« La responsabilité de la contraception n’incombe pas qu’aux femmes », estime Olivier Charbonneau

Olivier Charbonneau a subi une vasectomie à 27 ans, par choix. L’étudiant à l’École du Barreau a raconté son histoire sur Facebook, en marge du renversement de l’arrêt Roe c. Wade aux États-Unis. « Les hommes se sont peu ou pas exprimés contre la décision. J’ai voulu susciter la discussion », affirme-t-il en entrevue.

La vasectomie d’Olivier n’a pas fait l’unanimité dans son entourage. C’est une pratique assez rare chez quelqu’un d’aussi jeune. Seulement 5,2 % des hommes qui subissent la procédure ont moins de 30 ans, révèlent des chiffres fournis par Vasectomie Québec, une clinique spécialisée dans ce type d’intervention qui reçoit 4000 patients annuellement.

Beaucoup lui disaient qu’il était « trop jeune » ou qu’il « allait le regretter », rapporte-t-il dans une publication qui a été partagée des centaines de fois sur Facebook cette semaine.

« La responsabilité de la contraception n’incombe pas seulement aux femmes, mais à nous aussi, les hommes », leur répond-il.

« Il y a aussi un aspect social : ça permettait à ma future partenaire de ne pas avoir besoin de méthodes chimiques. Je ne veux pas imposer ce type de contraceptif », ajoute le jeune homme, qui souhaite éviter à ses partenaires leurs effets secondaires indésirables.

Le silence des hommes

Comme des millions de personnes à travers le monde, Olivier a été « assez choqué » par l’invalidation de Roe c. Wade par la Cour suprême américaine, une décision qui donne désormais à tous les États la possibilité de bannir l’avortement sur leur territoire.

Il déplore cependant le fait que ce sont majoritairement des femmes, et très peu d’hommes, qui se sont levées pour exprimer leur désaccord contre ce « recul ».

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Olivier Charbonneau

Ils sont rares, les hommes qui se sont prononcés contre l’évènement. Leurs réactions étaient presque absentes, malgré l’importance du droit qui venait de disparaître. On vient de prioriser le droit d’un enfant qui n’est pas encore né plutôt que le droit de la femme à choisir.

Olivier Charbonneau, à propos du renversement de Roe c. Wade

« Ici, ce droit existe depuis 1989 avec Daigle c. Tremblay. Qu’arriverait-il si on le perdait ? Ce serait un recul important. Avec [ma publication], j’ai voulu faire un lien pour conscientiser [les gens] aux alternatives qui existent pour la contraception. Les hommes ont l’occasion de faire leur part, de se responsabiliser face à la contraception. »

« Penser en termes définitifs »

Au moment où il a amorcé les démarches pour subir une vasectomie, en novembre dernier, Olivier était préparé. Il y pensait depuis ses 24 ans, avait amplement lu sur le sujet et comprenait les risques de l’opération.

« Il est très minime, l’impact physique. Ça peut se soulager seulement avec des Tylenol. Et sur le plan psychologique, c’est une décision qui a mûri dans mon esprit. Ce n’était pas impulsif. Il y a eu un cheminement, de la réflexion. Je n’ai donc pas eu de choc, pas de surprise. Je me suis plutôt dit : ‟Je l’ai finalement fait !” »

La vasectomie n’est pas le moyen de contraception à prioriser chez les jeunes, soutient le DMichel Labrecque, l’un des spécialistes de cette procédure dans la province. « Je ne dis pas que ce n’est pas possible de renverser une vasectomie. Mais le risque est trop grand, et ça peut coûter des milliers de dollars. Donc il faut penser en termes définitifs. »

Il y a quelques semaines, un gars de 19 ans est venu me voir… Je lui ai dit : ‟Regarde, non.” Ce n’est pas la méthode de contraception que vous devriez envisager [à cet âge].

Le DMichel Labrecque, spécialiste de la vasectomie

Olivier Charbonneau « n’est pas fermé à l’idée » d’avoir des enfants. Mais il est parfaitement conscient que sa vasectomie est potentiellement irréversible. Si jamais il tente de faire marche arrière sans succès, le jeune homme demeurera en paix avec son choix. « Je peux toujours adopter », soulève-t-il.

À Vasectomie Québec, où travaille le DLabrecque, environ 35 % des procédures sont subies par des hommes de 35 à 39 ans, et qui ont en moyenne deux enfants. « Ça, c’est ma clientèle type », remarque-t-il. Une bonne part des patients sont âgés de 45 ans et plus.

Pour ce qui est de la contraception masculine, le DMichel Labrecque jouerait de patience.

« On n’a rien encore, mais on en parle depuis 50 ans. Il existe un gel qu’on injecterait dans le canal déférent en investigation en Australie. C’est fait par la compagnie américaine Contraline. Ce ne sera pas demain sur le marché, ça peut prendre des années. Même chose pour les hormones », explique le médecin.

« Ce sont des produits qui sont actuellement dans des études cliniques. Ce n’est pas en 2022 qu’on va voir ça. »