(Ottawa) L’armée canadienne est confrontée à de plus en plus de demandes au pays et en Europe, mais son nombre de soldats continue de diminuer, selon le commandant des troupes.

Le lieutenant-général Jocelyn (Joe) Paul a affirmé que l’armée a vu ses forces être réduites de 1200 soldats en 2021, alors que les départs ont dépassé le recrutement.

L’armée, la composante terrestre des Forces armées canadiennes (FAC), pourrait en perdre des centaines d’autres à moins que la situation ne change.

« Si nous restons sur la même trajectoire, malheureusement, nous pouvons probablement anticiper une diminution de 800 autres (militaires) », a-t-il mentionné en entrevue avec La Presse Canadienne.

Le manque à gagner survient alors que l’armée se prépare à envoyer potentiellement des centaines de soldats supplémentaires en Lettonie, où l’OTAN veut étendre un groupement tactique en réponse à la guerre de la Russie en Ukraine.

Le premier ministre Justin Trudeau a d’abord annoncé un accord avec la Lettonie en juin pour essentiellement doubler la taille du groupement tactique de 2000 soldats que le Canada dirige depuis 2016 en le transformant en une brigade.

L’accord concernait le prolongement d’ententes similaires impliquant sept autres pays d’Europe de l’Est où l’OTAN dispose de groupements tactiques pour dissuader la menace d’une attaque russe.

Le Canada fournit environ 700 soldats à la force militaire en Lettonie, qui comprend également des soldats et de l’équipement de dix autres membres de l’OTAN.

Avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, en février, le nombre était de 600 soldats canadiens au sein de ce « Groupement tactique de présence avancée renforcée de l’OTAN en Lettonie ».

Négociations intensifiées

Alors que les discussions entre les alliés impliqués en Lettonie ont déjà commencé, le lieutenant-général Paul a indiqué qu’elles s’intensifieraient sérieusement au cours de la prochaine année afin de déterminer la contribution de chaque pays dans la bonification de la force.

« Je vais également me rendre en Europe en février, où je vais m’asseoir avec beaucoup de mes collègues européens afin que nous puissions trouver le moyen le plus efficace de répondre aux besoins », a-t-il mentionné.

Parmi les questions abordées, il y a le nombre de soldats et le type d’équipement dont le Canada aura besoin pour être présent en permanence en Lettonie, et ce qu’il peut garder en sol canadien.

Les calculs ne sont pas seulement basés sur les défis logistiques associés au déploiement rapide de troupes, d’équipements et de munitions en Europe pendant une guerre avec la Russie, mais aussi sur les besoins de l’armée au Canada.

« Alors, combien d’équipement puis-je me permettre d’avoir prépositionné en Lettonie sans trop impacter mon entraînement chez moi, sans affecter ma capacité à faire des opérations nationales ? » s’interroge-t-il.

L’essentiel : l’armée canadienne ne peut pas soutenir un déploiement beaucoup plus important en Lettonie à long terme.

« Si nous devions générer deux groupements tactiques en Lettonie, soutenus, nous ne pouvons pas le faire. […] surtout quand il faut reconstituer nos rangs », a affirmé le lieutenant-général Paul.

À propos du manque de personnel, qui se fait sentir dans une grande partie des Forces armées canadiennes, le lieutenant-général Paul a indiqué que l’armée examine certaines pratiques établies depuis longtemps pour voir où elle peut être plus efficace.

Il s’agit notamment de déterminer si certains exercices d’entraînement à grande échelle sont nécessaires, compte tenu de la charge imposée aux officiers de niveau intermédiaire et aux sous-officiers, qui sont également essentiels pour diriger des missions sur le terrain.

« Nous ne voulons pas surentraîner, nous ne voulons pas sous-entraîner, a fait valoir le lieutenant-général Paul. Nous voulons atteindre le bon équilibre. »

Cela implique également de revoir le type d’équipement que l’armée prévoit déployer dans les années à venir et de déterminer si davantage d’automatisation et même d’intelligence artificielle peuvent réduire certains de ses besoins en personnel, dans le cadre d’une réévaluation plus large.

« Qu’est-ce que nous pouvons affiner ? » questionne le lieutenant-général Paul.

« Qu’est-ce que nous devons peut-être faire moins ? Qu’est-ce que nous devrions faire plus ? Nous avons donc en quelque sorte une fiche de rendement en train d’être établie en ce moment. Parce que nous devons le faire. »