(Montréal) Les chercheurs pourraient finalement être sur la piste d’un traitement pour venir en aide aux gens qui souffrent d’un trouble lié à l’usage des méthamphétamines.

Un pourcentage modeste, mais encourageant, des participants à une étude menée sous l’égide des Instituts nationaux de la santé des États-Unis ont ainsi réagi positivement à la combinaison de deux médicaments, la naltrexone et le bupropion.

Il s’agit d’une étude « fort pertinente », a estimé le docteur Didier Jutras-Aswad, qui dirige le département de psychiatrie du CHUM.

« Particulièrement dans le cas qui nous intéresse, le trouble lié à l’usage des méthamphétamines, on parle d’un type de dépendance pour lequel les options thérapeutiques sont plus limitées », a dit le docteur Jutras-Aswad.

« On a des traitements non pharmacologiques qui n’impliquent pas de médication et pour lesquels les taux de succès sont en général assez faibles, et on parle d’une dépendance pour laquelle il n’y a actuellement pas de traitement reconnu et couramment utilisé en clinique. Cette étude-là vient répondre à un besoin clinique qui est évident pour moi. »

Le bupropion est un antidépresseur bien connu qui est parfois utilisé pour favoriser l’arrêt tabagique. La naltrexone est utilisée pour traiter la toxicomanie, notamment le trouble lié à l’usage des opioïdes et le trouble lié à l’usage de l’alcool.

Ces deux médications, prises de façon isolée, ne sont pas très bien étudiées pour le trouble lié à l’usage des méthamphétamines, a dit le docteur Jutrad-Aswad, et elles avaient été étudiées en combinaison lors d’études de plus petite envergure.

« Là on fait une étude beaucoup plus large, avec suffisamment de patients pour pouvoir tirer des conclusions un peu plus solides », a-t-il constaté.

Réduire ou cesser

Les chercheurs ont recruté 403 adultes âgés entre 18 et 65 ans présentant un trouble modéré à grave lié à l’usage des méthamphétamines. Tous les participants souhaitaient réduire ou cesser leur consommation, et ils ont été assignés aléatoirement au groupe traitement ou au groupe témoin.

Les sujets du groupe traitement ont reçu une injection de naltrexone à effet prolongé aux trois semaines et des comprimés quotidiens de bupropion à effet prolongé. Les sujets du groupe contrôle ont reçu un placébo.

Les participants ont été soumis à quatre analyses d’urine après chaque phase de l’étude. Les chercheurs considéraient qu’ils avaient répondu favorablement si trois des quatre analyses étaient négatives.

Lors des analyses effectuées aux semaines cinq et six, 16,5 % des participants du groupe traitement répondaient à ce critère, contre 3,4 % du groupe témoin. Lors des analyses des semaines 11 et 12, ces taux étaient respectivement de 11,4 % et 1,8 %.

De telles données sont « encourageantes », estime le docteur Jutras-Aswad, mais « ce n’est certainement pas une panacée ».

« On parle de 11 % ou 13 % ou 16 % de succès, a-t-il souligné. Donc pour la très, très large majorité des gens, ce n’est pas un succès thérapeutique. Ça vient souligner à quel point ce type de dépendance-là est difficile à traiter et à quel point il faut intensifier les efforts de recherche […] pour avoir des meilleurs taux de réponse. »

Même lorsqu’un toxicomane décide d’arrêter sa consommation d’amphétamines, s’il y parvient pendant quelques semaines, les taux de reprise sont très élevés, a-t-il ajouté, ce que les taux de réponse « faméliques » du groupe témoin illustrent d’ailleurs très bien.

Les données de cette étude devront être reproduites ailleurs avant qu’on puisse envisager d’en faire une pratique courante. Reste que cela représente quand même une lueur d’espoir dans un domaine où les bonnes nouvelles et les progrès sont rares.

« Ce type de dépendance-là, on peut dire que c’est un cimetière de bonnes idées qui ne se sont pas traduites par des données probantes, des données solides d’efficacité dans les études cliniques », a conclu le docteur Jutras-Aswad.

« Donc d’avoir une étude comme ça, c’est clairement encourageant. Pour une rare fois dans notre histoire scientifique récente, on a une étude clinique avec des résultats positifs par rapport au placébo. »

Les conclusions de cette étude sont publiées par le prestigieux New England Journal of Medicine.