Le Québec figure sur le radar de Panasonic, qui scrute l’Amérique du Nord pour y construire une usine de batteries. L’opération charme d’Ottawa et de Québec auprès du géant japonais n’est pas terminée, selon les informations recueillies par La Presse.

Plus important encore, ce n’est plus qu’une question de temps avant de voir un fabricant de batteries s’implanter au Québec, d’après deux sources au cœur de la filière batterie qui ne sont pas autorisées à parler publiquement à ce stade-ci.

Cette affirmation détonne avec le discours récent du gouvernement Legault selon lequel les fabricants de batteries préféraient s’installer à proximité des constructeurs automobiles.

Attirer Panasonic, fournisseur privilégié de Tesla, représenterait toute une réussite pour l’écosystème québécois. Québec n’a pas encore réussi à convaincre un fabricant de batteries de s’implanter sur son territoire, contrairement à l’Ontario avec Stellantis et LG.

Ce n’est pas encore dans la poche avec Panasonic, qui regarde également aux États-Unis, d’après le site indépendant Electric Autonomy Canada. La multinationale chinoise CATL aurait la même approche.

Rencontres répétées

Après avoir accueilli des représentants de Panasonic à Ottawa plus tôt cette année, le ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne, leur rendra la politesse au cours de l’été. La prochaine rencontre aura lieu au Japon, où est établie la multinationale, a confirmé M. Champagne à La Presse, lundi dernier, en marge d’une annonce économique à Mirabel.

« Je vous dirais qu’on a des discussions avec Panasonic comme les autres, a-t-il expliqué à la même occasion. Les discussions avancent. Vous savez, ce sont des investissements importants. Chaque usine, ce sont plusieurs milliards de dollars. C’est pour cela qu’il faut être proactif. »

Panasonic n’a pas répondu aux questions de La Presse envoyées par courriel.

On a des discussions avec à peu près tous les manufacturiers de batteries au monde, que ça soit les Européens, les Japonais et les Coréens.

François-Philippe Champagne, ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie

Du côté d’Investissement Québec International, son président, Hubert Bolduc, ne peut pas révéler avec qui il travaille, étant lié à des ententes de confidentialité. Son patron, Guy LeBlanc, s’est rendu au Japon en avril dernier afin de rencontrer des acteurs de la filière batterie, s’est contenté de dire M. Bolduc.

Selon Electric Autonomy Canada, Panasonic doit fournir près de 4700 batteries à l’usine de Tesla située à Reno, au Nevada. C’est ce qui expliquerait l’intérêt du géant japonais à s’installer sur le continent nord-américain. Autant à Québec qu’à Ottawa, le nom de Panasonic ne figure pas au Registre des lobbyistes.

Espace limité

Le monde entier veut accueillir Panasonic, mais encore faut-il avoir l’emplacement voulu. Il faut environ 1 million de mètres carrés – ou 166 terrains de football – ainsi que bien d’autres prérequis. Un cellulier représente plus de 3000 emplois à terme.

La capacité d’accueil du Québec pour les projets d’envergure dans la filière batterie approche de sa limite. L’espace n’est pas infini et l’ère des surplus énergétiques tire bientôt à sa fin, mais les ressources sont disponibles pour frapper un dernier grand coup, assure M. Bolduc.

Le parc industriel et portuaire de Bécancour, l’endroit privilégié par le gouvernement Legault pour développer la filière électrique, accueillera BASF et l’alliance Posco/General Motors dans la fabrication de matériaux pour cathodes – composant névralgique de la batterie au lithium-ion.

Des acteurs comme Nemaska Lithium et Nouveau Monde Graphite ont également opté pour l’endroit afin d’effectuer de la transformation de minéraux essentiels.

Dernièrement, le parc de Bécancour, une société d’État, a obtenu par décret le dézonage de terrains agricoles qui lui étaient destinés depuis 1968. « On avait convenu qu’on demanderait un dézonage quand arriverait un client pour cet espace-là, explique le PDG du Parc, Maurice Richard. Cette fois-ci est la bonne. »

Le terrain dézoné est situé entre la route 261 et la rivière Gentilly au sud de l’A30.

D’après M. Richard, le parc peut accueillir cinq complexes qui ont besoin d’une superficie d’un demi-million à un million de mètres carrés chacun. Trois sont retenus par des projets déjà annoncés : Nemaska Lithium, Posco/GM et BASF.

Depuis, l’ex-premier ministre du Québec Philippe Couillard s’est récemment fait photographier devant ce que la société BritishVolt, dont il est le représentant au Canada, décrit « comme le futur terrain de sa méga-usine ».

PHOTO LINKEDIN

L’équipe de BritishVolt lors d’une visite récente au Québec devant l’endroit décrit comme « le futur terrain » de la « méga-usine » de l’entreprise

« BritishVolt a un intérêt sur ce terrain », confirme M. Richard

Des cinq terrains, il en reste donc un. « Bécancour demeure une destination potentielle [pour accueillir un cellulier], mais ce n’est pas l’unique solution », convient Hubert Bolduc.

Avec Francis Vailles, à Montréal, Joël-Denis Bellavance et William Leclerc, à Ottawa, La Presse

En savoir plus
  • 5 milliards
    C’est la somme des investissements annoncés jusqu’à présent dans la filière batterie par le gouvernement Legault.
    SOURCE : GOUVERNEMENT DU QUÉBEC