L’examen d’admission à la profession infirmière, qui s’était soldé en septembre par un taux d’échec disproportionné, comporte plusieurs failles, révèle une enquête du commissaire à l’admission aux professions. Il remet notamment en cause la qualité des questions et des notes de passage « haussées sans justification suffisante ». Plus de 500 infirmières en auraient fait les frais.

« Notre enquête a révélé que l’examen de l’Ordre comporte des failles et des fragilités concernant sa validité, sa fiabilité et la détermination de sa note de passage », a affirmé mardi le commissaire à l’admission aux professions, MAndré Gariépy.

Près de la moitié des étudiants en soins infirmiers (48,6 %) qui passaient l’examen pour la première fois en septembre dernier ont échoué à celui-ci. Le commissaire André Gariépy avait été chargé d’enquêter sur les raisons ayant entraîné ce taux d’échec disproportionné.

Selon une simulation par l’équipe d’enquête du commissaire, plus de 500 étudiantes auraient dû réussir plutôt qu’échouer à l’examen de septembre 2022. « C’est autant de futures infirmières qui auraient pu avoir leur permis d’exercice à l’automne 2022 et contribuer au réseau de la santé », écrit le commissaire. Il appelle à ce que les résultats de septembre 2022 soient recalculés à partir d’une note de passage revue. Au total, 2904 candidats s’étaient présentés à la séance d’examen de septembre 2022.

L’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) a annoncé mardi prendre quelques jours pour analyser le rapport, ajoutant que ce délai n’influera pas sur la publication des résultats de l’examen de mars 2023. De son côté, le ministre de la Santé, Christian Dubé, a déclaré vouloir prendre le temps de lire le rapport et d’en parler à ses collègues, ainsi qu’à l’OIIQ. « Je vais être très clair, on n’a pas les moyens de se priver de 500 infirmières », a-t-il déclaré.

La qualité des questions en jeu

L’enquête conclut à des problèmes importants dans la construction des questions de l’examen. « Plus du trois quarts des étudiants trouvaient que les questions, les mises en situation et les choix de réponses n’étaient pas clairs. C’était autant chez les cégépiens que les universitaires », a dit à La Presse MGariépy. Par ailleurs, l’Ordre n’est pas en mesure de garantir ni de démontrer un niveau de difficulté comparable entre les séances de l’examen, note-t-il.

Le commissaire juge également que la validité de l’examen est affectée. La documentation servant habituellement à la construction de l’examen et à sa validité « n’a pas été révisée depuis plus d’une décennie ». On note également que l’Ordre « n’a pas en main une analyse des tâches de la profession, actuelle et en bonne et due forme, pour guider l’élaboration de l’examen ».

Il note aussi une situation préoccupante pour les personnes formées hors du Québec, dont le taux de réussite a été de 15 % en septembre 2022.

L’Ordre et d’autres parties prenantes doivent se pencher sur les raisons de ces faibles taux et apporter des solutions adaptées. Outre l’équité pour les personnes visées, cela est crucial pour le Québec qui recrute ces temps-ci des personnes à l’étranger pour faire face à une pénurie d’infirmières et d’infirmiers.

Le commissaire André Gariépy

L’Ordre invité à améliorer son examen

À la suite de ces observations, le commissaire invite l’Ordre à se questionner sur la pertinence et l’utilité d’un examen, à améliorer son examen en donnant suite aux recommandations du rapport ou à envisager d’utiliser un autre examen pertinent à la profession infirmière. « On demande aussi de recalculer les notes de septembre et d’envisager de recalculer mars 2021 et mars 2022 », dit MGariépy.

L’examen, qui comporte une centaine de questions à choix de réponses, dure une journée entière. Il a lieu deux fois par année, en septembre et en mars. Les candidats peuvent se présenter à l’examen un maximum de trois fois.

En novembre, l’OIIQ expliquait le fort taux d’échec par la pandémie, notamment par le fait que les élèves ont dû jongler avec des cours en ligne et ont eu des impacts sur leurs stages. L’Ordre soutenait alors que l’examen de septembre était conçu de la même façon que ceux des dernières années.

Le commissaire à l’admission aux professions œuvre pour l’accès équitable et efficace aux professions dont l’exercice est contrôlé par 46 ordres professionnels au Québec. Il a le pouvoir d’effectuer des vérifications sous forme d’enquête.

L’histoire jusqu’ici :

Septembre 2022

Près de la moitié des étudiants en soins infirmiers qui passaient l’examen d’admission à la profession pour la première fois ont échoué.

Novembre 2022

Le commissaire à l’admission aux professions, Me André Gariépy, a lancé une enquête sur les causes de ce taux d’échec disproportionné.

9 mai 2023

Le commissaire a noté plusieurs failles dans l’examen, notamment concernant la qualité des questions, selon les conclusions de son rapport présenté mardi.

En savoir plus
  • 51,4 %
    Taux de réussite chez les personnes s’étant présentées pour la première fois à l’examen d’admission à la profession en septembre 2022
    source : ORDRE DES INFIRMIÈRES ET INFIRMIERS DU QUÉBEC
    82,3 %
    Taux de réussite moyen chez les personnes s’étant présentées pour la première fois à l’examen d’admission à la profession lors des huit examens précédents
    source : ORDRE DES INFIRMIÈRES ET INFIRMIERS DU QUÉBEC