Peut-on éviter que des personnes se donnent la mort lorsqu’elles souffrent de problèmes de santé mentale complexes aggravés par l’usage de substances et qu’elles ont des antécédents suicidaires ? Oui, à condition d’y mettre les ressources, conclut la coroner Julie-Kim Godin dans son rapport d’enquête publique publié mercredi. Aperçu en cinq faits saillants.

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Nombre de recommandations contenues dans ce rapport de 127 pages portant sur les suicides de cinq personnes entre 2017 et 2019. Chacune avait déjà eu des idées ou des comportements suicidaires, et présentait des problèmes de santé mentale complexes doublés de troubles liés à l’usage d’alcool, de drogue ou de médicaments.

« Faisons en sorte que la santé mentale ne soit pas l’enfant pauvre du système de santé et que les investissements requis soient faits pour y parvenir et répondre à la pénurie de main-d’œuvre », plaide MGodin, en réclamant « une réponse humaine et personnalisée ».

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Plus d’une centaine de témoins ont participé à l’enquête, dont plusieurs familles. Les proches, pourtant reconnus comme facteurs de protection importants, se sentent souvent « démunis et peu impliqués, voire exclus, des soins et du processus de rétablissement », déplore MGodin.

« Lorsqu’un évènement violent ou un décès par suicide survient, ils ressentent conséquemment une colère et une culpabilité décuplées qui s’additionnent à leur deuil, les rendant eux-mêmes vulnérables et à risque », souligne la coroner.

Elle recommande au ministère de la Santé et des Services sociaux de soutenir ses établissements et les organismes communautaires pour qu’ils facilitent l’implication des proches et la circulation de l’information.

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La coroner a regroupé ses recommandations sous neuf thèmes, en plaçant le tandem « troubles d’utilisation de substances et de santé mentale » au sommet de sa liste.

Ce cocktail complexe « entraîne souvent une évolution moins favorable, un parcours non linéaire, une faible adhésion aux suivis et aux traitements, une moins bonne réponse aux interventions de même qu’un risque suicidaire plus élevé », prévient MGodin.

Pour que les troubles dits « concomitants » soient dépistés rapidement et ne soient pas traités en vase clos, professionnels de la santé et intervenants de première ligne doivent être mieux formés, recommande-t-elle.

« Filet de sécurité »

L’expression revient une vingtaine de fois dans le rapport, pour constater son insuffisance ou son inexistence.

Quand Mikhaël Ryan a quitté son centre de traitement, ni ses proches ni l’organisme qui l’y avait dirigé n’ont été avisés. Deux jours plus tard, il se donnait la mort après avoir tué sa mère.

Les proches de Suzie Aubé n’ont pas été davantage prévenus de sa sortie de l’hôpital psychiatrique ni de son arrestation pour conduite avec facultés affaiblies la veille. Quelques heures plus tard, elle mettait fin à ses jours.

Multipliant les exemples, la coroner insiste sur l’importante de « mettre en place un filet de sécurité solide » autour des personnes vulnérables.

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La coroner n’ayant pas chiffré les sommes requises pour répondre à ses recommandations, ce symbole n’apparaît nulle part dans son rapport. La nécessité de « rehausser les soins et services », de « faciliter l’accès », de « bonifier la formation » et d’« intensifier les ressources » y apparaît toutefois partout.

« Les bonnes intentions et orientations gouvernementales sont claires », reconnaît MGodin en citant les plans d’action interministériels en santé mentale et en dépendance. « Mais les moyens pour concrétiser ce projet d’envergure au sein de tout le réseau de la santé méritent d’être précisés et structurés. On peut également se demander si les investissements prévus seront suffisants. »

Consultez le rapport d’enquête de la coroner

BESOIN D’AIDE ?

Si vous avez besoin de soutien, si vous avez des idées suicidaires ou si vous êtes inquiet pour un de vos proches, contactez le 1 866 APPELLE (1 866 277-3553). Un intervenant en prévention du suicide est disponible pour vous 24 heures sur 24, sept jours sur sept.

Vous pouvez aussi consulter le site commentparlerdusuicide.com