L'espoir de voir la zone euro mettre un coup d'arrêt à la crise de la dette lors de son sommet de dimanche s'éloigne en raison de divergences entre pays sur les moyens de stopper la contagion, au risque de mécontenter le reste du monde qui exige une réponse rapide.

Une source gouvernementale allemande a douché les attentes jeudi en prévenant qu'il n'y aurait «vraisemblablement pas» de décision lors de la réunion des dirigeants à Bruxelles sur le renforcement de la capacité d'action du Fonds de secours de la zone euro (FESF), alors qu'il s'agissait de la principale avancée attendue.

«Il n'y a pas d'accord en Europe sur cette question» à ce jour, a ajouté cette source à Berlin, alors que le premier ministre grec George Papandréou a mis en garde à Athènes contre l'absence de décision au sommet.

Dans la même veine, un diplomate européen de haut rang à Bruxelles a jugé difficile de parvenir dimanche, à l'issue de ce sommet pourtant crucial, à un accord complet.

«L'objectif est d'avoir des décisions politiques et des orientations», a-t-il déclaré, mais «je ne serais pas étonné si certains éléments techniques restaient ensuite à concrétiser» dans les jours suivants par les ministres des Finances.

Des rumeurs ont même circulé dans la journée sur un possible report du sommet des chefs d'État et de gouvernement, avant d'être démenties.

Les marchés financiers espéraient pourtant il y a encore peu que le sommet des dirigeants européens débouche sur un accord convaincant pour stabiliser la Grèce surendettée et empêcher une contagion de la crise de la dette à l'Italie ou l'Espagne, dans le viseur des agences de notation.

Face aux incertitudes, ils ont décroché jeudi. Les Bourses européennes ont terminé en nette baisse, à l'image de Paris (-2,32%), Francfort (-2,49%) et Milan (-3,78%), affectées par la chute des valeurs bancaires.

Le forum du G20, qui se retrouve en sommet début novembre, avait aussi demandé des résultats ce dimanche.

Du coup, «on se retrouve dans une zone dangereuse» avec le risque que le sommet de dimanche soit un nouveau rendez-vous manqué, prévient un diplomate à Bruxelles.

L'augmentation de la force de frappe du FESF est jugée essentielle pour espérer enrayer la crise de la dette dans la zone euro, qui dure depuis près de deux ans, et empêcher qu'elle n'emporte des pays aussi importants que l'Italie ou l'Espagne.

Doté aujourd'hui d'une capacité effective de prêts de 440 milliards d'euros, le FESF ne dispose pas d'une enveloppe suffisante pour faire face à une contagion de très grande ampleur.

D'où l'idée en discussion depuis des semaines de démultiplier sa puissance de feu via un «effet de levier», sans nouvelle garantie des États. Le scénario sur la table est de «multiplier par cinq» la capacité d'intervention du Fonds, a indiqué jeudi une source gouvernementale.

Problème: des divergences subsistent entre Paris et Berlin sur le choix de l'effet de levier, selon la même source, en dépit des assurances apportées par le ministre des Finances Wolfgang Schäuble qui parle d'un «accord total» franco-allemand. Le président français Nicolas Sarkozy a ainsi dû se rendre en urgence mercredi à Francfort pour rencontrer la chancelière allemande Angela Merkel.

L'Allemagne cherche d'abord à limiter l'augmentation de la capacité d'intervention du FESF. M. Schäuble a évoqué un montant de 1000 milliards d'euros, selon la presse allemande, alors que d'autres scénarios sur la table évoquent un montant de plus du double.

Un autre différend porte sur les modalités. Paris a longtemps insisté pour accroître la force de frappe du FESF en le dotant d'une licence bancaire pour qu'il puise emprunter en grande quantité auprès de la Banque centrale européenne (BCE). Une option que Berlin et la BCE refusent au motif qu'elle violerait le traité de l'UE.

Cette option n'est «plus sur la table», a affirmé le secrétaire d'État aux Finances allemand Steffen Kampeter.

L'Allemagne plaide de son côté pour un autre scénario consistant à faire jouer au FESF le rôle d'assureur auprès des détenteurs de titres de dette et couvrir leurs pertes à hauteur de 20 à 30% si un État faisait défaut. Objectif: les encourager à réinvestir dans les pays jugés fragiles.