(Longueuil) L’Agence spatiale canadienne et la NASA travaillent déjà sur les missions Artemis qui visent un retour sur la Lune d’ici 2024. Un premier pas vers une exploration plus profonde de l’espace grâce à une nouvelle station internationale. Mais avant de rêver de marcher sur Mars, il faut régler un problème majeur : comment fournir assez de nourriture aux astronautes pour des missions devant durer plusieurs années ?

Dans l’espoir de solliciter des milliers de cerveaux à travers le monde pour cogiter sur ce casse-tête, les agences spatiales canadienne (ASC) et américaine (NASA) ont lancé en début d’année un grand concours appelé « Défi de l’alimentation dans l’espace lointain » (Deep Space Food Challenge).

Mardi midi, des experts des deux agences ainsi que des astronautes, dont le Canadien Jeremy Hansen, ont participé à une discussion virtuelle au cours de laquelle on a abordé divers aspects de l’alimentation dans l’espace. Il a notamment été question de l’importance de fournir des aliments appétissants et savoureux pour que les astronautes aient envie de manger. Un enjeu crucial pour qu’ils ne réduisent pas leur consommation de nourriture et qu’ils maintiennent une bonne santé.

En bref, le principal problème demeure que si l’on part en mission d’exploration spatiale, il faut tout apporter avec soi depuis la Terre. Actuellement, il est facile d’approvisionner la Station spatiale internationale (SSI), puisqu’elle se trouve en orbite autour de la Terre, à quelques heures de vol.

Dans le cas d’une mission vers Mars, par exemple, il faudrait prévoir des quantités de nourriture suffisantes pour plusieurs années. De plus, il faut tenir compte qu’il n’y a pas de réfrigérateur dans les navettes en raison du coût énergétique nécessaire au fonctionnement de tels appareils. Actuellement, on utilise des aliments déshydratés qui sont hydratés à nouveau par les astronautes dans l’espace. On utilise aussi des aliments préparés mis en conserve ou en sachets, mais leur durée de conservation poserait problème selon les experts de la NASA.

Voilà pourquoi on recherche de nouvelles méthodes permettant de fournir des aliments sains et savoureux aux astronautes. On aimerait, par ailleurs, développer des moyens de produire des aliments dans un environnement hostile, comme sur la Lune ou sur Mars. Des techniques qui seraient également applicables sur Terre, comme l’a souligné l’astronaute Jeremy Hansen en parlant du concours.

« C’est une opportunité incroyable pour l’humanité ! D’abord pour nous donner la chance d’explorer l’espace. Ensuite, parce que c’est essentiel pour nourrir les populations en régions isolées. La sécurité alimentaire est un enjeu majeur au Canada et le transport d’aliment demeure difficile et très coûteux dans le Grand Nord notamment », a-t-il fait valoir.

Il faut donc tenir compte du fait que les astronautes sont confinés à un espace limité, avec des ressources limitées et des contraintes liées à l’énergie ou au poids des équipements.

Des aliments frais et variés

Le principal défi que cherchent à relever les agences spatiales consiste à trouver un moyen de fournir des aliments frais aux astronautes. Comme le mentionne la scientifique en chef du programme de technologie alimentaire de la NASA, Grace Douglas, ce sont les produits frais qui sont les plus appétissants et les plus réconfortants pour les astronautes.

Car au-delà de fournir uniquement des nutriments aux membres de l’équipage, il faut leur offrir des plats savoureux et variés qui leur donnent envie de s’alimenter convenablement. Chaque aliment contient une multitude de micronutriments qui sont essentiels au corps humain.

« Pour être nutritif, un aliment doit être consommé ! », a résumé simplement son collègue Scott M. Smith, chercheur principal au laboratoire de biochimie du Centre spatial Johnson de la NASA. Celui-ci ajoute que les données prouvent qu’une bonne alimentation limite la perte de poids des astronautes et favorise la récupération au retour sur Terre.

Tous s’entendent sur le fait que le principal reproche formulé par les astronautes est le manque de variété dans le choix des aliments. En ce qui concerne l’expérience gustative, l’ex-astronaute américain Donald Thomas, qui a passé plus de 1000 heures dans l’espace en quatre missions, a déclaré que ce n’était pas si mal, mais qu’il ne mangerait jamais dans un restaurant où l’on sert ce genre de plats !

Pour renchérir, Jeremy Hansen, qui attend toujours sa première assignation, a rappelé que l’absence de gravité a pour effet de faire enfler légèrement la tête et de boucher les sinus. Les aliments deviennent donc plus fades. « Il faut prévoir des mets épicés ou bien assaisonnés », a-t-il conseillé aux éventuels participants du concours.

Le défi est ouvert à tous les résidants du Canada. Les entreprises, organismes à but non lucratif ou les institutions d’enseignement sont aussi admissibles. Le volet canadien du concours est coordonné par l’Agence spatiale canadienne, située à Longueuil. Des bourses sont offertes en prix à chacune des trois étapes du concours. Les équipes intéressées doivent déposer leur candidature avant le 30 juillet.