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Est-ce qu’on peut se fier qu’il n’y a pas de pesticides dans les produits bios ?

Hélène Coulombe

Malheureusement non, mais il y en a généralement moins que dans les produits conventionnels.

Sébastien Sauvé, chimiste à l’Université de Montréal, a justement publié en 2019 dans la revue Food Control une étude sur les résidus de pesticides sur plus d’une centaine de fruits et légumes (laitues, pommes, raisins et tomates) vendus au Québec. Seulement 48 % des produits d’agriculture conventionnelle – et 79 % des produits bios – n’avaient aucun pesticide détectable.

PHOTO MORGANE CHOQUER, ARCHIVES LA PRESSE

Sébastien Sauvé, chimiste à l’Université de Montréal

L’agriculture biologique n’utilise pas de pesticides chimiques, mais il y en a dans l’eau d’irrigation, alors c’est très difficile d’y échapper.

Sébastien Sauvé, chimiste à l’Université de Montréal

« [Les pesticides] peuvent aussi être transportés par voie aérienne, même s’il y a une zone tampon entre un champ bio et un champ conventionnel. Et même s’il y a un délai obligatoire de trois ou cinq ans entre la fin de l’agriculture conventionnelle dans un champ et le début d’une production certifiée bio, il peut rester des traces de pesticides dans les sols », explique M. Sauvé.

Cela dit, les taux détectés étaient très inférieurs dans les fruits et légumes bios, selon M. Sauvé. Autre piste pour choisir des fruits et légumes : quand une variété était disponible à la fois en bio et en agriculture conventionnelle, la présence de résidus de pesticides était encore plus faible, probablement parce que ces variétés sont moins sensibles aux maladies, insectes et champignons.

L’étude ne comprenait pas de produits bios cultivés en serre. « Il est possible que la présence de résidus de pesticides soit mieux contrôlée dans ce cas », dit M. Sauvé.

Enfin, il peut y avoir de la contamination entre le champ et le supermarché. « Selon la certification bio, il peut parfois y avoir des intermédiaires qui mélangent des variétés conventionnelles aux variétés bios tout en maintenant l’appellation bio, dit M. Sauvé. Le degré de surveillance de la chaîne d’approvisionnement des différents organismes de certification bio n’est pas égal. »

Des OGM plus résistants

Les résultats de M. Sauvé renforcent la conviction de Laure Mabileau, responsable de la campagne Sortir du glyphosate pour Vigilance OGM : il faut cibler plus généralement les pratiques agricoles actuelles, pour réduire l’utilisation de pesticides partout.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Laure Mabileau, responsable de la campagne Sortir du glyphosate pour Vigilance OGM

On a de plus en plus d’OGM dans les champs, qui sont conçus pour mieux résister aux pesticides et donc créent plus de demande pour les pesticides.

Laure Mabileau, responsable de la campagne Sortir du glyphosate pour Vigilance OGM

« Avec le temps, on a commencé à s’intéresser davantage aux limites maximales de résidus de pesticides, les LMR, fixées par le gouvernement fédéral. On est pour la justice environnementale, on ne veut pas seulement aider les gens qui achètent du bio », dit Mme Mabileau

Selon Mme Mabileau, un côté méconnu de l’agriculture bio est que certains pesticides « bios » sont autorisés. « Parfois, ce sont des produits aussi controversés », dit-elle.

Une version précédente de ce texte omettait le terme « pesticides chimiques » dans une citation de Sébastien Sauvé.

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  • 43,5 millions d’hectares
    Superficie agricole traitée avec des pesticides au Canada en 2016
    Source : Frontiers in Environmental Science