Les Grecs de l’Antiquité prédisaient les orages en scrutant le vol des hirondelles. Les amateurs de plein air savent aujourd’hui quand se mettre à l’abri en lisant les nuages. Et les météorologues modernes ont des outils sophistiqués pour prédire les tempêtes.

Les économistes ont aussi leurs propres indices précurseurs, qui se sont multipliés avec les technologies de l’information. L’analyse publiée jeudi par l’équipe économique de la Banque Nationale nous en donne un bon exemple.

Pour lire l’avenir du marché de l’emploi, ils ont croisé les données des nouvelles demandes d’assurance-emploi publiées par Statistique Canada avec le volume de recherche du terme layoff (mises à pied) effectué par les internautes dans Google. Les données de Statistique Canada sont publiées avec un peu de retard, ce qui n’est pas le cas de l’indice Google, dont les requêtes sont publiées presque en temps réels.

L’indice Google permet donc d’avoir une idée de l’état du chômage des semaines avant que sortent les données officielles.

Le croisement historique des données de Statistique Canada avec celles de Google est éloquent. Ainsi, durant la crise financière de 2008, comme pour la débâcle pétrolière de 2014, l’indice Google pour le Canada a très bien reflété le chômage officiel qui allait suivre deux ou trois mois plus tard. Et à lire les requêtes faites sur Google aujourd’hui, les prochains mois seront fort sombres à cet égard, comme on peut se l’imaginer.

Cela dit, il n’est pas possible de savoir pourquoi les internautes font de telles requêtes, et il faut donc rester prudent quand on en fait l’analyse. Mardi, dans ma chronique, je prévoyais que le taux de chômage doublerait au Québec si le confinement durant plusieurs semaines.

Le graphique pour les États-Unis publié par la Banque Nationale donne une situation semblable. En revanche, faut-il dire, les données canadiennes excluent le Québec francophone, malheureusement, puisque le terme layoff n’est pas utilisé ici. Et quand on inscrit le terme « mise à pied » dans l’outil Google ou encore « assurance-emploi », la corrélation historique est moins nette qu’avec le terme layoff en anglais, bien qu’on y voie tout de même une forte montée des requêtes ces derniers jours.

Par ailleurs, l’économiste en chef de la Banque Nationale, Stéfane Marion, rappelle que la Bourse elle-même est précurseur des mois économiques à venir. Si la Bourse a plongé ces derniers jours, c’est qu’elle prévoit que les bénéfices des entreprises chuteront au cours des prochains mois. Et quand arriveront ces mauvaises nouvelles, la Bourse ne reculera pas, elle fluctuera plutôt en fonction des nouvelles qui seront à venir.

Concernant les indices précurseurs, M. Marion a une nouvelle qu’on n’aurait pas crue réjouissante dernièrement : les routes sont de nouveau congestionnées en Chine. Selon l’indice de congestion des 30 principales villes chinoises, la congestion vient de remonter à la moyenne de l’an passé, soit avant la crise, alors qu’il était à un creux historique, nettement sous la moyenne, en janvier et février, quand les Chinois étaient cloîtrés en raison du virus.

Dit autrement, dans quelques semaines, le centre-ville de Montréal recommencera à vous faire grogner dans votre voiture, et vous serez content.

La confiance en nos politiciens

En conférence de presse jeudi, le premier ministre François Legault a dit que le Québec est chanceux de compter sur une équipe économique « brillante » à la tête du gouvernement, en qui le « monde des affaires » a confiance. Il a bien raison.

François Legault est comptable de formation et ex-propriétaire d’Air Transat. Il exerce un grand leadership durant cette crise, salué de toute part. Le ministre des Finances, Eric Girard, est économiste et ancien banquier et il connaît donc très bien les marchés financiers.

Quant au ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, il a navigué toute sa vie dans le monde des affaires et il impressionne par sa maîtrise des dossiers, sa vision, son assurance et sa franchise.

Certains me reprocheront de ne pas me garder une certaine réserve face aux dirigeants, d’être complaisant. N’ayez crainte, je ne manquerai pas de les critiquer et de relever leurs défauts, mais pour l’instant, force est de constater qu’ils sont dignes de confiance. Et quand on sait l’importance de la confiance dans ce milieu, c’est de bon augure pour l’éventuelle reprise.