L’industrie aérienne a pris les moyens pour se préparer au retour massif des voyageurs après deux années pandémiques et Ottawa doit maintenant fournir sa part, estime la présidente et cheffe de la direction de Transat A.T., Annick Guérard. À l’aube de la saison estivale, le voyagiste joint sa voix à celle des autres acteurs du secteur qui réclament un coup de barre dans les aéroports.

De plus en plus de voyageurs se retrouvent coincés dans des files d’attente qui paraissent interminables. Le phénomène provoque des annulations de vols ainsi que des retards. La situation est particulièrement difficile à Toronto (Pearson), mais l’aéroport Montréal-Trudeau n’échappe pas à ce problème.

« Il est difficile de faire coexister un volume d’activité régulier avec les protocoles sanitaires actuellement en place », a expliqué Mme Guérard, jeudi, à l’occasion d’une conférence téléphonique visant à commenter les résultats du deuxième trimestre – où la société mère d’Air Transat est demeurée dans le rouge.

Lisez « Je n’avais jamais vu une file comme ça »

Selon les chiffres compilés par la société de données Cirium, l’entreprise québécoise n’a pas encore été contrainte d’annuler des vols à Montréal-Trudeau et à Pearson depuis le début de juin à cause des retards. Ce n’est toutefois pas le cas de tous les transporteurs aériens.

Chez Air Canada, par exemple, environ 9 % des vols ont été annulés au cours des sept derniers jours à Pearson. À Montréal, cette proportion est de 5,6 %.

« Nous avons eu des retards à Toronto entre autres et il y a aussi des défis en Europe, a souligné Mme Guérard. L’approche du Canada doit tenir compte de cette nouvelle réalité. »

Des dossiers à régler

Plusieurs facteurs donnent des maux de tête aux voyageurs.

Les mesures sanitaires, comme les dépistages aléatoires, alourdissent les protocoles. Il y a moins de douaniers et l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien (ACSTA) manque d’agents pour effectuer les vérifications auprès des voyageurs avant leur départ.

Photo Nathan Denette, La Presse Canadienne

À l’aéroport Pearson de Toronto, il faut parfois patienter des heures avant de franchir les points de contrôle avant l’embarquement.

« Il faut normalement 30 secondes à un douanier pour interagir avec un voyageur et ce processus est actuellement de deux à quatre fois plus long à cause des protocoles sanitaires », déplore la dirigeante de Transat A.T.

La situation s’est détériorée à un point tel dans les aéroports que l’Association du transport aérien international (IATA), qui représente 290 compagnies aériennes, a publiquement critiqué le gouvernement Trudeau en mai dernier.

Photo David Boily, archives LA PRESSE

Annick Guérard est présidente et cheffe de la direction de Transat A. T.

À Ottawa, le ministre des Transports Omar Alghabra a réitéré, mercredi, que son gouvernement avait déjà agi pour corriger le tir, notamment avec l’ajout de plusieurs centaines d’agents à l’ACSTA. Il a ouvert la porte à d’autres mesures, sans les préciser ni fournir d’échéancier.

Au tour du carburant

Malgré une reprise de la demande, Transat A.T. peine à retrouver sa vitesse de croisière. Après les turbulences du variant Omicron, c’est la flambée des prix du carburant d’aéronefs – la principale dépense des compagnies aériennes – qui mine sa rentabilité.

En plus de refiler une partie de la hausse aux consommateurs, l’entreprise a décidé d’opter pour une stratégie de couverture des prix afin de se prémunir d’éventuelles augmentations inattendues. Ce procédé consiste à acheter du pétrole à un prix prédéterminé grâce à un instrument financier.

« Nous ne dévoilons pas le pourcentage exact [du volume visé par les couvertures] parce que nous sommes en train de mettre en place notre stratégie, mais nous voulons que la couverture soit importante », a dit le chef de la direction financière, Patrick Bui.

Selon l’IATA, le prix du kérosène en Amérique du Nord a bondi de 124 % par rapport à l’an dernier pour atteindre 174 $ US le baril en date du 3 juin dernier. Après avoir touché des sommets dans la foulée de l’offensive militaire de la Russie contre l’Ukraine, le prix a fléchi de 14 % le mois dernier.

À la Bourse de Toronto, jeudi, l’action de Transat A.T. a abandonné 2,8 %, ou 12 cents, pour clôturer à 4,14 $.

En savoir plus
  • 3000
    Transat A.T. dit avoir rappelé 3000 employés depuis avril 2021, lorsque la pandémie avait paralysé ses activités.
    transat A.T.