Le Conseil pour la protection des malades estime qu'on a fermé trop rapidement des milliers de lits dans les hôpitaux du Québec pour la clientèle âgée en attente d'hébergement, et qu'il est urgent de revoir le «Programme 68», rebaptisé Programme hébergement pour évaluation (PHPE).

Selon le président du Conseil, Me Paul Brunet, ce programme mis en place il y a environ deux ans par l'agence de la santé de Montréal laisse place à des situations carrément «inhumaines».

Au lendemain de la parution dans La Presse de l'histoire d'un homme et de sa mère atteinte d'alzheimer, ballottée d'un lit à l'autre en attente d'une place en hébergement dans le secteur public, nombreux sont ceux qui demandent au nouveau ministre de la Santé, le Dr Réjean Hébert, gériatre de profession, de s'attaquer au problème. «Chaque jour, affirme Me Brunet, on reçoit des appels de désespoir de gens qui ne savent plus quoi faire avec leurs proches. Ce n'est pas vrai que tout le monde peut être désinstitutionnalisé, surtout quand il y a une perte cognitive ou des problèmes de santé mentale chez les patients.»

Au cours des deux dernières années, environ 700 lits de soins de longue durée ont été fermés, seulement pour la région de Montréal. Tous les hôpitaux ont été visés par le Programme 68 qui consiste à fermer des lits dans les établissements pour diriger au plus vite les patients en transit dans des hébergements où leurs besoins doivent être évalués.

Cri d'alarme

L'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), qui a alerté le gouvernement à ce sujet il y a plus d'un an, demande aujourd'hui au nouveau ministre «d'alléger le processus, de simplifier les étapes et d'ajouter des places d'hébergement public». Actuellement, le programme prévoit que le patient passe par un lit d'évaluation (72 heures), ensuite par un lit de transition (de quelques semaines à trois mois), pour enfin aboutir dans un lit d'hébergement permanent.

«C'est dommage, mais personne ne veut prendre la responsabilité de cette clientèle et en assumer les coûts, croit Francis Collin, responsable politique de la région pour l'APTS. Nous avons eu plusieurs rencontres avec nos membres à ce sujet, à savoir des travailleurs sociaux, des ergothérapeutes. Et je peux vous dire qu'ils vivent beaucoup de frustrations et qu'ils doivent subir la colère bien légitime des familles.»

Au cabinet du nouveau ministre de la Santé, personne n'a donné suite à deux demandes d'entrevue de La Presse. Quant à l'agence de la santé et des services sociaux, elle n'a pas été en mesure, hier, de fournir les plus récentes données sur le nombre de patients qui ont dû se soumettre au Programme 68 avant d'obtenir avec succès, et dans les délais prescrits, une place permanente en hébergement.

Le nombre de lits de soins généraux et spécialisés dans les hôpitaux du Québec est passé de 29 000 en 1991 à 20 443 en 2011, selon les plus récentes données ministérielles. Durant cette même période, le nombre de lits en hébergement dans les établissements publics et conventionnés est passé de 52 379 à 45 815.