L'investissement dans les titres des petites sociétés d'exploration minière peut être très rentable, à condition d'y consacrer plus de temps qu'à l'achat d'un billet de loterie.

C'est ce que soutient Robert Joyal, un docteur en biologie qui compte 40 années d'expérience dans la spéculation minière. Dans son récent livre Les minières exploratrices, occasions d'investissement pour spéculateurs avertis (www.robertjoyal.ca), il explique de façon simple à peu près tout ce qu'on devrait savoir, et faire, pour réussir dans ce domaine.

Son principal conseil: soyez un investisseur autonome. N'écoutez pas les tuyaux d'amis et, surtout, ne cédez jamais aux sollicitations des courtiers.

«J'ai commencé à faire de l'argent avec les titres miniers seulement il y a une vingtaine d'années quand j'ai décidé de faire mes propres recherches et de prendre mes propres décisions», a dit M. Joyal à La Presse Affaires.

Il reconnaît que le secteur de l'exploration minière est risqué et que ce ne sont pas tous les achats qui rapporteront. M. Joyal fait sienne la règle suivante: sur 10 investissements, quatre seront déficitaires, quatre seront suffisamment rentables pour compenser les pertes des premières, et deux donneront des rendements spectaculaires qui récompenseront largement le travail de recherche sur les 10 sociétés.

M. Joyal suggère d'avoir de 5 à 10% du portefeuille d'actions dans des titres spéculatifs.

«Cela ne vous rendra peut-être pas millionnaire mais, dit-il, si vous faites vos devoirs, vous pourrez vous payer de très beaux voyages.»

Sources

Le livre de M. Joyal répertorie les bonnes sources d'informations minières, vulgarise les notions de géologie et de finance, le tout illustré de nombreux exemples concrets.

Parmi les sociétés d'exploration actives au Québec, M. Joyal possède présentement du Eastmain Resources (Tor., ER, 1,30$) pour le potentiel de ses propriétés aurifères Auclair et celles situées près de la future mine Éléonore de Goldcorp.

M. Joyal détient aussi des actions de Dios Exploration (Bourse de croissance, DOS, 18 cents), pour son encaisse de 4 millions et ses propriétés de lithium, uranium et de diamants, ainsi que de Ressources Sirios (Bourse de croissance TSX, SOI, 8 cents) qui a accumulé de vastes propriétés de prospection à la Baie-James.

M. Joyal fait confiance aux dirigeants de ces deux sociétés liées, même s'il déplore un peu leur timidité.

Miser sur les dirigeants

Pierre Lassonde est président du conseil d'administration de Franco-Nevada Corp (Tor., FNV, 29$) et l'un des dirigeants les plus perspicaces du secteur minier. Franco-Nevada se spécialise dans l'acquisition de redevance ou royautés sur les futures mines d'or.

«Quels que soient le domaine ou les sociétés dans lesquelles vous investissez, c'est la qualité des dirigeants qui est le plus important. Ce sont eux qui vont créer de la valeur pour les actionnaires», a dit M. Lassonde à La Presse Affaires.

Selon lui, les questions à se poser sont: est-ce que ce sont des entrepreneurs qui ont déjà connu du succès? Est-ce qu'ils respectent les actionnaires? Peuvent-ils créer de la valeur même dans les situations difficiles?

Ces questions sont particulièrement importantes pour les juniors qui n'ont généralement pas de revenus, dit-il. Tous les fonds proviennent directement des actionnaires.

«La façon dont les dirigeants dépenseront ces fonds, en achats inutiles plutôt qu'en forage pour découvrir des gisements, fera toute la différence», a poursuivi M. Lassonde.

Pour lui, il n'est pas nécessaire que le président de la junior soit un géologue. L'idéal est que l'équipe de direction comporte à la fois de bons financiers et de bons géologues.

Par ailleurs, M. Lassonde, qui dépasse la soixantaine, soutient que sa génération n'a jamais connu de période aussi favorable pour faire de l'exploration, notamment au Québec.

«Si vous regardez le prix de l'or à 1100$US, le cuivre à 3$US la livre et ceux d'à peu près tous les autres métaux, c'est inouï dans un contexte de récession mondiale», a dit M. Lassonde.

Il parle même de pénurie dans le cas du cuivre et de plusieurs métaux, sauf l'aluminium, le nickel et le molybdène. Des gisements de plus basse teneur et de longs délais de mise en production empêcheront l'offre de s'ajuster rapidement à la demande qui s'accroît fortement.

La raison: la croissance économique de la Chine et, dans une moindre mesure, de l'Inde et les autres pays émergents qui créent une demande phénoménale de matières premières.

«Dans ces pays, il y a une migration massive des paysans vers la ville de sorte que chaque mois, on doit aménager une ville de l'envergure de celle de Montréal pour les accueillir», a dit M. Lassonde.

Selon lui, la reprise économique des pays industrialisés ne sera pas très robuste avant trois ou quatre ans.

Acheter à bas prix, être patient

Denis Landry est gestionnaire de la Société en commandite Sodemex 11, dont la Caisse de dépôt et placement est le seul commanditaire. Son travail consiste à investir dans des sociétés d'exploration actives au Québec, de moins de 300 millions de valeur boursière, par du capital de démarrage, par des placements privés, ou en négociant leurs titres en Bourse.

«Dans mon style de gestion, ce qui est le plus important, c'est la diversification des placements, et la patience», a dit M. Landry, qui est à la tête du fonds depuis 12 ans.

Son portefeuille comprend entre 40 et 50 sociétés d'exploration, dont environ 75% sont actives dans la recherche d'or. Le reste est composé de titres liés aux métaux usuels, à l'uranium, au pétrole et au gaz naturel.

Il constate qu'en général, ce sont 20% des sociétés qui rapporteront 80% du rendement du portefeuille.

M. Landry dit prendre un soin particulier à ne pas perturber le marché avec sa puissance financière. Il évite de vendre ou d'acheter lorsque les volumes de transactions sont trop faibles, ce qui arrive souvent chez les juniors.

M. Landry accorde une grande importance aux réalisations passées des promoteurs et dirigeants, qu'il connaît très bien. Il juge essentiel aussi qu'il y ait des personnes compétentes en géologie dans l'équipe de gestion et dans les conseils d'administration.

«Ce n'est pas facile de trouver une mine, mais c'est payant lorsqu'une société en trouve une», a conclu M. Landry.