Cure de beauté pour les animaux, rendez-vous de routine chez le dentiste ou le chiropraticien : les cliniques de soins privées ont repris du service. Mais pour accueillir les gens dans le respect des normes, ces spécialistes ont dû mettre la main dans leur poche pour s’adapter à la nouvelle réalité. Tour d’horizon.

Salon de toilettage

« On a 800 rendez-vous de bookés pour le toilettage et la coupe de griffes, affirme au téléphone George Bourgeois, copropriétaire de Kaviar, à Saint-Jean-sur-Richelieu. Ça se voit qu’on a perdu 10 semaines. Le carnet de rendez-vous est rempli jusqu’au 20 juillet. »

Avant que la date de réouverture ne soit annoncée, de nombreux clients s’étaient mis sur une liste d’attente. « La liste faisait 25 pages », relate le copropriétaire. L’entreprise familiale a donc décidé d’offrir une journée de plus pour répondre à la demande et cherche par le fait même une toiletteuse d’expérience supplémentaire, une denrée déjà rare en temps hors pandémie.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Chez Kaviar, à Saint-Jean-sur-Richelieu, les toiletteuses devront désinfecter la salle après le passage du chien Sky.

Pour cette petite entreprise, le coût des mesures contre le virus comprend les masques, les visières et beaucoup de désinfectant. Comme les poils d’animaux peuvent être un véhicule de transmission de la COVID-19 et que lors d’une mise en beauté, les chiens se secouent, on doit désinfecter toute la salle après le passage de chaque animal.

« Beaucoup de salons de toilettage ont déjà augmenté leurs prix, affirme George Bourgeois. Notre but a toujours été d’avoir une belle relation à long terme avec nos clients. Alors pour l’instant, on ne devrait pas facturer un surplus. Mais à la fin de la première semaine, on sera plus en mesure d’estimer exactement combien ça nous coûte de plus en produits désinfectants. »

Les chiropraticiens

« La réduction de l’achalandage en clinique due à l’application des règles sanitaires est d’environ 30 % à 40 % », calcule le DJean-François Henry, président de l’Ordre des chiropraticiens du Québec.

S’il a continué à traiter des cas qui nécessitaient une intervention urgente, le chiropraticien a recommencé lundi à recevoir l’ensemble de ses patients. « Je suis passé de quatre personnes par jour à 13 aujourd’hui [lundi] », raconte celui qui dirige une clinique dans Hochelaga-Maisonneuve. Mais c’est bien en deçà de la vingtaine de patients qu’il peut normalement recevoir.

Pour assurer sa protection et celle des autres, il a dû acheter une quantité importante de survêtements – genre de sarrau – qu’il doit changer entre chaque rendez-vous. Les lunettes de protection et le masque viennent compléter son uniforme. Pour les patients – qui doivent également porter un masque –, il a meublé sa salle d’attente avec des chaises de métal, car elles se nettoient plus facilement. Son aire d’attente – plutôt exiguë – ne peut d’ailleurs pas recevoir plus d’une personne à la fois pour respecter les règles de distanciation. Entre chacune des consultations, tout doit être nettoyé.

S’il admet que toutes ces mesures sont contraignantes, le DHenry souligne qu’il a déjà « sa petite routine ». Le plus drôle, raconte-t-il, c’est de raccompagner chaque fois le client avec une lingette désinfectante à la main pour nettoyer les poignées de porte.

Soins esthétiques

Des cliniques de soins esthétiques à l’extérieur de la grande région métropolitaine ont accueilli des clients lundi. Celles de Montréal et ses banlieues pourront rouvrir seulement le 15 juin.

Pour la première semaine, le réseau Médicart, qui comprend l’enseigne Epiderma, a ouvert 5 de ses 32 cliniques. « On veut tout d’abord tester si le protocole qu’on a mis en place tient la route, a expliqué au téléphone la présidente du réseau, Julie Bédard. Notre protocole est de haut niveau comme dans un hôpital. »

PHOTO FOURNIE PAR RÉSEAU MÉDICART

Une technicienne se prépare à donner un soin esthétique à la clinique Epiderma de Charlesbourg.

En plus de toutes les mesures habituelles, les employés font prendre leur température avant chaque quart de travail, mettent leurs vêtements dans un bac hermétique et enfilent leur uniforme sur place qui sera lavé à la buanderie de la clinique. De leur côté, les clients font aussi prendre leur température, puis mettent leurs vêtements et chaussures dans un sac qui sera ensuite jeté après usage. La désinfection des salles entre chaque client prend 20 minutes.

« On ne veut pas faire de compromis sur la santé. Or, on estime qu’il y aura une baisse d’efficacité d’au moins 30 %. »

Selon Médicart, les mesures mises en place coûteront cette année plus de 1,2 million en équipements et salaires. Le réseau promet de ne pas faire assumer ces coûts aux clients, mais ne fera plus de promotions à 60 % de rabais.

Les sexologues

Bien que les sexologues n’aient pas cessé de faire des consultations, grâce notamment à la télépratique, bon nombre d’entre eux ont recommencé à recevoir leurs patients en clinique lundi après avoir fait des investissements… en désinfectant.

« C’est certain qu’avant, il n’y avait pas autant de désinfectant dans les cliniques », souligne la présidente de l’Ordre professionnel des sexologues du Québec (OPSQ), Joanie Heppell.

Une grande quantité de mouchoirs et de savon pour les toilettes ainsi que des tissus pour recouvrir les fauteuils de consultation sont autant de dépenses que doivent assumer les sexologues, résume Mme Heppel. « Ce sont des changements coûteux, mais qui ne sont pas exagérés », admet celle dont l’Ordre représente 800 membres.

Un guide des mesures d’hygiène a été rédigé à l’intention des sexologues qui ont recommencé à voir des gens en chair et en os. Du questionnaire sur l’état de santé du patient fait au téléphone au moment de la prise de rendez-vous aux tables des salles d’attente sur lesquelles on ne déposera plus de revues, en passant par la désinfection des terminaux de paiement, rien n’a été laissé au hasard. Le nombre de patients rencontrés sera également revu à la baisse afin de respecter les règles de distanciation, peut-on lire dans le guide.

Les dentistes

Si vous attendiez avec impatiente le 1er juin pour une visite chez le dentiste, vous devrez patienter encore, car seulement 17 % des cliniques dentaires ont été en mesure de rouvrir complètement lundi, selon un sondage de l’Ordre des dentistes du Québec. Les exigences gouvernementales en matière de ventilation sont élevées et nécessitent des travaux qui ne sont pas encore terminés dans certaines cliniques. Les équipements de protection individuelle se font rares et coûtent aussi plus cher, relate le président de l’Association des chirurgiens dentistes du Québec (ACDQ), Carl Tremblay.

« Dans mon cabinet, à Rouyn-Noranda, j’ai dû investir 24 000 $ en frais de ventilation, de vitres, de laveuse-sécheuse, de plombier et d’électricien plus un autre 1000 $ pour l’équipement comme les masques de types N95, KN95 et EFP2 qui coûtent maintenant de 5 à 20 $ chacun, quand on en trouve. Même si on a assez d’équipement pour cette semaine, qui sait si on en aura assez la semaine prochaine ? »

Afin que la facture des améliorations locatives ne soit pas refilée aux patients, l’ACDQ demande l’aide du gouvernement du Québec et a aussi proposé aux assureurs un code spécial COVID-19.