La pandémie n’a pas vraiment ralenti la croissance démographique du Québec, mais elle a plombé celle de l’île de Montréal et celle de Laval, selon un nouveau rapport de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ). Les dernières années ont vu une montée du nombre de résidents non permanents, comme les demandeurs de statut de réfugié et les étudiants étrangers, catégories dont l’évolution est plus difficile à prédire.

« Pour le moment, on ne voit pas d’effet très important sur la croissance démographique future de la COVID-19 », explique Frédéric Fleury-Payeur, démographe de l’ISQ. « Mais on voit un petit impact sur la croissance de Montréal et Laval, par rapport au reste du Québec, par rapport à nos dernières prédictions démographiques en 2019. » Les prédictions de 2019 prévoyaient les 10 millions pour un peu après 2066, et celles de jeudi pour un peu avant. Les prédictions de 2014, elles, prévoyaient les 10 millions pour 2060.

Le poids démographique de l’île de Montréal devrait donc passer de 24,1 % à 23,9 % de la population québécoise d’ici 2041. Celui de Laval progressera faiblement, de 5,2 % à 5,4 % de la population québécoise, beaucoup moins que la progression de Lanaudière (de 6,1 % à 6,5 %) ou des Laurentides (de 7,4 % à 8 %). Les seules régions qui font vraiment moins bien sont l’est du Québec, avec des baisses importantes dans le Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie.

« La baisse de la population dans l’est du Québec va par exemple avoir un impact sur la population étudiante à l’Université Laval à Québec », note M. Fleury-Payeur.

Résidents non permanents

Les résidents non permanents, qui comprennent notamment les travailleurs temporaires, sont depuis le début du millénaire un facteur plus important que les naissances pour l’augmentation de la population québécoise. La difficulté de prévoir l’évolution de leur nombre est donc cruciale. En 2016, l’ISQ avait émis l’hypothèse que le nombre de résidents non permanents plafonnerait à 258 000 personnes en 2026, mais ce seuil a été dépassé dès 2019. L’ISQ prévoit donc que leur nombre plafonnera à 330 000 en 2026.

« Les gouvernements veulent augmenter le nombre de travailleurs temporaires, et les universités veulent plus d’étudiants étrangers, dit M. Fleury-Payeur. Mais il y aura nécessairement un plafond dans ces deux cas. Il faut aussi mieux modéliser la proportion des étudiants étrangers qui finalement obtiendront leur résidence permanente. Ils pourraient rajeunir l’immigration. »

Pour ce qui est des demandeurs de statut de réfugié, l’incertitude est en partie liée à l’expulsion de ceux dont la demande est refusée. « Pour le moment, nous n’avons pas de données sur les sans-papiers, les gens dont la demande de statut de réfugié est refusée et les gens qui ont un visa de tourisme, mais restent finalement au pays, dit M. Fleury-Payeur. Leur nombre était considéré comme peu important. Mais on voit qu’aux États-Unis et en Europe, il peut y avoir beaucoup de monde dans cette catégorie. »

Plusieurs analyses démographiques mondiales prévoient que la population de la planète atteindra un pic entre 2060 et 2100, avec une chute du taux de natalité même en Afrique. Cela pourrait-il tarir le nombre de gens désirant émigrer au Canada, et miner la croissance démographique québécoise ? « Je ne crois pas, dit M. Fleury-Payeur. Il y a un gros réservoir de gens qui veulent émigrer ici. » Il donne l’exemple de la Chine, dont la population en âge de travailler est en chute libre, mais d’où sont issus autant d’immigrants vers le Canada qu’auparavant.

Surmortalité

Par ailleurs, l’Institut national de santé publique du Québec a publié jeudi sa dernière estimation de la surmortalité liée à la COVID-19, l’augmentation du nombre de décès par rapport à la normale. La surmortalité lors de la première vague de la pandémie, au printemps 2020, a été de 25 %, de 9 % lors de la deuxième vague, l’automne dernier. La surmortalité a dépassé 30 % chez les plus de 80 ans lors de la première vague, mais il n’y avait pas de différence entre les groupes d’âge pour la deuxième vague. À noter, le nombre de victimes de la COVID-19 pèse très lourd dans cette surmortalité, parce que les décès liés à d’autres causes, par exemple les accidents de la route ou la grippe, ont été moins nombreux qu’à l’habitude.

La population du Québec en chiffres

  • 2,07 millions : population de l’île de Montréal en 2020
  • 2,27 millions : population projetée de l’île de Montréal en 2041
  • 8,58 millions : population du Québec en 2020
  • 9,49 millions : population projetée du Québec en 2041

Source : Institut de la statistique du Québec