François Legault, comme chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), s'est engagé explicitement à ce que les prochaines élections générales, en 2022, se tiennent avec un mode de scrutin proportionnel, maintient le vice-président du Mouvement démocratie nouvelle Jean-Pierre Charbonneau, qui a déjà été député et président de l'Assemblée nationale.

En mai 2018, avec les chefs des autres partis qui siègent à l'Assemblée nationale, M. Legault avait signé un engagement visant à ce qu'un projet de loi sur la formule proportionnelle soit déposé dans un délai d'un an suivant les élections. Louis Massicotte, universitaire et spécialiste de ces questions, relevait dans un texte de La Presse publié hier que le gouvernement s'était engagé à un projet de loi, mais pas à ce que les prochaines élections soient tenues avec une nouvelle formule. Cette lecture était partagée par l'entourage du premier ministre.

« Pour 2022 » ?

Jean-Pierre Charbonneau convient que la tenue d'élections sur une base proportionnelle « pour 2022 » n'est pas dans le pacte signé par les chefs avant la dernière élection, mais dans les « attendus », on précise que les députés devraient être choisis sur un mode proportionnel « à partir de la 43e législature », soit celle qui suivra les prochaines élections générales. On n'avait pas précisé 2022 dans la dernière mouture parce qu'un parti, la CAQ, voulait conserver une marge de manoeuvre en cas de mandat minoritaire, se souvient M. Charbonneau.

Cet engagement est le prolongement d'un autre, approuvé par le représentant de la CAQ Simon Jolin-Barrette à la fin de 2016, où un ordre de marche précis était défini. Un projet de loi déposé avant octobre 2019 devait être approuvé dans l'année qui suit, ce qui laisserait deux ans au Directeur général des élections pour mettre en place la mécanique complexe nécessaire.

« S'engager à déposer un projet de loi avec l'intention de ne pas l'adopter et l'appliquer, ce serait prendre les gens pour des crétins. » - Jean-Pierre Charbonneau, vice-président du Mouvement démocratie nouvelle

Pour M. Charbonneau, le gouvernement aura la légitimité de faire adopter ce projet de loi s'il obtient un large consensus. Or, les trois partis représentés à l'Assemblée nationale qui ont signé l'engagement représentent 70 % de la population - seuls les libéraux n'ont pas adhéré au projet.

Comme en Écosse

Selon M. Charbonneau, le principe voulant que l'Assemblée nationale représente le plus grand nombre de courants de pensée possible est largement appuyé dans la population. Avec des règles, des balises, le système québécois ressemblerait à ce qui existe en Écosse. Sans balises, on se retrouverait comme en Israël, où le gouvernement est condamné à pactiser avec de nombreux groupes marginaux pour se maintenir au pouvoir. Il s'inscrit en faux quand on souligne que la proportionnelle condamnerait le Québec à être toujours dirigé par des gouvernements minoritaires. « Des gouvernements de coalition, plutôt que minoritaires », souligne-t-il.

Jusqu'ici, toutes les tentatives de revue du mode de scrutin ont avorté. À Ottawa, le gouvernement Trudeau y a renoncé avant même de déposer un avant-projet de loi. À Québec, une formule proposée par l'ex-ministre Jacques Dupuis en 2005 avait été reléguée aux oubliettes par son successeur Benoît Pelletier deux ans plus tard.

Les formules de représentation proportionnelle mises de l'avant par le Directeur général des élections en 2007, évoquées par l'entente signée au printemps 2018, prévoient des députés élus au suffrage universel direct, mais aussi des députés « de liste », soit des candidats choisis par les partis qui obtiendraient suffisamment d'appuis dans une région précise.