La grogne des médecins contre les projets de loi en santé du gouvernement ne dérougit pas. Au moins un médecin de la région montréalaise a quitté ses fonctions au cours des derniers jours en signe de protestation, a appris La Presse. Et des facultés de médecine de la province seront en grève, le 30 mars prochain, pour dénoncer le projet de loi 20, qui vise notamment à augmenter la productivité des médecins.

Le Dr Milad Beglari, médecin de famille pratiquant principalement au CLSC de Napierville, a annoncé sa démission au Centre de santé et de services sociaux (CSSS) Jardin-Roussillon le 17 mars dernier.

Dans sa lettre de démission dont La Presse a pu prendre connaissance, Dr Milad Beglari déplore que «même le meilleur dévouement ne semble pas porter fruit dans notre réseau de santé malade qui est à la veille d'être déstabilisé davantage par les tumultueuses réformes à venir».

Le Dr Beglari écrit «qu'après à peine 18 mois de pratique», sa «passion cède sa place rapidement au cynisme». Il déplore notamment que les établissements de santé soient devenus «trop grands, trop lourds et trop inefficaces».

«La loi 10 du ministre de la Santé Gaétan Barrette va sûrement alourdir davantage ce système, centralisant et bureaucratisant encore plus la prise de décisions», écrit-il, avant de conclure: «J'espère que vous comprendrez que je n'ai plus aucun espoir pour l'amélioration de ma pratique en établissement sous un tel gestionnaire.»

Passages au privé

En entrevue, le DrBeglari explique qu'il ira travailler en cabinet privé. «Je sais que je ne suis pas seul dans cette histoire. Plusieurs collègues envisagent de partir vers une autre province ou d'aller au privé», dit-il.

Le ministère de la Santé ne dispose pas de statistiques sur le nombre de médecins qui ont démissionné depuis l'annonce des projets de réforme en santé.

Les données de la Régie de l'assurance maladie du Québec révèlent que depuis le 1er janvier 2015, 17 médecins ont fait le saut en pratique privée. Impossible toutefois de connaître les raisons de ces départs.

Le président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), le Dr Louis Godin, n'est pas surpris par l'annonce de la démission d'un médecin de famille. «C'est clair qu'on s'attend à des réactions. La menace est réelle. Des médecins vont quitter le Québec. D'autres vont aller vers le privé. Le projet de loi 20 est tellement mal reçu par les médecins, c'est inévitable», dit-il.

Trois facultés en grève

Par ailleurs, au moins trois facultés de médecine du Québec seront en grève, le 30 mars, prochain, pour protester contre le projet de loi 20 du gouvernement.

Les étudiants des facultés de médecine de l'Université de Montréal, de McGill et de l'Université de Sherbrooke ont tour à tour voté en faveur de cette grève au cours des derniers jours. L'Université Laval se prononcera le 27 mars prochain.

En commission parlementaire sur le projet de loi 20, hier, la Fédération médicale étudiante du Québec a dit craindre que le projet de loi 20 n'entraîne un «désintérêt» des étudiants pour la médecine familiale. Selon la FMEQ, «les mesures coercitives du projet de loi», comme les quotas de patients imposés aux médecins, «risquent ainsi de décourager les étudiants à pratiquer la médecine familiale et entraîner un exode des médecins vers les autres provinces canadiennes».