De moins en moins de neige
Une tendance lourde s’installe aux Jeux d’hiver : des épreuves sans neige naturelle. Les Jeux de Pékin marquent l’imaginaire alors que 100 % de la neige a été fabriquée mécaniquement. Lors des Jeux de PyeongChang, en Corée du Sud, en 2018, la proportion de neige artificielle était de 90 %. Quatre ans plus tôt, à Sotchi, en Russie, 80 % de la neige n’était pas naturelle.
Des villes hôtes qui disparaissent… comme la neige
En raison des changements climatiques, les chances de pouvoir tenir des Jeux olympiques d’hiver s’étiolent à grande vitesse. La Chaire de recherche du Canada sur le changement mondial et le tourisme de l’Université de Waterloo s’intéresse à la question.
En 2014, une de ses études concluait que la moitié des villes qui ont accueilli des Jeux d’hiver depuis 1924 ne pourraient pas présenter ces épreuves en 2080.
Dans une autre étude parue en 2019, le titulaire de la Chaire, le géographe Daniel Scott, et son équipe concluaient que parmi les 21 villes qui ont déjà accueilli les Jeux, seulement 12 pourraient le faire à nouveau en 2080. Ce scénario serait possible à la condition que les cibles de l’Accord de Paris soient respectées, afin de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 ℃. Dans le cas contraire, si la tendance se maintient, huit villes seulement pourraient accueillir à nouveau des Jeux d’hiver en 2080.
De huit villes à une seule
Dans une toute nouvelle étude, Daniel Scott et son équipe concluent qu’une seule ville pourrait à nouveau accueillir les Jeux d’hiver en 2080 – soit Sapporo, au Japon –, du moins si la tendance actuelle se maintient. Dans un scénario de plus en plus improbable où le réchauffement serait limité à 1,5 ℃, huit villes pourraient encore présenter des compétitions hivernales en 2080. Rappelons que selon les dernières estimations de l’ONU, le monde se dirige vers un réchauffement de 2,7 ℃ d’ici la fin du siècle. On prévoit également une hausse des émissions mondiales de gaz à effet de serre de 16 % d’ici 2030.
L’avis des entraîneurs et des athlètes
Les chercheurs de l’Université de Waterloo ont raffiné leur modèle en tenant compte de l’avis de 339 athlètes et entraîneurs de haut niveau, provenant de 20 pays. Parmi les disciplines visées, on retrouvait notamment le ski alpin, le ski de fond, la planche à neige et le saut à ski. Une grille d’analyse avec quatre critères (épaisseur de la neige, présence de « neige mouillée », épisodes de pluie et températures « inacceptables ») a servi à évaluer dans quelle mesure les conditions seraient sécuritaires pour les athlètes, en tenant compte des impacts des changements climatiques.
Les changements climatiques sont réels
« C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons fait cette étude, explique le géographe Daniel Scott. Nous voulons faire comprendre au public que les changements climatiques sont réels. Nous pensons que si ce sont des athlètes qui en parlent, cela résonnera peut-être plus que le discours des scientifiques. » La très grande majorité (90 %) des athlètes et entraîneurs qui ont participé à l’étude se disent « préoccupés par les changements climatiques et veulent participer au débat ».
13 pays
Depuis 1924, seulement 13 pays ont accueilli les Jeux d’hiver.
- États-Unis : 4
- France : 3
- Italie : 3
- Autriche : 2
- Canada : 2
- Japon : 2
- Norvège : 2
- Suisse : 2
- Allemagne : 1
- Chine : 1
- Corée du Sud : 1
- Russie : 1
- Yougoslavie : 1
Les villes hôtes depuis 1924
- Chamonix, France (1924)
- Saint-Moritz, Suisse (1928 et 1948)
- Lake Placid, États-Unis (1932 et 1980)
- Garmisch-Partenkirchen, Allemagne (1936)
- Oslo, Norvège (1952)
- Cortina d’Ampezzo, Italie (1956)
- Squaw Valley, États-Unis (1960)
- Innsbruck, Autriche (1964 et 1976)
- Grenoble, France (1968)
- Sapporo, Japon (1972)
- Sarajevo, Yougoslavie (1984)
- Calgary, Canada (1988)
- Albertville, France (1992)
- Lillehammer, Norvège (1994)
- Nagano, Japon (1998)
- Salt Lake City, États-Unis (2002)
- Turin, Italie (2006)
- Vancouver, Canada (2010)
- Sotchi, Russie (2014)
- PyeongChang, Corée du Sud (2018)
- Pékin, Chine (2022)
Les villes hôtes potentielles en 2050
Scénario optimiste avec un réchauffement limité à 1,5 ℃…
- Vancouver
- Calgary
- Salt Lake City
- Lake Placid
- Lillehammer
- Oslo
- Albertville
- Sapporo
- Nagano
Si la tendance actuelle se maintient…
- Lake Placid
- Lillehammer
- Oslo
- Sapporo
Les villes hôtes potentielles en 2080
Scénario optimiste avec un réchauffement limité à 1,5 ℃…
- Vancouver
- Calgary
- Salt Lake City
- Lake Placid
- Lillehammer
- Oslo
- Sapporo
- Nagano
Si la tendance actuelle se maintient…
- Sapporo
Et le ski au Québec ?
Les plus récentes données sur l’avenir des stations de ski au Québec datent de 2019. Une étude du consortium Ouranos avait alors établi que la durée totale de la saison de ski serait réduite de 10 à 20 jours d’ici 2050 et que les centres de ski pourraient perdre jusqu’à 30 % de leurs pistes. À ce jour, 84 % des membres de l’Association des stations de ski du Québec possèdent un système de fabrication de neige. Mais si la tendance se maintient, la neige « artificielle » pourrait ne pas suffire d’ici la fin du siècle. À Sutton, par exemple, Ouranos prévoit jusqu’à 208 mm de pluie hivernale à partir de 2071. La température moyenne en hiver à Sutton serait de -1,2 ℃.
Lisez l’étude publiée en 2019 (en anglais) Lisez l’étude publiée en 2022 (en anglais)