Les déboires d’Eurostar ont des répercussions pour la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), qui a dû pousser la roue et participer au sauvetage financier de l’exploitant du lien ferroviaire empruntant le tunnel sous la Manche, dont elle est en partie propriétaire.

Frappée de plein fouet par la pandémie de COVID-19, qui a provoqué un effondrement du volume de passagers de l’ordre de 95 % depuis mars 2020, l’entreprise établie à Londres, qui risquait de manquer de fonds d’ici juin, a obtenu un refinancement d’environ 435 millions CAN (250 millions de livres sterling).

Dans des entrevues accordées aux médias européens au cours des derniers mois, la direction du service ferroviaire, dont les trains relient le Royaume-Uni, la France et la Belgique, avait même évoqué un possible dépôt du bilan si rien n’était fait.

Afin de sauver les meubles, les actionnaires d’Eurostar ont ainsi accepté d’injecter 87 millions supplémentaires en plus de garantir des prêts totalisant près de 261 millions. Le montage financier prévoit également la restructuration de facilités de crédit existantes de 87 millions.

Le bas de laine des Québécois détient 30 % du service ferroviaire à la suite d’un investissement de 850 millions annoncé en mars 2015. Au prorata de sa participation, cela signifie qu’il aurait injecté quelque 26 millions supplémentaires dans le cadre du soutien financier annoncé mardi.

« La Caisse a participé à la ronde de financement pour soutenir Eurostar, a indiqué dans un courriel une porte-parole de la CDPQ, Kate Monfette, qui n’a pas fourni davantage de précisions à propos de la somme déboursée. L’entreprise fait face à des défis et nous continuons à suivre la situation de près. »

Les autres actionnaires d’Eurostar sont la Société nationale des chemins de fer français (55 %), Hermes Infrastructure (10 %) ainsi que la Société nationale des chemins de fer belges (5 %).

En raison de la crise sanitaire, les actionnaires d’Eurostar avaient déjà accepté d’injecter 300 millions l’an dernier, ce qui avait coûté 90 millions au gestionnaire québécois de régimes de retraite.

« La Caisse était un peu coincée, a estimé l’expert en gouvernance et ex-haut dirigeant de la CDPQ Michel Nadeau, au cours d’un entretien téléphonique. Elle doit suivre. La pandémie n’a pas été une bonne période pour cet actif et la Caisse doit protéger son placement. L’achalandage a été famélique et cela a un impact sur la situation financière. La pandémie, c’est passager. Ce genre de placement, il faut l’analyser sur une période de 30 à 40 ans. »

Alors qu’elle a injecté des millions de dollars de plus dans Eurostar, la Caisse a également révisé à la baisse son placement dans l’entreprise, qui a connu une année extrêmement difficile en 2020.

En date du 31 décembre dernier, la CDPQ estimait que sa participation valait entre 300 millions et 500 millions. À la même période en 2019, la fourchette oscillait plutôt entre 500 millions et 1 milliard.

« La Caisse est un investisseur de long terme et nous croyons que le transport et la mobilité faible en carbone demeurent des secteurs porteurs », a expliqué Mme Monfette à propos de l’engagement de l’institution à l’égard d’Eurostar.

Avant que la pandémie ne vienne plomber l’achalandage, Eurostar avait transporté 11,1 millions de passagers en 2019, ce qui représentait une hausse annuelle de 1,7 %.