Après 26 acquisitions en 14 ans, la firme de sécurité Garda World (t.gw) se lance dans une autre mission: maximiser et protéger ses profits.

La société montréalaise a toutes les raisons du monde de faire une pause du côté des achats. Au cours des 12 derniers mois, elle a été frappée de plein fouet par la crise du crédit.

Sa monstrueuse dette de 600 millions conjuguée à une dépréciation des actifs de sa filiale AT Systems et à des résultats décevants, a aspiré son titre dans une descente vertigineuse.

En un an, le cours de son action est passé de 18$ à 57 cents de juin à septembre. Depuis, le titre a rebondi de 900% pour se retrouver à 6$.

«Ça n'a pas été facile, reconnaît Stéphan Crétier, son président. Mais pendant qu'on était sous le radar, nous avons pansé nos plaies. On s'est concentré sur nos opérations et ça va nous permettre de présenter des profits nets de 15 à 20 millions cette année.»

Au cours des trois dernières années, l'entreprise a généré des profits nets totaux de plus de 50 millions.

«Garda a toujours été considéré comme un excellent opérateur mais, au cours de la dernière année, on a mis un accent intense sur la limitation des dépenses», précise le grand patron.

À tous ceux qui s'inquiètent pour le sort de la firme, Stéphan Crétier se fait rassurant. «L'entreprise n'est pas en danger, dit-il. Je n'ai pas l'intention de la vendre, de la privatiser ou de m'en aller. Et il n'y aura pas de problème financier. Nous sommes en mesure de supporter notre dette et les prochains refinancements n'ont lieu qu'en 2012.»

D'ailleurs, ajoute-t-il, la vente récente d'une partie des actifs de Vance International, spécialisé dans les activités de surveillance et de sécurité physique aux États-Unis et au Mexique, pour 44,25 millions US, a donné du lest à Garda.

Cela dit, il pourrait se départir d'Ameriflight, qui compte 170 avions, s'il obtient une excellente offre. Les analystes estiment la valeur de cette filiale entre 80 et 90 millions.

«Mais il n'est pas question de vendre d'autres actifs, précise-t-il. On n'a pas besoin de faire ça!»

Malgré tout, Stéphan Crétier garde sa foi dans sa stratégie d'endettement.

«Je n'aime pas diluer la valeur de nos actionnaires en faisant des émissions publiques, explique-t-il. On a toujours été endetté et on le sera toujours. C'est comme ça qu'on a grandi. On va la réduire tranquillement, mais on gardera ce levier financier dans notre stratégie de croissance.»

Pour optimiser sa rentabilité, Garda est en train de faire une petite révolution dans le transport des valeurs en Amérique du Nord. Ce secteur compte pour 60% des revenus de 1,1 milliard du groupe.

«Contrairement aux compagnies plus âgées, comme Brinks, on s'est adapté à la demande d'aujourd'hui, souligne le dirigeant. On a pris le virage de la technologie, de la qualité et des services.»

Des exemples?

Au lieu d'avoir de gros camions blindés, Garda adapte sa flotte avec de plus petits véhicules blindés, sécuritaires et plus mobiles, comme on en voit en Europe.

«C'est beaucoup plus flexible quand on est sur la Fifth Avenue, dit-il. Et les employés sont plus productifs. Sans compter qu'ils coûtent moins cher à l'achat et en entretien.»

Quelque 30% de ces véhicules roulent à l'hydrogène, notamment dans les rues de Montréal, Toronto, New York, Chicago, Los Angeles et Miami.

De plus, pour confirmer ses transactions, Garda utilise des lecteurs optiques (scanneurs) alors que ses concurrents utilisent encore du papier.

Par ailleurs, ajoute le président, Garda est le numéro 1 des salles de comptage de monnaie (ou de traitement du numéraire) pour les banques américaines. Elle comptabilise, dans ses grosses machines informatisées, 300 milliards US par année pour les JP Morgan, Bank of America et compagnie.

«Et ce n'est qu'un début, dit Stéphan Crétier. Nous allons obtenir encore plus de contrats, car la crise du crédit amène les banques à confier ces activités à des sous-traitants. Il y a un potentiel énorme de ce côté.»

Quant à la sécurité physique, qui compte pour 30% des revenus, Garda a vendu ses activités américaines et fait le ménage dans ses clients canadiens.

«On a pris un virage qualité en offrant plus d'entraînement à nos employés, une meilleure supervision sur la route, des centres d'appels 24 heures sur 24, etc. dit-il. Ceux qui veulent des agents de sécurité à 7$ l'heure ne font pas affaire avec nous. On offre des services professionnels.»

Du côté des services-conseils en gestion de risque (10% des revenus), l'entreprise a choisi des créneaux particuliers.

«On se spécialise dans les secteurs des ressources naturelles (mines et pétrole), des agences gouvernementales et des organismes humanitaires. C'est un marché en croissance phénoménale.»

L'entreprise est présente au Kurdistan, en Irak, en Afghanistan, au Pakistan et elle développe de nouveaux marchés en Amérique latine et en Afrique du Nord.

«Nous sommes en excellente position pour continuer à croître dans nos trois divisions. Tout ça est le résultat d'un travail patient. Ça ne paraît peut-être pas, lance M. Crétier en souriant, mais je suis quelqu'un de très patient!»

L'ENTREPRISE

Société spécialisée dans le transport de valeurs, les services-conseils en gestion du risque et la sécurité physique. Elle réalise des revenus de 1,1 milliard de dollars en Amérique du Nord, en Amérique latine, en Europe, au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie. Garda World est inscrite à la Bourse de Toronto sous le symbole GW.

DÉFIS

Améliorer la rentabilité

STRATÉGIES

Limitation des dépenses, recentrage de certaines activités, spécialisation dans des créneaux précis et mise au point de solutions innovatrices