La droite, après sa victoire historique aux législatives en Espagne, va devoir convaincre de sa capacité à redresser l'économie et affrontait lundi la pression des marchés qui craignent une contagion à ce pays de la crise de la dette.

La Chine, détentrice d'environ 12% de la dette publique espagnole, a donné le ton, disant espérer que le virage à droite en Espagne allait «doper la confiance des marchés afin que l'Union européenne mette en oeuvre les mesures nécessaires adoptées aux sommets de l'UE et du G20».

Mais comme ce ne sera pas tâche facile pour le futur chef du gouvernement Mariano Rajoy, qui doit sa victoire plus à la débâcle du Parti socialiste (PSOE) sur un bilan économique désastreux et à la dispersion des voix à gauche, qu'à sa personnalité peu charismatique.

Même si le Parti populaire dispose de «tout le pouvoir» après sa victoire et s'apprête à contrôler «74,5% du budget central, des régions autonomes et des municipalités», remarque le quotidien économique Cinco Dias.

Signe d'extrême tension sur les marchés, la Bourse de Madrid perdait plus de 2% lundi après-midi et les taux des obligations espagnoles à dix ans sont montés à 6,406%, ce qui signifie un coût de financement très élevé pour l'État.

Des tensions jugées lundi «très préoccupantes» par le chef du gouvernement sortant José Luis Rodriguez Zapatero.

Les engagements de Mariano Rajoy ne semblent pas avoir convaincu, des analystes estimant désormais que seule une solution européenne pourrait stopper la spirale infernale de la crise de la dette.

«Désormais, nous ne dépendons plus seulement de nous, nous dépendons des décisions européennes», explique Soledad Pellon, analyste de la maison de courtage IG Markets. Selon elle, «ce qui est réellement important, actuellement, c'est de savoir si la BCE va parvenir à un accord pour pouvoir prêter aux pays» qui en ont besoin.

Le Parti populaire a obtenu dimanche la majorité la plus large de son histoire, avec 186 députés sur 350, contre 110 au PSOE. Mais il ne gagne que 550.000 voix par rapport aux législatives de 2008.

L'effondrement des socialistes est particulièrement spectaculaire en Andalousie, dernière région du pays qu'ils gouvernent à eux seuls et celle aussi où le chômage est le plus élevé, à 31%. Le PP y passe devant le PSOE, avec 33 sièges au Congrès contre 25.

Sitôt annoncée sa victoire, Mariano Rajoy a promis de «faire la guerre à la crise», mais a reconnu qu'«il n'allait pas y avoir de miracle».

Il devrait être investi chef du gouvernement à partir du 20 décembre, une semaine au moins après l'installation du Parlement le 13. Le prochain budget, qui s'annonce draconien, n'est pas prévu avant début février.

L'Espagne, qui affiche un chômage record de 21,52%, s'est engagée à réduire son déficit de 9,3% du PIB en 2010 à 3% en 2013. Mais la Banque d'Espagne et la Commission européenne doutent qu'elle y parvienne.

Les régions ont accumulé des déficits abyssaux qui vont à terme alourdir la dette globale du pays. Selon le journal El Economista, les dettes des banques et du Trésor arrivant à échéance en 2012 représentent 335 milliards d'euros, et pour cela l'Espagne pourrait avoir besoin d'une aide de 100 milliards.

Dilemme: la rigueur annoncée par Mariano Rajoy devrait accroître le mécontentement social qui s'exprime depuis plusieurs mois dans la rue.

Un ras-le-bol social qui a bénéficié au petit parti de gauche Izquierda Unida, capitalisant les voix des électeurs déçus du Parti socialiste, qui passe de deux à onze députés.

Quant au PSOE, il s'apprête lancer une profonde rénovation après la déroute qui lui vaut sa plus basse représentation en 34 ans de démocratie. Mais Zapatero a mis fin aux rumeurs sur son départ imminent et annoncé lundi la convocation d'un congrès ordinaire «probablement pour la première semaine de février».