On l’a dit et redit : nos factures à l’épicerie ont augmenté. Et le constat est particulièrement percutant pour les carnivores : le prix de la viande a bondi de 6 % en un an au Québec, selon les dernières données de Statistique Canada. Une hausse qui se décline différemment, selon la viande choisie, et qui a fait une gagnante entre 2019 et 2021 : la dinde.

Les producteurs de dindons du Québec cherchaient le moyen de gagner leur part de l’assiette des consommateurs depuis des années. Ils ont peut-être appris que le cœur des gourmands d’ici passe par leur portefeuille : entre 2019 et 2021, le prix de la dinde a considérablement diminué, selon une analyse du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), qui a voulu mesurer l’évolution des achats des Québécois de viandes fraîches et surgelées durant cette période.

Un kilo de dinde coûtait 5,53 $ en 2020, selon les données du MAPAQ, mais seulement 4,01 $ l’année dernière. Au kilo, la dinde est donc beaucoup moins chère que les populaires viandes rouges (bœuf, veau, agneau, même porc) et que le poulet.

La dinde, que l’on achète entière la grande majorité du temps, représentait 5,9 % des ventes de viande au Québec en 2021. C’est très peu, pourrait-on croire, mais elle ne comptait que pour 3,9 % deux ans auparavant.

Fait à noter : les hausses de ventes de dindon ont été stimulées par… la dinde congelée, beaucoup moins chère. Si vous prévoyez acheter une belle (et grosse !) dinde fraîche pour votre repas de l’Action de grâce, attendez-vous à payer beaucoup plus que la moyenne de 4 $ calculée par le MAPAQ. Plus que le double, en fait, si on se fie aux mêmes calculs.

La hausse des ventes de dinde entre 2019 et 2020 peut tout de même surprendre, étant donné que les rassemblements ont été très limités durant cette période pandémique.

« Les producteurs se sont rapidement adaptés à la situation en faisant des oiseaux plus petits », rappelle le professeur Sylvain Charlebois, directeur du Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire de l’Université Dalhousie de Halifax. « Le cycle de vie de la volaille permet ça. »

Par ailleurs, Sylvain Charlebois rappelle aussi que le prix de la dinde, comme celui des autres viandes, est très volatil et a augmenté depuis quelques mois. Il faudra voir, dit-il, si cet intérêt persiste toute l’année, à l’extérieur des deux périodes de pointe de la dinde : Noël et l’Action de grâce.

La volaille la plus populaire au Québec reste bien évidemment le poulet, qui représente une portion de viande sur trois achetée durant la pandémie – si on calcule en poids, et non en valeur.

Cuisses ou poitrines ?

Assurément poitrines, puisqu’elles comptent pour 39,3 % des coupes de poulet achetées l’année dernière – contre 15,6 % pour les cuisses.

Prix d’un kilo de viande

Agneau : 25,27 $
Veau : 14,39 $
Bœuf : 13,80 $
Poulet : 9,22 $
Porc : 8,84 $
Dinde : 4,01 $

Source : Nielsen, données compilées par le MAPAQ, pour le Québec en 2021

Des mangeurs de bœuf

La volaille a beau être populaire, les carnivores québécois aiment leur bœuf. Plus du tiers des ventes (37,7 %) de viande ont été du bœuf, toutes parties confondues.

Le prix du bœuf a pourtant suivi la tendance à la hausse, avec une augmentation de 7,5 %, en moyenne.

Je pense que le bœuf est un produit de luxe. Les gens qui veulent se faire plaisir se payent un steak ; ceux qui comptent leurs sous achètent du poulet.

Jean-Sébastien Gascon, directeur général de Bœuf Québec

Les ventes de bœuf du Québec sont en croissance, mais demeurent néanmoins une petite partie du bœuf vendu ici – environ 5 %, calcule Jean-Sébastien Gascon.

Selon le directeur de Bœuf Québec, quand les gens ont envie de manger un steak, inflation ou pas, ils vont se faire un steak. Même chose pour un burger. Et c’est ce qui explique que, proportionnellement, le bœuf demeure populaire en comparaison des autres viandes. « Il faut vraiment vouloir économiser pour se faire un burger de poulet ou de porc, poursuit Jean-Sébastien Gascon. Ou vouloir raconter une histoire à ses invités le samedi soir. »

Justement, le bœuf haché est très populaire. Pratiquement six portions de bœuf sur dix (57,8 %) sont hachées, le prix de cette coupe ayant moins augmenté que celui de certaines autres pièces de l’animal.

Parmi les autres viandes, les ventes de porc ont légèrement diminué, tandis que les ventes d’agneau et de veau ne semblent pas avoir été influencées par le contexte économique et social et sont restées stables. Mais ce sont des viandes moins populaires, qui ne représentent que 0,3 % et 1,9 %, respectivement, des ventes des rayons de boucheries.