(Québec) D’autres investissements s’en viennent en santé mentale, a promis vendredi le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant, au terme d’une interpellation.

« C’est difficile de prédire la suite des choses, mais clairement, on veut faire plus d’investissements en santé mentale et améliorer le réseau à long terme », a-t-il déclaré.

En attendant, le ministre encourage les Québécois qui vivent de la détresse psychologique à commencer par utiliser le guide d’autosoins du gouvernement, « Aller mieux à ma façon », disponible en ligne.

« On va vraiment prioriser les autosoins, a expliqué M. Carmant. Beaucoup d’individus ont en eux […] la solution. […] Ça va nous permettre de donner les soins appropriés, la psychothérapie, aux individus qui en ont le plus besoin. »

Le gouvernement Legault est accusé de ne pas prendre la pleine mesure de la crise de santé mentale qui secoue le Québec depuis le début de la pandémie de COVID-19.

Il a annoncé cette semaine l’ajout de 25 millions pour aider les jeunes, mais les partis d’opposition signalent que la détresse s’étend à toute la société et qu’en ce sens, une gestion « à la pièce » n’est pas souhaitable.

« On demande une vision humaine, et non pas une vision comptable, du traitement de la santé mentale », a déclaré vendredi le député libéral Monsef Derraji.

En plus des 60 % de jeunes qui se disent anxieux, 34 % des enseignants songent à quitter la profession dû au stress lié à la pandémie, et 70 % des psychologues ont noté le retour de plusieurs de leurs anciens patients, a ajouté le libéral David Birnbaum.

Le nombre de réclamations pour antidépresseurs effectuées auprès d’assureurs privés a grimpé de 11 % au Canada en 2020, mais de 20 % au Québec, affirment les libéraux, qui militent pour un accès universel à la psychothérapie au coût de 300 millions.

Ramener les psychologues au public

C’est une crise de santé mentale « historique », selon le co-porte-parole de Québec solidaire (QS), Gabriel Nadeau-Dubois, dont l’analyse n’est pas partagée par le ministre Carmant, qui fait plutôt valoir que les listes d’attente diminuent.

Sur ce point, le péquiste Joël Arseneau déplore l’attitude du ministre qui, en disant que les choses sont sous contrôle, « lance un message qui consiste à nier la réalité des gens qui sont touchés ».

M. Nadeau-Dubois a néanmoins profité de l’interpellation vendredi pour demander la bonification des salaires et des conditions de travail des psychologues dans le réseau public.

Actuellement, ces psychologues sont traités comme des employés d’usine, a-t-il déploré en point de presse, car on leur impose des quotas de patients et des limites de séance, selon lui.

« C’est vraiment une logique de " fast-food " de la psychothérapie, c’est-à-dire on donne un nombre de séances et après on demande aux gens de fermer les dossiers. »

L’autonomie professionnelle sera renforcée, a promis le ministre Carmant, un neurologue de formation, qui veut travailler à « ramener » les psychologues dans le réseau public.

« On doit leur permettre de faire l’intervention qui est adéquate selon leur sens clinique, et ne pas nécessairement l’arrêter après un nombre fixe de séances », a-t-il concédé.

Sans trop s’avancer, il a qualifié l’enjeu du salaire de « très important », et la disparité qui existe entre le public et le privé de « significative ».

Or, il a plaidé que le système public était quand même attractif pour les psychologues, vu la possibilité pour eux de travailler en multidisciplinarité avec d’autres professionnels.

La proposition de QS de résorber cet écart — estimé à 30 % — coûterait au trésor public « quelques dizaines de millions » dans le contexte où le Québec affiche un déficit de 15 milliards, a affirmé Gabriel Nadeau-Dubois.

« Honnêtement, ça me semble davantage un investissement qu’une dépense », a-t-il ajouté. Selon lui, les « astres sont alignés » pour apporter des changements dans le réseau, puisque les conventions collectives sont « ouvertes en ce moment ».