Une mort et plusieurs surdoses aux opioïdes ont été signalées à la Santé publique de Montréal, qui s’inquiète d’une « circulation importante » dans la métropole de comprimés contrefaits pouvant être « jusqu’à 25 fois plus puissants » que le fentanyl.

« Récemment, un décès et plusieurs surdoses liés à la consommation présumée d’hydromorphone ont été signalés », a indiqué vendredi la Direction régionale de santé publique de Montréal (DRSP), dans une « alerte surdose » publiée sur les réseaux sociaux. L’affaire remonterait à il y a quelques semaines, en mars.

L’organisme se dit particulièrement « préoccupé par la circulation importante de comprimés contrefaits sur son territoire ». Dans ce cas-ci, les drogues distribuées étaient des « comprimés blancs de forme triangulaire aux coins arrondis ayant une apparence similaire aux comprimés pharmaceutiques d’hydromorphone », indiquent les autorités, en précisant qu’une enquête policière pourrait avoir lieu.

Une analyse du contenu de ces comprimés a ultimement « révélé la présence de protonitazèpyne et de N-déséthyl isotonitazène, des nitazènes, des opioïdes de synthèse jusqu’à 25 fois plus puissants que le fentanyl », poursuit la Santé publique.

Elle précise qu’il n’est souvent « pas possible de distinguer visuellement un comprimé pharmaceutique d’un comprimé contrefait, vu la ressemblance ». Résultat : les comprimés achetés sur le marché illicite peuvent contenir une substance ou un mélange de substances qui est bien différent que celui qui est attendu.

Bref, « les risques de surdoses sont élevés pour une personne qui consommerait un opioïde de la classe des nitazènes à son insu », prévient la DRSP, qui invite la population à rester vigilante et à faire appel aux services de consommation supervisée ou de vérifications de drogues, au besoin.

Par courriel, la conseillère aux relations médias de la Santé publique, Marianne Paquette, précise que « les comprimés de contrefaçon représentent une préoccupation depuis plusieurs années ». « Cependant, le marché illicite est particulièrement dynamique et imprévisible et de nouvelles substances de plus en plus puissantes sont régulièrement détectées. C’est le cas pour la situation actuelle », explique-t-elle.

En règle générale, la DRSP recommande aussi aux consommateurs d’éviter de consommer seul ou « tous en même temps » dans un groupe. Il est aussi fortement suggéré d’avoir de la naloxone disponible en quantité suffisante et de diminuer la dose de drogue pour tester ses effets, surtout si la drogue provient d’une nouvelle source. La naloxone est un médicament qui renverse temporairement les effets d’une surdose d’opioïdes.

De plus en plus aigu

Au Québec, l’Institut national de santé publique (INSPQ) révélait récemment que 536 personnes ont perdu la vie en 2023 en lien avec une intoxication ou une surdose aux opioïdes.

L’année précédente, on en avait recensé 540, ce qui était en soi une hausse marquée par rapport aux 450 morts y étant liés en 2021. En 2020, au plus fort de la pandémie, le Québec avait enregistré 547 morts liés aux surdoses aux opioïdes. En 2019, c’était 414 et en 2018, 424. Bref, le phénomène est en hausse depuis quelques années, de manière générale.

Selon les plus récentes données, le taux de mortalité par opioïdes « est moindre au Québec que la moyenne des provinces canadiennes », mais il augmente tout de même de façon constante. En fait, leur nombre a plus que triplé entre 2000 et 2020, passant d’un peu moins de 100 à plus de 300 durant cette période. Dans les dernières années, la moyenne québécoise est d’environ cinq décès par semaine attribuables aux opioïdes.

Même si sa situation demeure moins alarmante qu’ailleurs, le Québec n’est « pas à l’abri d’un revers tragique » dans la crise des opioïdes, avait aussi prévenu l’Institut dans un rapport paru au mois d’octobre dernier. L’organisme invite les autorités à tenir une « vigie à large spectre » sur le phénomène.

Plusieurs tendances s’imposent selon l’INSPQ, dont en premier lieu, une surreprésentation de la population itinérante parmi les individus ayant fait une surdose involontaire d’opioïdes dans les six derniers mois au Québec. L’organisme avance que les sans-abri sont « considérablement sous-représentés parmi les personnes possédant une trousse de naloxone, ce qui les rend nécessairement plus vulnérables à un décès par surdose ».

Tout cela survient alors qu’il y a quelques mois, en septembre dernier, neuf personnes, dont sept sans-abri autochtones, avaient été transportées à l’hôpital pour des surdoses potentiellement liées au fentanyl, une affaire qui avait marqué les esprits dans la métropole.