(Montréal) Le projet de loi C-10 vise à tenter de réglementer l’« irréglementable », soit l’internet, soutient le grand patron de Québecor, Pierre Karl Péladeau.

Le président et chef de la direction de Québecor a comparu, vendredi après-midi, devant le comité du patrimoine qui étudie le projet de loi C-10. Déposé par le ministre Steven Guilbeault, le projet de loi vise notamment à imposer un cadre réglementaire aux géants du web et à les soumettre à la Loi sur la radiodiffusion.

« Après 30 ans d’attente, le législateur propose de réglementer les entreprises étrangères au lieu de déréglementer les entreprises locales. Nous avons de sérieuses réserves quant à la capacité du CRTC [Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes] de mettre en application cette nouvelle réglementation et de contraindre les entreprises étrangères en ligne », a lancé M. Péladeau au comité.

« Comment le législateur ou l’autorité réglementaire va réglementer [l’]internet ? C’est une question qui frappe la planète tout entière », s’est exclamé M. Péladeau.

« Qui va pouvoir dire à Apple, qui va pouvoir dire à Google, qui va pouvoir dire à Netflix que vous devez avoir tels quotas, vous devez avoir tel format de diversité, vous devez diffuser tel contenu ? », a demandé M. Péladeau.

Plutôt que de soumettre à la réglementation canadienne les géants étrangers du web, M. Péladeau aurait préféré que soit allégée la réglementation des entreprises canadiennes.

Les entreprises d’ici sont prises dans un « univers kafkaïen de réglementations », s’est-il plaint.

Il a énuméré quelques-unes de ces règles : TVA a une obligation de 50 % de contenu canadien en soirée, des obligations de dépenses en émissions canadiennes, des obligations en matière de la production indépendante, des obligations de dépenses de nouvelles de reflet local, des obligations en matière de sous-titrage et de vidéodescription, une obligation de contribution à des fonds indépendants, la réalisation de rapports sur la diversité culturelle, de rapports financiers annuels, etc.

« Au lieu d’investir dans la production québécoise et canadienne, on investit dans la paperasse, dans l’administration, alors que nos concurrents étrangers n’ont aucune obligation à cet égard-là », a-t-il tonné.

Il a aussi comparé les forces en présence : une capitalisation boursière de 1500 milliards pour Amazon, de 375 milliards pour Disney et de 8 milliards pour Québecor.

« Ceux qui souhaitent la réglementation, probablement, seraient davantage et mieux servis par une réduction de la réglementation, parce que le fait de réglementer [entreprises d’ici] risque d’accélérer la disparition des joueurs, étant donné que nous ne serons jamais en mesure de pouvoir concurrencer [les géants du web]. À la fin de la journée, c’est une question d’argent », a conclu M. Péladeau.