Les ingénieurs québécois sont partout. Le résultat de leur travail est présent dans toutes les facettes de nos vies: de la brosse à dents que l'on utilise le matin à la lumière que l'on éteint avant d'aller dormir.

Et pourtant, on les connaît bien mal.

Au contraire des médecins qui nous examinent ou des mécaniciens qui réparent nos voitures, nous n'avons pas souvent l'occasion d'être en contact direct avec des ingénieurs.

Mais ils ont beau être peu visibles, ils n'en sont pas moins présents et importants dans notre société. En fait, qui sont-ils?

Aujourd'hui, au Québec, 57 700 ingénieurs détiennent un permis d'exercice, ce qui fait de leur ordre professionnel le deuxième en importance après celui des infirmières.

Leur âge moyen est de 41 ans, et seulement 12% d'entre eux sont des femmes.

Sur le plan des diplômes, 73% d'entre eux détiennent un baccalauréat et 27%, une maîtrise ou un doctorat. La majorité d'entre eux (73%) travaillent directement en génie, et 27% en gestion ou dans un autre domaine. Ils travaillent à 79,6% pour le secteur privé, tandis que 20,4% d'entre eux travaillent pour le secteur public, parapublic et les sociétés d'État.

En moyenne, ils gagnent entre 48 800$ et 118 000$ par an, selon l'expérience. Après 16 années d'expérience, le salaire moyen s'élève à 86 000$.

Et ils ne manquent pas d'ouvrage!

Au 1er avril 2008, leur taux de chômage s'élevait à 3,4%, comparativement à 7,3% pour l'ensemble du Québec (1).

Par ailleurs, les quelque 20 000 étudiants en génie présentement sur les bancs d'école ne risquent pas de chômer.

D'ici 10 ans, 28% des ingénieurs du Québec seront admissibles à la retraite, selon l'Ordre des ingénieurs du Québec.

Compte tenu des besoins grandissants pour leur expertise dans tous les secteurs d'activité, y compris la santé, ainsi que du renouvellement des infrastructures, cela soulève des enjeux importants du côté de la relève.

Comme la plupart des professions, l'ingénierie est engagée dans une course pour séduire la jeune génération et l'attirer dans ses rangs. Elle devra aussi faciliter l'accès aux personnes diplômées à l'étranger, et convaincre plus de filles de devenir ingénieures.

Les défis et l'éthique

Pour ceux qui aiment relever des défis, la carrière d'ingénieur n'en manquera pas au XXIe siècle. L'ingénieur d'aujourd'hui doit maîtriser une foule de compétences. En plus d'être à jour sur le plan technique de sa spécialité, il doit communiquer et s'intégrer à une équipe multidisciplinaire.

Il doit aussi maîtriser des compétences transversales, comme la gestion des risques et l'intégration des principes du développement durable à sa pratique.

À l'image de la société qui change rapidement, les responsabilités de l'ingénieur deviennent plus étendues et plus complexes.

Un autre enjeu a mis la profession sous les feux des projecteurs récemment: celui de l'éthique professionnelle.

«L'ingénieur est souvent placé dans une situation où il peut être amené à prendre des décisions non conformes à l'éthique», indique Pierre Lafleur, directeur de l'enseignement et de la formation à l'École polytechnique de Montréal.

Jusqu'à maintenant, la profession d'ingénieur a toujours joui d'une excellente réputation. Mais récemment, les allégations de corruption à propos de l'octroi des contrats par les municipalités dont les médias ont fait état ont soulevé l'inquiétude du public.

Ces événements amènent les ingénieurs à se poser une question importante. Que faire lorsqu'il y a discordance entre leur statut de professionnel assujetti à un code de déontologie et leur statut d'employé, assujetti aux ordres d'un patron? Lorsqu'il y a conflit entre l'éthique individuelle et l'éthique organisationnelle?

Pour Maud Cohen, présidente de l'Ordre, la réflexion sur l'éthique ne doit donc pas se faire uniquement du point de vue professionnel, mais aussi de celui de l'éthique des affaires.

Cette réflexion, selon elle, devrait se faire dans le cadre d'un débat plus large, voire une commission d'enquête, qui inclurait toute la problématique de l'octroi des contrats, de la responsabilité partagée des différents paliers gouvernementaux, des ingénieurs et des organisations, ainsi que la question du financement des partis.

«À l'heure où l'on investit des sommes importantes dans les infrastructures, il faut que la population ait le sentiment d'en avoir pour son argent, dit-elle. Les ingénieurs sont au coeur de ces investissements. Il est important pour nous que la confiance du public soit là envers les ingénieurs.»

(1) Ces données sont issues de l'Enquête sur la rémunération du RéseauIQ 2009 réalisée par internet entre le 30 janvier et le 20 février 2009 auprès de 7883 ingénieurs.