas honorer leurs réservations, indique l’ARQ. D’autres exigent un numéro de carte de crédit et facturent des frais si le client ne se présente pas. Une pratique pourtant illégale, du moins pour le moment.

« Ce qui est interdit, c’est de fixer à l’avance [par écrit ou verbalement] un montant qui serait dû si le client n’honore pas le contrat », explique Charles Tanguay, porte-parole de l’OPC. « L’un des principes de droit à la base de l’article 13 est que nul n’est censé se faire justice soi-même, qu’on ne peut pas arbitrairement fixer soi-même le montant d’un dommage éventuel », ajoute-t-il.

[Nous voulons que la loi] nous permette d’imposer une pénalité modique de 20 $ pour les gens qui ne se présentent pas à leurs réservations

Martin Vézina, vice-président aux affaires publiques de l’Association Restauration Québec (ARQ)

« L’objectif de notre revendication, c’est de changer le comportement du client, explique Martin Vézina, vice-président aux affaires publiques de l’ARQ. À force de payer des frais, le client va peut-être comprendre que d’appeler pour libérer sa table, c’est quand même un geste plus responsable. »

Des « pertes sèches »

M. Vézina, tout comme plusieurs restaurateurs que nous avons interrogés, affirme que ce phénomène, appelé no-show dans le jargon du métier, a pris de l’ampleur au cours de la dernière année.

« Les tables vides, ce sont des pertes sèches parce que la nourriture a été achetée en conséquence. Le personnel a été assigné en conséquence. La réservation, ce n’est pas juste un outil de service à la clientèle, c’est aussi un excellent outil de planification pour l’exploitant », précise-t-il.

Pour tenter d’enrayer le problème, le restaurant Le Chien fumant, situé sur le Plateau Mont-Royal, a pris le taureau par les cornes. En plus d’exiger un numéro de carte de crédit au moment de la réservation, on y facture une somme de 60 $ si le client n’honore pas sa réservation ou annule à moins de 24 heures d’avis – même en cas de COVID-19 –, comme indiqué lorsqu’on réserve en ligne. Cette somme leur est rendue sous forme de chèque-cadeau à dépenser au Chien fumant, établissement qui compte 22 places.

Interrogé sur la légalité de cette pratique, Jordan Brossard, gérant de l’établissement, avait du mal à répondre. « C’est une excellente question. » Bien que la plupart des clients qui réservent se présentent au restaurant, M. Brossard dit malgré tout avoir des cas de no-show chaque semaine.

De son côté, l’OPC n’a pas voulu se prononcer sur ce cas en particulier. « C’est une stipulation interdite », s’est contenté de dire Charles Tanguay, en faisant référence à la pénalité de 60 $.

Pour sa part, Nathalie Côté, copropriétaire de Stella Pizzeria, de la Brasserie Bernard et du restaurant Le 409, serait favorable à une pénalité de 20 $ imposée à ceux qui ne se présentent pas comme convenu.

« Vendredi passé, sur l’heure du midi, 18 personnes ne se sont pas présentées. Ça me faisait capoter. Les gens ne réalisent pas que c’est énorme », souligne-t-elle.

Pour réserver dans ses établissements, nul besoin de laisser un numéro de carte de crédit. « On prend la réservation et on fait confiance », dit-elle simplement.