Le ministre fédéral de la Justice dit aux médecins québécois de respecter le Code criminel, malgré l'adoption par Québec d'une loi pour encadrer les soins de fin de vie.

«Respectez les sanctions actuelles dans le Code criminel. Voici le conseil que je leur donnerais», leur a dit le ministre Peter MacKay, mercredi.

Selon certains, la loi québécoise sur les soins de fin de vie empiète sur le champ de compétence fédéral en matière de droit criminel. Et le Code criminel interdit l'aide au suicide.

À Québec, on croit que la loi sur les soins de fin de vie est une question de soins de santé, donc de compétence provinciale. On fait aussi valoir que la loi qui résulte de la consultation «mourir dans la dignité» a été rédigée avec précautions pour s'inscrire dans le continuum de soins.

Depuis l'adoption de la loi, le gouvernement Harper refuse de dire s'il va la contester devant les tribunaux. Québec n'est tout de même pas rassuré.

Mardi, le ministre québécois de la Santé, Gaétan Barrette, se disait prêt à aller jusqu'en Cour suprême pour défendre cette loi. Et même en cas de contestation devant les tribunaux, il n'est pas question de reculer. «Nous allons aller de l'avant avec l'application de la loi», a dit le ministre Barrette.

Selon lui, le Québec devrait d'ailleurs servir d'exemple et de modèle au reste du Canada en cette matière.

«Je ne pense pas que le Canada va réussir à faire l'économie de ce débat-là, même s'il y a bien du monde qui ne voudrait pas le faire», a ajouté le ministre Barrette.

Mercredi matin, à Ottawa, plusieurs élus et sénateurs conservateurs lui donnaient raison sur ce point et contredisaient le ministre Mackay qui refuse de parler d'une consultation pancanadienne.

«Ce n'est pas l'intention de notre gouvernement d'ouvrir cet enjeu», a-t-il indiqué à maintes reprises.

Mais les conservateurs étaient nombreux à réclamer un débat canadien semblable à celui qui s'est tenu au Québec.

«On devrait faire notre propre consultation. Évidemment, le Québec a fait la sienne. Il faudrait qu'on aille chercher une perspective pancanadienne, n'est-ce pas?», arguait Robert Goguen, le secrétaire parlementaire du ministre MacKay à son arrivée au parlement mercredi.

«Au niveau fédéral, on va devoir entreprendre la même qualité d'analyse qui a été faite au niveau de la province de Québec parce que si on veut offrir aux Canadiens une analyse la plus complète possible des enjeux... parce que, en bout de ligne, ça va être à eux de décider», soutenait, de son côté, le sénateur Pierre-Claude Nolin.

«Il devrait y avoir un débat à l'échelle nationale», a dit le député James Rajotte.

Même le député Mark Warawa, qui réclame qu'Ottawa fasse invalider la loi québécoise sur les soins de fin de vie, aimerait un débat canadien sur cette question.

«Toutes ces questions importantes dans la société devraient être discutées», d'après le député Warawa.

Ces discours tranchent avec la position du gouvernement. Lundi, le premier ministre Stephen Harper lui-même disait privilégier la voie légale dans ce dossier, attendant les conseils des avocats du gouvernement.

La Cour suprême du Canada va d'ailleurs se pencher bientôt sur une cause de suicide assisté. Peter MacKay dit notamment vouloir attendre de voir ce que le plus haut tribunal canadien va décider.

Et même s'il dit ne pas vouloir ouvrir le débat, il sera bientôt forcé de prendre position: une contestation judiciaire de la loi québécoise a déjà été entamée et le gouvernement du Canada a été mis en cause.