Tout le monde se souvient de l’employé du mois popularisé par McDonald’s. Si cette forme de reconnaissance des employés existe encore, est-elle toujours pertinente ? Quelles sont les nouvelles tendances ? Tour de la question avec deux spécialistes.

La photo et le nom affichés sur le mur près des caisses chez McDolnald’s ont frappé l’imagination de nombreux clients qui attendaient leur commande.

« Ç’a été des visionnaires, parce que ça fait longtemps et on s’en souvient encore, soutient au téléphone Dorice Lévesque, vice-présidente, PVRH cabinet de recrutement. Aujourd’hui, on appelle ça la marque employeur, et c’était une réussite. »

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Dorice Lévesque, vice-présidente, PVRH cabinet de recrutement

McDonald’s Canada n’a pas réussi à retracer la date de création de son mythique programme de reconnaissance. Bien qu’il existe encore, d’autres se sont ajoutés, indique la chaîne de restauration rapide par courriel. Que ce soit les bourses d’études offertes aux étudiants qui travaillent au restaurant ou les remises sur les produits alimentaires.

L’employé du mois a été copié par de nombreux employeurs. Même si elle appartient à une autre époque, cette forme de reconnaissance est toujours utilisée dans certains commerces, confirment les deux spécialistes consultées par La Presse. Notamment dans le commerce de détail et les restaurants où les employés sont de jeunes étudiants, qui décrochent un premier emploi et travaillent à temps partiel.

Croisé chez Adidas, un conseiller en ventes de 18 ans confirme que le programme existe encore dans plusieurs boutiques, mais le nom de l’élu est affiché dans l’arrière-boutique. « J’ai moi-même été l’employé du mois chez McDonald’s, raconte Michael Caldera. Je trouvais ça très motivant. Ça m’encourageait à faire les quarts de travail moins intéressants. Le but, c’était de trouver l’employé indispensable sur le plancher, celui qui pouvait faire autant la caisse que la cuisine. On était récompensés avec des cartes-cadeaux. »

Le chouchou du mois

L’outil a cependant atteint ses limites il y a fort longtemps. De nombreux employeurs ont omis de rendre publics des critères justes, neutres et atteignables par tous.

« Même si tu as une bonne intention comme employeur, ça peut être mal perçu, dit Dorice Lévesque. Il faut que ça soit fait de façon équitable et pas selon l’humeur du décideur ou sur des critères qui seraient discriminatoires. Il ne faut pas que ça soit perçu comme le chouchou du mois. Ça peut créer une compétition malsaine. »

« Un client qui viendrait vers moi avec ce programme, je le questionnerais sur les objectifs qu’il vise et s’il les atteint vraiment », affirme de son côté Julie Lajoie, CRHA, directrice de la ligne d’affaires Altrum reconnaissance, qui se spécialise dans les solutions de reconnaissance au travail.

PHOTO FOURNIE PAR ALTRUM RECONNAISSANCE

Julie Lajoie, CRHA, directrice de la ligne d’affaires Altrum reconnaissance

« Si l’objectif est de motiver et de mobiliser les gens et qu’il y a des problèmes de transparence, de perception de favoritisme, qui causent finalement plus de frustration que d’impact positif, sauf sur la personne qui devient l’employé du mois, ce programme-là ne sert à rien. »

Motiver à la mode de 2022

Selon les spécialistes des ressources humaines, de nouveaux outils plus efficaces et mieux adaptés à la réalité de 2022 existent. Comme le télétravail, la flexibilité et la conciliation travail-famille, qui sont à la mode et dorénavant des incontournables, soulève Dorice Lévesque.

Si nul ne peut prédire si les nouvelles tendances de reconnaissance perdureront aussi longtemps que l’employé du mois, elles sont à coup sûr conçues pour les employés d’aujourd’hui, car elles sont personnalisées. C’est d’ailleurs le mot d’ordre pour les employeurs qui se battent pour retenir leurs meilleurs candidats, et même les moins bons.

Certains vont avoir besoin qu’on leur dise avec des mots, tandis que d’autres vont préférer quelque chose de tangible comme un trophée ou un cadeau. Un cabinet d’avocats au centre-ville et une usine à Saint-Georges en Beauce n’auront pas les mêmes besoins.

Julie Lajoie, CRHA, directrice de la ligne d’affaires Altrum reconnaissance

Certains outils sont simples et très appréciés, indique Dorice Lévesque. « Juste de dire bonjour le matin, bon week-end, merci de votre travail, parler aux employés des défis de l’entreprise, les consulter sur les enjeux, connaître leur vision ou leurs réflexions, demander leur opinion sur un sujet. Si tu savais à quel point ça les valorise et les mobilise ! »

Qui attend encore sa montre ?

Les employés de la génération Z, qui « swipent » à tout vent, de même que les X adeptes du « zapping », n’en ont rien à faire d’attendre 25 ans pour avoir une montre. Ils veulent qu’on souligne leurs bons coups au moment où ils se font, en direct, et qui plus est, devant tous les autres collègues. Sinon, un autre employeur se chargera de le faire.

« Aujourd’hui, c’est l’instantanéité, observe Julie Lajoie. Il faut que je me sente reconnu ici et maintenant, pas dans cinq ans, pas dans six mois. »

« Avec les nouvelles générations, la reconnaissance sociale est aussi de plus en plus en vogue, poursuit-elle. Les employés ont besoin d’être reconnus devant les autres. Quand on est en mode hybride ou en télétravail, on utilise des fils de reconnaissance sociale comme Enkourage. »

Les deux spécialistes insistent aussi sur l’importance de la reconnaissance entre pairs, car souvent, les collègues sont aux premières loges des bons coups. « Comme collègue, j’ai plus de chance de les voir en premier que la directrice ou le directeur. La plateforme permet de dire, par exemple, que notre collègue vient de faire ceci, bravo. »