Frustré d'avoir perdu son emploi, Sylvain Vincent a tué un ex-collègue, Yves Couture, sous les yeux de son fils de 5 ans devant chez lui à La Plaine, au nord de Montréal. En voyant l'arme à feu pointée vers son père, le gamin a anticipé le funeste dénouement. «Tu vas tuer mon père», a-t-il crié avant que le coup de feu fatal ne parte.

C'est la thèse de la Couronne exposée, hier, à l'ouverture du procès de Sylvain Vincent, accusé du meurtre prémédité d'Yves Couture au palais de justice de Saint-Jérôme.

 

La victime travaillait à temps complet comme employé civil pour la défense nationale à la base militaire de Longue-Pointe. Au début des années 2000, l'accusé, M. Vincent, y a été embauché comme soudeur. C'est M. Couture qui lui a fait passer son test d'admission. L'accusé a par la suite développé «de la hargne, de la rancoeur, du ressentiment envers la victime et d'autres personnes avec qui il travaillait», a expliqué le procureur de la Couronne, Me Vincent Martimbault.

En mai 2006, Sylvain Vincent a été congédié. «L'accusé en voudra à la victime pour la perte de son emploi, a poursuivi la Couronne. Il rage contre M. Couture. Il lui en veut tellement qu'il prendra la décision de le tuer.» Deux semaines avant le meurtre, l'accusé s'est procuré une arme dont il a tronçonné le canon. Il connaissait l'heure à laquelle la victime finissait de travailler. Il savait également combien de temps cela lui prenait pour rentrer chez elle, rue Poupart, dans le secteur de La Plaine à Terrebonne, toujours selon la théorie de la Couronne.

Le 14 août 2007, l'accusé a quitté son domicile de Laval à bord d'une Jeep; une arme chargée dans un sac. Il s'est trompé de chemin durant le trajet et a craint d'arriver trop tard, a expliqué Me Martimbault. «Il ne veut pas cogner à la porte de la victime. Il veut l'attendre dans son entrée de garage», a ajouté le procureur. Or, même s'il s'est trompé de chemin, l'accusé est arrivé avant la victime. C'est que M. Couture ne travaillait pas ce jour-là. Il passait la journée avec son fils dans un centre de la nature.

Lorsque M. Couture est rentré chez lui, il a garé son véhicule dans son entrée de garage. L'accusé, qui le surveillait, est alors «parti en trombe». Il a sorti l'arme du sac et s'est dirigé vers lui, selon la Couronne. La victime lui a demandé «de se calmer pour s'expliquer».

L'accusé, M. Vincent, a alors entendu une jeune voix dans la voiture dire: «Tu vas tuer mon père.» À ce moment-là, il s'est penché vers l'avant et a tiré sur le père de famille, a décrit le procureur de la Couronne. La victime s'est effondrée au sol, et le présumé meurtrier s'est enfui en Jeep. M. Couture est mort dans son entrée de garage, a dit Me Martimbault, en guise de conclusion de son exposé d'ouverture.

Des proches d'Yves Couture assistent au procès. «Chez nous, on a toujours appris à aimer, à respecter les autres. Pour moi, c'est important de comprendre ce qui s'est passé», a indiqué aux médias le frère aîné de la victime, Jacques Couture, à sa sortie de la salle d'audience.

Après le drame, la conjointe de la victime est retournée vivre dans sa région natale, la Gaspésie, avec son fils. «Imaginez combien c'est difficile de rester dans la même maison», a ajouté le frère aîné. La preuve de la Couronne se poursuit aujourd'hui. Le procès devrait durer trois semaines devant le juge Jerry Zigman de la Cour supérieure et un jury composé de cinq hommes et sept femmes.