C'est l'histoire d'un groupe de touristes pris en otage par des ravisseurs. La police finit par délivrer les touristes, mais lorsqu'elle veut mettre les ravisseurs en prison, surprise, les victimes s'opposent et engagent une bagarre contre les policiers.

Voilà comment pourrait se résumer, en quelque sorte, le dossier Fondation fer de lance (FFDL). La police, c'est l'Autorité des marchés financiers (AMF), et les touristes, ce sont les 51 investisseurs de la Fondation.

L'AMF a intenté des procédures contre FFDL il y a près de deux ans, exigeant le blocage des fonds totalisant 5,6 millions de dollars. Le 25 juillet dernier, l'AMF a lancé une poursuite pénale contre FFDL et ses dirigeants, notamment Paul M. Gélinas, et leur avocat conseil, Jean-Pierre Desmarais. L'organisme réclame 5 ans moins un jour de prison pour chacune de ces deux personnes, en plus d'une amende d'environ un million de dollars chacun. Elle les accuse de collecte illégale de fonds et de courtage sans permis.

En réaction à cette poursuite, les investisseurs de FFDL ont publié un communiqué en début de semaine pour dénoncer la situation. D'abord, ils ne se décrivent pas comme des investisseurs, mais comme des sponsors de la Fondation fer de lance, ce qui les exclurait de la Loi sur les valeurs mobilières.

Ensuite, «il est primordial de noter que de le groupe de sponsors ne s'est jamais plaint de FFDL auprès de l'AMF ni n'a souhaité son intervention», écrit Jean-Claude Vachon, qui représente les sponsors.

Surtout, les investisseurs se plaignent de ne pouvoir récupérer les fonds qui bloqués par l'AMF depuis deux ans, malgré leurs demandes répétées. Il appert qu'ils s'entendent tous entre eux sur la propriété des fonds et la répartition qui doit en être faite, mais que l'AMF «persiste à faire maintenir le blocage».

Au printemps 2010, ils ont même poursuivi l'AMF en dommages et intérêts pour quelque 4,5 millions de dollars. La Cour d'appel a accepté que leurs demandes pour récupérer leurs fonds soient entendues devant la Cour supérieure plutôt que devant le Bureau de décision et révision (le tribunal des valeurs mobilières).

Denise Verreault

Parmi les investisseurs se trouvent des gens d'affaires connus. Denise Verreault et son conjoint Richard Beaupré, des Chantiers maritimes Verreault, sont du nombre. Le couple fait partie d'un groupe de quatre investisseurs qui détiennent à eux seuls 3,7 millions, soit environ les deux tiers des fonds restants.

Dans la région de Québec, la famille Laliberté, dont l'entreprise Industries et Équipements Laliberté fabrique des équipements pour les producteurs de porc, y a également investi.

Le boulanger Jacques Preschoux, de la populaire boulangerie du Plateau Mont-Royal Les Co'Pains d'Abord, est aussi parmi les investisseurs.

Autre présence notable: la fiducie Veuliah. Il s'agit de la fiducie de Dominique Chénier, l'ex-femme de Nil Lapointe, ce gourou qui s'est suicidé à Saint-Sauveur après avoir admis dans une lettre aux centaines de ses investisseurs qu'il les avait trompés.

Joint au téléphone, le porte-parole de l'AMF, Louis Beauchamp, a été peu loquace. «Nous n'étions pas d'accord avec la façon proposé par FFDL pour rembourser les fonds», a dit M. Beauchamp, qui précise que l'AMF a débuté son enquête après la plainte d'un investisseur approché par la Fondation pour injecter des fonds.

La mission de FFDL, rappelons-le, est soi-disant de prendre tous les moyens disponibles «pour améliorer la qualité de vie du genre humain». L'entreprise soutient offrir aux investisseurs une ingénierie financière qui leur permet d'obtenir de gros rendement sans aucun risque.

Selon nos informations, certains des investisseurs du groupe ont investi dans un Collateral Mortgage Obligation de la banque Wells Fargo. Il s'agit essentiellement d'une obligation adossée à un panier de titres hypothécaires. Ce placement s'apparente aux fameux papiers commerciaux qui ont fait perdre des milliards de dollars à plusieurs investisseurs institutionnels, dont la Caisse de dépôt et placement, quand le marché immobilier américain s'est effondré, en 2007.

Le représentant des investisseurs, Jean-Claude Vachon, n'a pas voulu parler à La Presse à la suite de la publication de son communiqué de presse.