Les différents indicateurs de performance du réseau de la santé suggèrent que la situation se détériore dans les urgences du Québec. En Outaouais, le départ de technologues crée une rupture de services partielle en radio-oncologie.

Le Répertoire Index Santé affichait un taux d’occupation global de 128 % dans les urgences du Québec vers 13 h mardi, dépassant le taux des 10 derniers jours. « C’est extrêmement difficile actuellement dans l’ensemble du réseau », dit la présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), Julie Bouchard.

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La situation était particulièrement critique dans les urgences des Laurentides, de Lanaudière et de la Montérégie. Pas moins de huit établissements affichaient des taux d’occupation des civières de 200 % ou plus, répartis entre Montréal, la Montérégie, les Laurentides, Lanaudière, l’Estrie et la Côte-Nord.

« Le nombre de visites a augmenté si on compare à l’an dernier alors que notre personnel est réduit en raison de la période des vacances » et de la COVID-19, selon Dominique Gauthier, porte-parole du CISSS des Laurentides. Sa collègue du CISSS de Lanaudière, Pascale Lamy, ne voit « pas de raison particulière » pour expliquer le fort achalandage.

Lundi, la moyenne du taux d’occupation sur sept jours au Québec a atteint 117 %, tout près du sommet de 117,2 % du 18 mai dernier. Il s’agit des taux moyens les plus élevés enregistrés depuis au moins deux ans, selon le tableau de bord du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). La même source indique que la moyenne sur sept jours du séjour sur civière dépassait les 18 heures lundi. Ces deux indices sont en hausse depuis le début du mois.

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Le taux d’occupation moyen n’est pas descendu au niveau de la cible de 85 % depuis janvier 2021. Le temps de séjour sur civière, quant à lui, n’a jamais atteint la cible des 14 heures dans les deux dernières années au moins. Près du tiers des patients attendaient depuis plus de 24 heures sur une civière lundi, le niveau le plus élevé observé en deux ans. La cible du gouvernement est de 0 %.

« Les patients viennent aux urgences parce que beaucoup d’autres services ne sont pas disponibles », selon la Dre Judy Morris, présidente de l’Association des médecins d’urgence du Québec (AMUQ), citant les soins de longue durée ou à domicile, de même que l’accès aux chirurgies, aux consultations spécialisées et à la première ligne. Une fois admis, « ils ne peuvent pas monter aux étages parce qu’on a beaucoup de lits de fermés encore. […] C’est l’enjeu du personnel qui fait vraiment mal » partout dans le réseau, dit-elle.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Julie Bouchard, présidente de la FIQ

Mme Bouchard, de la FIQ, pointe aussi vers la main-d’œuvre. « Nous avions pourtant prévenu le gouvernement, qui n’a rien fait pour soutenir le réseau de la santé avant la fin juillet », affirme-t-elle.

La mesure qui vise à payer le temps supplémentaire à taux double est inefficace, car elle pose trop de contraintes.

Julie Bouchard, présidente de la FIQ

Lisez « Le temps supplémentaire désormais rémunéré à taux double »

Selon les données les plus récentes disponibles, près de 76 000 travailleurs étaient absents du réseau de la santé, en date du 30 juillet. C’est un total en hausse constante depuis juin, mais moins élevé qu’à pareille date l’an dernier.

Les hôpitaux comptent en outre un nombre élevé de patients ne requérant plus de soins, mais continuant d’occuper un lit. Ainsi, 2088 patients, soit 13 % des gens hospitalisés, sont présentement en attente d’un service, comme une place dans un CHSLD ou en réadaptation, pour partir.

La liste d’attente pour obtenir une place en CHSLD, qui compte actuellement 4330 noms, n’a pas été aussi longue depuis 2019 au moins.

Rupture de services partielle en radio-oncologie en Outaouais

Le départ de trois technologues spécialisés en radio-oncologie pousse le CISSS de l’Outaouais à réduire ses activités au centre de cancérologie de Gatineau.

Les patients de l’Abitibi-Témiscamingue qui étaient jusqu’à aujourd’hui soignés à Gatineau seront plutôt dorénavant dirigés vers le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) à Montréal. « Dépendamment du volume de patients de l’Outaouais nécessitant un traitement de radio-oncologie, certains de ces patients pourraient devoir être transférés », indique le CISSS de l’Outaouais dans un communiqué. La directrice générale du CISSS de l’Outaouais, Josée Fillion, parle d’environ cinq patients par semaine provenant de l’Abitibi-Témiscamingue qui seront visés par ce changement, qui sera appliqué pour une durée indéterminée.

Les patients de l’Abitibi-Témiscamingue déjà en traitement en Outaouais continueront d’y être soignés. Mais les nouveaux patients devront se rendre à Montréal.

« Soyez assurés que nous mettrons toutes les actions nécessaires en place afin de reprendre notre volume habituel de traitements en radiothérapie dans les meilleurs délais », indique le CISSS, qui dit être « à pied d’œuvre pour recruter de nouveaux technologues ».

Les technologues qui ont quitté le CISSS ont décidé d’aller travailler en Ontario, a expliqué Mme Fillion en conférence de presse. « L’écart salarial est quand même important », dit Mme Fillion qui parle de 15 $ de l’heure d’écart salarial.

En savoir plus
  • 1230
    Nombre de patients traités chaque année en radio-oncologie en Outaouais
    200
    Patients provenant de l’Abitibi-Témiscamingue