La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a enfreint la Loi sur les langues officielles, puisque des agents n'ont pas été en mesure d'offrir des services en français au public sur la colline du Parlement.

Le commissaire aux langues officielles, Graham Fraser, s'est penché sur le cas de plaignants - dont l'ancien député Yvon Godin - qui disaient s'être adressés en français à plusieurs reprises à des policiers de la GRC patrouillant sur la colline. Les agents étaient incapables de leur fournir des services en français.

Dans son rapport préliminaire d'enquête, le commissaire donne raison aux plaignants.

Il note que des agents «peuvent avoir à dicter des consignes de sécurité, telles que des ordres d'évacuation». «Dans de telles situations, il est essentiel que les membres des deux communautés de langue officielle soient en mesure de bien comprendre les consignes dictées», signale le commissaire.

M. Fraser s'est attardé à des situations qui se sont produites le 15 février, le 27 mai, le 5 juin et le 8 juin 2015. Pour ces jours-là, la GRC affirme avoir eu sur le terrain un taux d'agents bilingues oscillant entre 72 % et 83 %.

Selon le commissaire, lorsqu'ils ont été abordés en français, les agents unilingues auraient immédiatement dû demander l'aide d'un collègue bilingue. Mais cela ne signifie pas pour autant qu'un temps d'attente est légitime, nuance le commissaire.

«Le service dans la langue de la minorité doit être fourni dans un temps comparable à celui de la majorité, et ce, afin d'assurer un service de qualité égale pour les membres des deux communautés de langue officielle», écrit M. Fraser.

Et comme la colline du Parlement est située dans la région de la capitale nationale (RCN), «la GRC a l'obligation d'y servir le public dans l'une ou l'autre des langues officielles».

L'un des plaignants, l'ex-député néo-démocrate d'Acadie-Bathurst Yvon Godin, indique que de nombreux agents unilingues anglophones ont été déployés sur la colline dans les mois ayant suivi l'attaque au parlement par un homme armé.

Il a compris que quelque chose clochait quand il saluait quotidiennement un des agents, qui lui répliquait invariablement «I don't speak French».

Aux yeux de M. Godin, tous les agents appelés à interagir avec le public sur la colline devraient être à l'aise dans les deux langues, notamment pour des raisons de sécurité. D'autant que le parlement pourrait être une cible de choix pour des malfaiteurs.

«Il y a deux langues officielles au pays. Le parlement est une place où il faut faire attention, parce que ça peut amener des terroristes», signale-t-il en entrevue.

M. Godin craint un scénario selon lequel un membre du public apercevrait quelque chose de suspect et serait incapable de se faire comprendre par la police. «Si le policier lui dit: «attends un peu, il faut que j'appelle quelqu'un qui peut parler ta langue», et qu'il ne peut pas communiquer avec les gens sur le terrain, moi je pense que, vraiment, ce n'est pas sécuritaire», illustre-t-il.

Pour l'ex-député, les lacunes en matière de langues officielles au sein de la GRC constituent un problème de taille. «Pourquoi le francophone est obligé de s'humilier comme ça? Moi je pense que c'est complètement inacceptable», dit-il.

M. Fraser émet deux recommandations dans son rapport préliminaire. D'abord, la GRC devrait faire des rappels bisannuels en matière de langues officielles à tous les agents déployés sur la colline. Par ailleurs, la GRC devrait également établir un mécanisme de surveillance pour s'assurer qu'un service bilingue est disponible en tout temps.