Un chirurgien de l'Hôpital du Haut-Richelieu a été radié par le Collège des médecins pour une période de six mois pour avoir été négligent dans le suivi postopératoire d'un jeune homme de 29 ans, qui est décédé le 9 novembre 2009, une semaine après avoir été opéré pour une appendicite.

Dr Yves Perreault, qui pratique la chirurgie générale depuis 1997 et ne présente aucun antécédent disciplinaire, a plaidé coupable devant le conseil de discipline du Collège pour avoir négligé la prise en charge de son patient, Jean-Sébastien Gaudreau, dans les jours qui ont suivi l'opération.

«Les reproches pour lesquels l'intimé a reconnu sa culpabilité sont extrêmement graves (...). Comment s'expliquer le comportement de ce médecin qui a admis ne pas avoir lu les notes des infirmières qui faisaient état d'une évolution défavorable de ce jeune patient qu'il avait opéré pour une appendicite», écrit le conseil de discipline du Collège des médecins, dans sa décision rendue le 19 novembre dernier.

«Bafouer une règle aussi élémentaire que celle de lire les notes d'évolution préparées par les infirmières qui sont au chevet du patient 24 heures par jour et mandatées pour rendre compte de la situation au médecin est vraiment épouvantable», est-il ajouté.

Rappel des faits 

Le 1er novembre 2009, Jean-Sébastien Gaudreau, 29 ans, père de deux enfants qui habitent la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu, s'est présenté aux urgences de l'Hôpital du Haut-Richelieu avec un mal de ventre. L'urgentologue en devoir lui a diagnostiqué une appendicite, puis le patient a été opéré le jour suivant par le Dr Yves Perreault.

Selon le récit de sa conjointe, Christiane Vincent, qui s'est adressée au Collège des médecins selon les recommandations du coroner, les jours qui ont suivi l'opération ont été pénibles pour son mari, qui souffrait de vomissements et d'hallucinations.

«Mon mari n'arrivait pas à récupérer, ne passait pas de gaz, il vomissait beaucoup et avait souvent le hoquet. J'étais présente tous les jours et plus les jours avançaient, plus son état s'aggravait», décrit la conjointe du patient.

«Le vendredi 6 novembre, il était de plus en plus confus et il avait des hallucinations. De plus, il n'arrivait pas à dormir. (...) Finalement, dans la nuit du 8 au 9 novembre, son état était tellement grave qu'il me réclamait. Je me suis donc rendue à l'hôpital vers 23h30. (...) Vers 3h30 le matin, il a vomi une impressionnante quantité de liquide et il s'est aspiré. Il est mort devant mes yeux», raconte-t-elle.

Quatre ans plus tard, le deuil est toujours entier. Lorsque joint par La Presse, elle s'est dite soulagée d'avoir enfin une explication médicale à la mort de son mari, mais déplore qu'elle a dû se battre seule contre tout un système afin que justice soit faite.

«J'ai dû faire l'ensemble des démarches. On ne devrait pas demander au public de dénoncer les médecins par eux-mêmes. Au final, le Dr Perreault a eu une sentence bonbon, mais c'est la norme dans ce genre de dossier», déplore Mme Vincent.

Après la mort de son mari, cette mère de deux enfants, qui travaille comme éducatrice spécialisée auprès des enfants autistes d'une école secondaire, a fait un choc post-traumatique et une dépression majeure. Ce n'est qu'en septembre dernier qu'elle a finalement réintégré son emploi. 

«Après que mon mari soit mort, on a tenté de me faire croire que deux plus deux donnait huit. Je savais qu'on ne me disait pas toute la vérité. C'est moi qui ai fouillé pour obtenir les réponses. Au départ, lorsque j'ai posé des questions au chirurgien, je n'ai reçu qu'une demi-page qui m'informait que tout avait été fait dans l'ordre. On sait aujourd'hui que c'est faux», raconte-t-elle.    

Le verdict 

Selon le conseil de discipline, la lettre envoyée par la conjointe du patient «ne fait que confirmer l'état de désarroi du patient et le sien devant l'inaction des personnes qui devaient assumer sa sécurité et le suivi de sa condition (...)».

Le conseil déplore que l'attitude du Dr Perreault face à cette situation ait changé quelques années après la mort de son patient, «notamment après qu'il eut constaté que les expertises de ses propres experts ne tiendraient pas la route (...)».  

Toutefois, puisque ce dernier semble avoir pris les moyens nécessaires pour changer ses méthodes de pratique, le conseil de discipline du Collège des médecins a tranché pour une radiation temporaire de six mois, alors que le procureur du syndic du Collège réclamait un an et celui du Dr Perreault demandait 3 mois.

Courtoisie de la famille

Jean-Sébastien Gaudreau accompagné de sa conjointe, Christiane Vincent, et de leurs deux enfants.