(Québec) La campagne électorale québécoise n’est pas commencée, mais les partis politiques ont déjà commencé à dépenser sur Facebook pour entrer en contact avec les citoyens, et la Coalition avenir Québec (CAQ) est celui qui a déboursé le plus depuis trois mois.

Depuis 90 jours, le parti de François Legault a dépensé près de 30 000 $ pour faire mousser ses publications sur la plateforme Facebook. La CAQ a payé plus de 3000 $ pour faire circuler la fameuse publicité d’une dame âgée vantant les mérites de gestionnaire de François Legault, ainsi qu’une somme équivalente pour faire la promotion de l’adoption de la réforme de la Charte de la langue française. Elle a déboursé 1000 $ pour faire circuler un texte qui affirme que la CAQ a le meilleur bilan de l’histoire en environnement.

Le parti a également payé 5400 $ pour mettre en valeur la page du chef François Legault, essentiellement pour promouvoir une série de publicités dans lesquelles il se présente comme un « gars ordinaire ». « Isabelle pis moi, on se dit souvent ça : François, t’es premier ministre. C’est pas croyable », l’entend-on dire dans l’une de ces capsules. En plus de cette somme, la page de François Legault bénéficie d’un nombre d’abonnés extrêmement important, surtout en raison de la pandémie.

« La page Facebook de François Legault est très populaire. J’ai fait une étude sur tout ce qui a été publié en français en 2020 dans quatre pays. François Legault a une des pages Facebook, toutes catégories confondues, les plus achalandées », note le professeur à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal Jean-Hugues Roy, qui fait un lien direct avec les points de presse sur la pandémie diffusés sur la page de M. Legault.

Tout miser sur Duhaime

Éric Duhaime l’a bien compris. Sur la même période, le Parti conservateur du Québec n’a pas déboursé un sou pour promouvoir ses publications, mais 10 600 $ pour promouvoir les sorties de M. Duhaime. « Ils ont raison. Sur Facebook, M. Duhaime ramasse plus de la moitié de toutes les interactions des chefs et partis politiques au Québec. Éric Duhaime est celui qui joue le mieux la game Facebook », note M. Roy.

Depuis 2019, la majorité des publications soutenues par M. Duhaime visent à s’opposer aux mesures sanitaires mises en place par le gouvernement Legault, mais depuis mai, le chef conservateur fait plutôt la promotion de 5 à 7 partisans.

Du côté du Parti libéral du Québec (PLQ), on a misé 6600 $ sur la page du parti, et 4300 $ sur la page de la cheffe Dominique Anglade. Pour Dominique Anglade, le gros de ce budget est destiné à la diffusion d’une entrevue en direct avec Patrice Roy sur les ondes de Radio-Canada, où elle présente sa plateforme électorale. Le parti a investi pour faire connaître sa charte des régions et son plan santé, ainsi que quelques candidats. Il a également dépensé 1000 $ pour faire la promotion d’une sortie contre le « père de la Charte des valeurs, Bernard Drainville ». Au parti, on indique que le PLQ investit généralement de façon équilibrée entre les médias sociaux et les médias traditionnels. Une campagne publicitaire a d’ailleurs été lancée en juin, notamment dans les journaux.

Le Parti québécois, lui, a misé 8000 $ sur sa page Facebook et 300 $ sur celle du chef Paul St-Pierre Plamondon. La majeure partie de cet argent a servi à promouvoir une critique du bilan de la CAQ. « La CAQ parle d’un bilan “historique”, mais est-ce vraiment le cas ? Pensons à la hausse du coût de la vie, la crise du logement, aux soins de santé peu accessibles, l’environnement, le déclin du français », déplore le parti.

Québec solidaire est plus chiche. Entre le 11 mai et le 8 août, le parti a payé 6000 $ pour faire la promotion de ses publications, 933 $ pour celles de Gabriel Nadeau-Dubois et 350 $ pour celles de Manon Massé. Pour M. Nadeau-Dubois, l’essentiel du budget était destiné à faire la promotion de son passage en Estrie pour appuyer Christine Labrie et à Rouyn-Noranda pour appuyer Émilise Lessard-Therrien, dans deux circonscriptions menacées par la CAQ.

Le directeur général des élections s’interroge quant à lui sur les campagnes publicitaires préélectorales. « Effectivement, il n’y a pas de règles et pas seulement à l’égard des partis politiques, à l’égard des tiers également », soulève Pierre Reid, qui se dit « préoccupé » par l’absence d’encadrement des dépenses préélectorales. « Il faut se pencher sur ça », a-t-il affirmé en rappelant l’importance d’assurer une équité entre les partis politiques. M. Reid a d’ailleurs amorcé une « veille » du phénomène pour étayer sa réflexion et éventuellement présenter des recommandations au législateur.

Avec la collaboration de Fanny Lévesque, La Presse

En savoir plus
  • Montant total des dépenses électorales des quatre partis politiques représentés à l’Assemblée nationale lors des élections de 2018
    Parti libéral du Québec : 7 043 240 $
    Parti québécois : 6 321 618 $
    Coalition avenir Québec : 6 105 016 $
    Québec solidaire : 2 969 747 $
    « La publicité constitue souvent la principale dépense électorale des partis politiques. »
    Source : Directeur général des élections du Québec