Les personnes LGBTQ+ sont plus susceptibles de subir du harcèlement en milieu de travail, révèle un récent sondage Léger Marketing commandé par la Fondation Émergence. L’organisme qui lutte contre l’homophobie et la transphobie est convaincu qu’en sensibilisant les employeurs et leurs employés à la diversité sexuelle et de genre, il est possible de diminuer ce problème.

Quelque 35 % des Québécois ont subi au moins une situation de harcèlement psychologique ou sexuel dans les cinq dernières années, indique le coup de sonde de Léger Marketing. La statistique grimpe à 65 % chez les personnes LGBTQ+. Elles ont notamment été plus nombreuses à recevoir des avances non désirées, à faire l’objet de blagues offensantes ou à subir des insultes et de la moquerie.

Président de la Fondation Émergence, Patrick Desmarais n’est pas surpris de cet écart. Pour le tiers des personnes LGBTQ+ sondées, le harcèlement vécu au travail était si pénible qu’elles ont quitté leur emploi ou ont songé à le faire, souligne-t-il.

« Quand on pense qu’aujourd’hui on est en pénurie d’employés, qu’on cherche par tous les moyens à les garder, il me semble que ça devrait être un signal pour les employeurs », croit Patrick Desmarais.

« LGBTQ+ 101 »

Aux yeux du président de la Fondation Émergence, une façon d’éviter que les milieux de travail ne deviennent « toxiques » pour les personnes LGBTQ+ est d’offrir des formations sur la diversité sexuelle et de genre.

C’est d’ailleurs ce que fait la fondation depuis un peu plus de deux ans avec son programme ProAllié. « Une sorte de cours LGBTQ+ 101 », résume Patrick Desmarais.

« L’idée, c’est de s’assurer que les bases sont au rendez-vous. On explique c’est quoi, une personne issue de la diversité sexuelle et de genre. On utilise des statistiques pour montrer aux gens qu’il y a encore des enjeux pour les personnes LGBTQ+. »

Jeudi, l’organisme a d’ailleurs lancé une formation bonifiée axée sur la prévention du harcèlement et l’inclusion des personnes LGBTQ+ en milieu de travail, en partenariat avec le Conseil du patronat du Québec et la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail. Des vidéos sur le sujet ont aussi été mises en ligne.

Regardez l’une des vidéos de la Fondation Émergence

« Ça a fait toute la différence pour moi »

Marie Isabelle Gendron est convaincue que cette approche peut avoir un effet bénéfique majeur dans la vie des personnes LGBTQ+.

PHOTO FOURNIE PAR MARIE ISABELLE GENDRON

« Ce dont on a besoin, c’est de la bienveillance. La transition, c’est un gros cheminement intérieur. On n’a pas besoin d’avoir d’autres embûches de l’extérieur », dit Marie Isabelle Gendron, maintenant retraitée de Pratt & Whitney.

En 2014, lorsqu’elle a vécu sa transition, elle a pu compter sur l’appui de son employeur, Pratt & Whitney, pour qui elle travaillait depuis 40 ans. « Ça a fait toute la différence pour moi de voir le support de ma compagnie. »

Une lettre a été préparée pour informer tous ses collègues, y compris ceux à l’international. Puis, plus tard, une vidéo a été diffusée.

Regardez la vidéo créée par Pratt & Whitney (en anglais)

Les gens de son service ont été conviés à une réunion spéciale. « Ils ont fait une formation sur la diversité. […] C’était une présentation pour éduquer mes collègues de travail, principalement des hommes », explique Marie Isabelle Gendron.

Au moment de cette réunion, un énorme poids est tombé de ses épaules. « C’est le grand jour où je suis rentrée au bureau totalement femme… en robe », ricane-t-elle.

Ses collègues, qui avaient déjà constaté qu’elle se féminisait de plus en plus, ont-ils tous bien réagi à l’annonce ? « Il y a des collègues qui ont demandé à travailler sur un autre quart parce qu’ils n’étaient pas à l’aise avec ça », confie Marie Isabelle Gendron.

« Des gens se sont distancés », ajoute-t-elle, affirmant que les invitations à des sorties entre collègues étaient moins nombreuses.

« Des commentaires désobligeants, des regards, on en a plein, pas seulement au travail », constate celle qui est aujourd’hui retraitée.

Elle croit toutefois fermement que les gestes faits par son employeur ont facilité sa transition. « La formation aide à ouvrir les perspectives des gens et à favoriser l’acceptation », affirme Marie Isabelle Gendron.

« Ce dont on a besoin, c’est de la bienveillance. La transition, c’est un gros cheminement intérieur. On n’a pas besoin d’avoir d’autres embûches de l’extérieur », conclut-elle.

En savoir plus
  • 14 %
    Proportion des Québécois qui ont reçu de l’information ou une formation sur l’inclusion des personnes LGBTQ+ au travail
    Fondation Émergence
    20 %
    Proportion des Québécois qui se sentent mal équipés pour cultiver un milieu de travail inclusif et sûr
    Fondation Émergence