Le sénateur à la retraite Murray Sinclair a été nommé jeudi pour superviser la négociation des indemnisations pour les enfants autochtones retirés de leurs foyers par les services sociaux.

La nouvelle a été accueillie favorablement par toutes les parties impliquées, selon un communiqué émis par le bureau de la ministre des Services aux Autochtones, Patty Hajdu.

« C’est un très bon signe », a réagi en entrevue le porte-parole adjoint du Nouveau Parti démocratique en matière de Relations Couronne-Autochtones, Charlie Angus. « Murray Sinclair n’est pas dupe, a-t-il ajouté. Il ne suivra pas les directives du gouvernement. Il va focaliser sur la solution. »

Le 29 octobre, le gouvernement fédéral a porté en appel un jugement de la Cour d’appel fédérale qui avait maintenu une ordonnance du Tribunal canadien des droits de la personne. Le NPD et le Bloc québécois ont dénoncé cette décision. Les deux partis d’opposition considèrent ce geste comme un recul pour la réconciliation avec les peuples autochtones.

« Ça m’a choquée, s’est exclamée la sénatrice Michèle Audette en entrevue. Ça donne tout le temps un coup à l’estomac. Pourquoi contester une injustice qui a été prouvée maintes fois ? »

Le même jour, Ottawa avait entamé des négociations avec l’Assemblée des Premières Nations et la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations. Il s’est donné jusqu’au 31 décembre 2021 pour conclure une entente.

« Bien sûr, la nomination de Murray Sinclair est de bon augure, a reconnu la députée du Bloc québécois, Marilène Gill. Toutefois, on ne devrait pas être là présentement. Le gouvernement n’aurait pas dû aller en appel. »

Le tribunal avait ordonné au gouvernement fédéral de verser 40 000 $ à chaque enfant des Premières Nations arraché à sa famille en raison du sous-financement chronique des services à l’enfance. Il s’agit de la pénalité maximale qu’il pouvait imposer. Les parents ou les grands-parents de ces jeunes ont également droit au même montant.

Selon l’Assemblée des Premières Nations avait estimé qu’environ 54 000 enfants et leurs familles seraient admissibles, ce qui porterait le montant total de cette compensation à plus de 2 milliards de dollars. Au Québec, cela pourrait représenter un peu moins de 14 000 enfants et parents.

Or, la facture pourrait être encore plus salée, selon le Directeur parlementaire du budget. Elle pourrait atteindre 15 milliards si tous les enfants pris en charge par les services sociaux et ceux qui ont subi des retards, des refus ou des lacunes en matière de services étaient indemnisés.

Ottawa a pour objectifs de négocier le montant de la compensation, réformer son programme des services à l’enfance et à la famille pour les Premières Nations et développer les infrastructures nécessaires dans les réserves pour ces services sociaux en vertu du principe de Jordan. En vertu de cette politique adoptée par la Chambre des communes en 2007, les enfants autochtones devraient obtenir les services dont ils ont besoin d’abord, lorsqu’il y a conflit entre le gouvernement fédéral et un gouvernement provincial ou entre deux ministères pour savoir qui va payer la note.

En 2009, Murray Sinclair a présidé la Commission de vérité et réconciliation sur les pensionnats autochtones. Il a par la suite siégé au Sénat de 2016 jusqu’à sa retraite en 2021. Originaire du Manitoba, il a été le premier juge autochtone dans cette province et le deuxième à être nommé au Canada.