(Québec) Le pape François a quitté Québec et la province en début d’après-midi vendredi pour s’envoler pour Iqaluit, dernière étape de son voyage au Canada. Il s’était entretenu plus tôt avec des survivants des pensionnats autochtones et avec le premier ministre François Legault.

À sa sortie de l’archevêché, le chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL), Ghislain Picard, s’est montré critique de la rencontre de vendredi et des résultats de la visite du pape.

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Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador

« Il y avait selon moi un contingent trop important de la Conférence des évêques catholiques du Canada », a-t-il dit. Lui et d’autres représentants autochtones ont déploré que certains accompagnateurs des survivants aient dû quitter la salle pour la rencontre avec le souverain pontife.

M. Picard a toutefois observé « une progression dans le discours du pape », qui a reconnu jeudi soir des abus sexuels commis par des membres de l’Église, un aspect qui n’avait pas été abordé lors des excuses présentées plus tôt cette semaine.

Le chef de l’APNQL a aussi noté que du travail restait à faire dans des dossiers prioritaires tels que la doctrine de la découverte, l’accès aux archives et le rapatriement des objets sacrés en possession du Vatican. « Pour tous ces éléments-là, il appartient maintenant à la Conférence des évêques d’assurer une suite », a dit M. Picard.

Dans un communiqué publié en après-midi vendredi, l’APNQL appelle la Conférence des évêques catholiques du Canada à rendre publics « tous les documents d’archives permettant de faire la lumière sur l’histoire des pensionnats autochtones » et à révoquer la doctrine de la découverte.

Lisez l’article « Qu’est-ce que la “doctrine de la découverte” ? »

S’excuser des torts

La délégation autochtone de 25 personnes comprenait des survivants et des représentants des Premières Nations de tout l’est du Canada, dont certains ont pu être vus en train de remettre des cadeaux au pape au début de l’audience privée.

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Le pape s’est entretenu avec une délégation de représentants autochtones avant son départ.

Dans une allocution d’ouverture de la réunion, le pape a déclaré à la délégation autochtone qu’il était venu au Canada dans un « esprit de pénitence » pour s’excuser des torts qui leur ont été infligés par « pas seulement quelques catholiques ».

Je fais cela pour que des progrès puissent être réalisés dans la recherche de la vérité, pour que les processus de guérison et de réconciliation puissent se poursuivre.

Le pape François

« J’ai rencontré le pape aujourd’hui et c’était une très belle rencontre », a dit Joan St-Denis, survivante de la Première Nation de Kebaowek, en Abitibi-Témiscamingue. Elle a pu lui raconter son histoire, et se dit satisfaite de la visite du pape, même si elle a entendu les commentaires plus critiques. « Tu ne peux pas guérir avec ça dans ton cœur, a-t-elle soutenu. Je ne veux pas me concentrer sur les abus que nous avons subis […], j’ai vraiment apprécié [la visite], je repars avec de bonnes pensées, de bons sentiments. »

Duke Peltier, de la Première Nation de Wiikwemkoong, en Ontario, faisait aussi partie de la délégation. Lors de sa brève conversation avec le pape, il l’a remercié de sa visite, mais lui a aussi enjoint de « sérieusement envisager de présenter de véritables excuses et de faire les choses correctement », a-t-il dit. « Je m’attends à ce que le pape ait entendu et écouté tous les points de vue à travers le pays et fournisse des instructions claires à la Conférence des évêques et à l’Église catholique pour procéder à des réparations et permettre l’apaisement et la guérison pour tout le monde. »

« Rencontre privée » avec le premier ministre

Dans un message publié sur les réseaux sociaux après sa rencontre avec le pape, le premier ministre François Legault a dit lui avoir parlé de l’« accès aux archives de l’Église pour les peuples autochtones » et de « la place de l’Église catholique au Québec ». « J’espère sincèrement que la présence du pape et ses excuses vont permettre aux peuples autochtones d’avancer sur le chemin de la guérison », a-t-il ajouté.

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François Legault, premier ministre du Québec

Appelé à préciser la teneur des discussions, le cabinet du premier ministre a refusé de répondre aux questions de La Presse, évoquant « une rencontre privée ».

Plus tôt vendredi, le pape François a commencé sa journée par une réunion privée avec des membres de son ordre religieux, la Compagnie de Jésus (les Jésuites).

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Le pape François a pris part à une rencontre à l’extérieur de l’école primaire Nakasuk, à Iqaluit, avant son vol de retour au Vatican.

À Iqaluit, capitale du Nunavut, il a tenu des audiences privées avec d’autres survivants des pensionnats. Une rencontre en plein air a également eu lieu avec des jeunes et des aînés avant son vol de retour au Vatican.

Au cours de sa tournée au Canada, qui comprenait des arrêts en Alberta, le souverain pontife s’est excusé pour le rôle joué par les institutions catholiques romaines dans le système des pensionnats. Beaucoup ont estimé que ses excuses n’étaient pas allées assez loin parce qu’il n’a pas précisé que l’Église catholique comme institution était responsable des abus dans les pensionnats.

Avec La Presse Canadienne