J'ai toujours eu un faible pour les affaires. Je veux dire : j'ai toujours en tête un projet, une idée qui, selon moi, rapporterait beaucoup et créerait des emplois. Mais bon, je suis journaliste, j'ai un job merveilleux et ainsi va la vie.

Depuis l'effondrement du dollar, ce sont des projets liés à l'exportation qui m'allument. Rendez-vous compte : le huard plonge par rapport à toutes les monnaies. La faiblesse de notre dollar rend nos produits bien moins chers à l'extérieur et je me dis qu'il y a là une occasion d'affaires en or.

DOLLAR

Alors je cherche. Je veux remplir un conteneur de produits fabriqués ici qu'on pourrait vendre là-bas. Un gros conteneur de bateau. Ou encore un camion. Pour faire plein de cash. Et comme je suis idéaliste, pour créer des emplois et développer notre économie.

Avant d'aller plus loin, y en a-t-il encore pour douter de la tendance ? Notre dollar est extrêmement faible et il devrait le rester longtemps. Ce qu'on oublie, chaque fois, c'est à quel point le huard suit la courbe des prix des matières premières. Le prix du pétrole chute, le huard plonge. Et comme le prix du pétrole continue de descendre...

Le plongeon ne se limite pas au dollar américain. L'euro, la livre sterling, le yen, partout nos produits deviennent bien meilleur marché.

EURO

Des exemples ? Depuis la fin de 2014, le huard a perdu presque 18 % par rapport au dollar américain, 12 % par rapport à la livre sterling, 9,5 % par rapport à l'euro et environ 20 % par rapport au yen. Aujourd'hui, il vaut moins de 70 cents US.

Dit autrement, les produits et services fabriqués entièrement au Canada bénéficient soudainement d'un avantage marqué sur la concurrence étrangère. La baisse du dollar peut permettre d'augmenter les ventes à l'étranger, de prendre des parts de marché ou, enfin, d'améliorer une marge de profits qui était mince.

La chute est encore plus marquée quand on compare avec le début de 2012, il y a quatre ans. Notre monnaie a reculé d'environ 32 % face au dollar US, 25 % face à la livre sterling et 16 % face à l'euro.

Vous craignez la concurrence chinoise ? La monnaie chinoise, le renminbi, est aussi en baisse de 30 % depuis 2012. Imaginez le changement de paradigme : 30 % pour un produit de 100 $, c'est énorme !

Bien sûr, avec un dollar plus faible, il faut payer plus cher pour les composantes importées qui servent à la fabrication des produits ici, mais quand même...

Alors, je cherche. Je n'ai pas encore trouvé, mais je cherche. Quels produits pourrais-je bien mettre dans le conteneur ou le camion ? Pas si simple, puisque bien des manufacturiers ont disparu ou ont choisi de produire en Chine, justement.

À défaut d'avoir un produit original, j'ai été amené par cette réflexion à passer en revue les produits et services que le Québec exporte et qu'on pourrait exporter davantage.

Que diriez-vous d'y mettre des guitares fabriquées ici ? Nous avons quelques fabricants de guitares de qualité, qu'on pense aux Guitares Godin ou aux Guitares Boucher, par exemple.

Que diriez-vous des bottes d'hiver Pajar, des manteaux Kanuk ou du chocolat Barry Callebaut, de Saint-Hyacinthe ? Ou encore des robinets Riobel, de Saint-Jérôme, ou de l'équipement de cuisine Julien, de Québec ?

Et, bien sûr, on pourrait y mettre aussi des carcasses de porc, des conserves de sirop d'érable et ce qu'on appelle communément des « 2 par 4 ». Savez-vous que même les carottes, les choux et les oignons québécois sont davantage demandés aux États-Unis en ce moment, parfois de plus de 25 % ?

Ce n'est pas tout. Les services québécois, souvent d'excellente qualité, deviennent aussi meilleur marché. Pourquoi ne pas mettre quelques ingénieurs de SNC-Lavalin ou de Genivar dans le conteneur, ou encore des informaticiens de CGI ?

C'est une image, bien sûr, pour expliquer que nos services bénéficient, eux aussi, d'un nouvel avantage concurrentiel marqué. Par exemple, quand CGI propose un projet informatique à ses clients internationaux, le travail peut être fait dans un de ses centres mondiaux. Or, depuis deux ans, le travail réalisé au Québec est devenu plus concurrentiel. Même chose pour les jeux vidéo d'Ubisoft ou - pourquoi pas ? - pour nos productions télé exportables.

Bref, avec les contacts de plus en plus nombreux du Québec à l'étranger, mais aussi avec le commerce électronique, je me dis que, tôt ou tard, nos entrepreneurs trouveront le moyen de profiter de cet immense avantage que leur procure soudainement ce recul marqué du huard.

Avez-vous d'autres produits pour mon conteneur et des contacts à l'étranger ?

PHOTO ANDY CLARK, ARCHIVES REUTERS

La baisse du dollar peut permettre d’augmenter les ventes à l’étranger, de prendre des parts de marché ou, enfin, d’améliorer une marge de profits qui était mince.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

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