Les membres du clan de Gidimt’en ont ordonné l’expulsion de tout le personnel de Coastal GasLink du territoire des Wet’suwet’en en Colombie-Britannique.

Du point de vue de l’entreprise, ce geste posé par la communauté autochtone entre en conflit avec une décision du tribunal.

Dès 5 h dimanche, les travailleurs du chantier du gazoduc ont été informés qu’ils avaient huit heures pour « quitter pacifiquement » la région avant que la route principale menant au territoire de Lhudis Bin ne soit fermée à la circulation à compter de 13 h.

Ce geste de la communauté survient 50 jours après l’installation du Camp Coyote, qui est venu empêcher Coastal GasLink de construire une portion essentielle de son gazoduc de 670 kilomètres devant éventuellement transporter du gaz naturel entre Dawson Creek, dans le nord-est de la province, et Kitimat, sur la côte nord du pacifique.

Le poste de contrôle de Gidimt’en, sert à réguler l’accès à cette partie du territoire des Wet’suwet’en. La porte-parole du poste de contrôle, Molly Wickham, a fait savoir par voie de communiqué que les chefs héréditaires n’avaient « jamais cédé, renoncé ou perdu leur propriété du territoire ».

Elle a ajouté que le personnel de Coastal GasLink avait contrevenu à la fois aux lois autochtones et à un avis d’expulsion transmis il y a près de deux ans.

« Ils violent nos lois depuis trop longtemps », a-t-elle tranché.

En réaction à son expulsion, Coastal GasLink a déclaré par communiqué qu’une injonction de la Cour suprême de Colombie-Britannique, accordée le 7 janvier 2020, lui assure un accès continu et sécuritaire au secteur.

« C’est le même secteur où le groupe a bloqué illégalement l’accès au chantier de Coastal GasLink depuis le 25 septembre, en contravention avec l’ordonnance de la Cour suprême de Colombie-Britannique », peut-on lire dans le document.

« Notre priorité demeure la sécurité de notre personnel et du public. Coastal GasLink souhaite trouver une solution par le dialogue, toutefois, nos invitations n’ont pas obtenu de réponse. Nous suivons de près l’évolution de la situation », a ajouté l’entreprise.

Selon la responsable des communications du poste de contrôle de Gidimt’en, Jennifer Wickham, le chef héréditaire Dinï ze’Woos a communiqué avec l’entreprise gazière et le clan s’attendait à une entière collaboration.

Au moment de l’heure limite annoncée, à 13 h, l’entreprise aurait demandé au chef une prolongation de deux heures afin de permettre aux travailleurs déjà présents sur le chantier de sortir des limites du territoire des Wet’suwet’en. Or, deux heures plus tard, on n’aurait vu aucun mouvement sur le site.

« Je ne comprends pas trop qu’elle était leur intention en demandant plus de temps et en ne faisant rien de ce qu’ils avaient convenu de faire, a commenté Mme Wickham. Je ne vois pas trop comment cela peut leur bénéficier. »

Chacun des 20 conseils des Premières Nations présentes le long du tracé du pipeline a approuvé le projet, mais les chefs héréditaires des cinq clans de la nation allèguent que le projet n’a aucun droit sans le consentement du système traditionnel de gouvernance.

Un avis d’expulsion a été émis, puis exécuté contre Coastal GasLink, déclenchant des manifestations d’un bout à l’autre du pays en guise de solidarité, ce qui a eu pour effet de paralyser les chantiers de construction sur le territoire Wet’suwet’en.

D’après l’ordre d’expulsion publié en ligne par le clan de Gidimt’en, le bon déroulement de l’opération était conditionnel à ce que la Gendarmerie royale du Canada (GRC) ne franchisse pas la borne du 30e kilomètre du chemin forestier Morice River et que tous les travailleurs ainsi que les sous-contractants quittent les lieux pacifiquement sans geste de violence ou d’intimidation.

« Si l’une ou l’autre de ces conditions est violée, alors le chemin sera immédiatement bloqué et l’entreprise devra trouver un moyen de faire sortir ses employés », a prévenu Molly Wickham.

La directrice des communications de la GRC en Colombie-Britannique, Dawn Roberts, a confirmé que les policiers étaient au courant de l’avis d’expulsion et qu’ils surveillaient l’évolution de la situation.

« Nous avons et allons maintenir une présence policière dans le secteur. La principale responsabilité de ces agents est d’assurer une patrouille et d’intervenir en cas de plaintes, mais je ne suis pas au courant qu’on ait procédé à quelque intervention que ce soit aujourd’hui », a-t-elle commenté.

Selon Molly Wickham, il n’y aurait eu aucune communication formelle auprès de l’entreprise, mais le chef héréditaire du clan de Gidimt’en, Dinï ze’Woos, a parlé avec des dirigeants de Coastal GasLink.

« On s’attend à ce qu’ils se conforment entièrement [à l’avis d’expulsion] », a-t-elle conclu.

La direction de Coastal GasLink n’a pas répondu à nos demandes de commentaires.