Pas moins de 22 commerces d'Hochelaga ont été vandalisés depuis le début de l'année. Exaspéré par cette vague de vitres brisées et de peinture aspergée, le maire de l'arrondissement, Réal Ménard, réclame au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) des arrestations rapides et l'ajout de caméras pour rassurer les commerçants.

Dans la nuit de dimanche à lundi, vers 1h40, une dizaine d'individus masqués s'en sont pris à cinq commerces du quartier Hochelaga-Maisonneuve, sur la Promenade Sainte-Catherine Est. Des vitrines ont été fracassées et de la peinture a été répandue à l'aide d'un extincteur, ce qui a causé des dommages matériels importants.

«Il est difficile de déterminer le montant des dommages. Il y a de la peinture au plafond, sur des sofas, des meubles en teck. Nous en sommes à nettoyer avec du décapant», s'est désolé Marc Gosselin, propriétaire d'une galerie de la rue Sainte-Catherine Est, venu prêter main-forte au propriétaire de la boutique-galerie Showroom Montréal, vandalisée la nuit dernière.

Des dommages importants sont également signalés à la boutique Montréal Moderne. «Ils ont fracassé la vitrine, double. Les trois quarts de mon magasin ont été aspergés de peinture, avec un extincteur d'incendie; 60% des meubles sont une perte totale», s'indigne le propriétaire, Martin Lefebvre.

Recrudescence

Ces cinq incidents représentaient la sixième vague de vandalisme contre des commerces en 2016, a indiqué le SPVM. Au total, ce sont ainsi 22 commerces qui ont subi des actes de vandalisme depuis janvier. «On remarque une recrudescence depuis le début de l'année», a reconnu le commandant du poste de quartier 23, Martial Mallette, qui assure que le dossier est une priorité pour ses agents.

«L'enquête continue, c'est pris très au sérieux, les enquêteurs ne ménagent aucun moyen.» Le SPVM invite toute personne détenant de l'information à contacter la ligne Info-Crime, au 514 393-1133. «Des fois, de petits indices peuvent faire débloquer», poursuit M Mallette.

Qui sont les vandales?

On en sait bien peu sur le groupe de vandales qui s'en prend aux commerces d'Hochelaga. Des pamphlets ont été laissés sur place lors de certaines attaques, permettant de comprendre qu'ils avaient été victimes de la lutte contre l'embourgeoisement que certains dénoncent dans le quartier.

Ce n'est toutefois pas le cas chaque fois.

Le SPVM ignore ainsi s'il s'agit toujours des mêmes individus qui commettent ces gestes. De nombreux militants contre l'embourgeoisement sont présents dans le quartier. Dimanche, un groupe organisait dans le quartier une rencontre avec un militant new-yorkais contre l'embourgeoisement. Ceux-ci préviennent que «la lutte contre la gentrification promet d'être animée à Hochelaga et à Montréal en 2017».

Vers des accusations?

L'exaspération se fait sentir dans le quartier. «Il faut que le SPVM porte des accusations dans de courts délais», a réclamé le maire de l'arrondissement, Réal Ménard. Il espère ainsi voir les policiers effectuer des arrestations sous peu, afin de rétablir la confiance des commerçants. «Il faut démanteler ces réseaux», a ajouté l'élu.

Le commerçant Marc Gosselin déplore le manque de présence policière dans le quartier, d'autant plus qu'il ne s'agit pas des premiers gestes de ce genre à survenir dans cette portion de la rue Sainte-Catherine. «La police nous dit qu'elle patrouille. Alors, pourquoi ça arrive encore?» Le SPVM assure avoir renforcé sa présence de patrouilleurs à pied à la suite des incidents de la nuit dernière.

Des caméras en renfort

Au-delà des policiers, le maire Ménard dit être favorable à l'installation de caméras pour surveiller les allées et venues dans les rues Sainte-Catherine Est et Ontario, où les méfaits ont eu lieu. «Je m'attends à des propositions de la part du SPVM, des façons plus efficaces de lutter contre le vandalisme», a indiqué Réal Ménard. «C'est effectivement envisagé», a confirmé le commandant Martial Mallette.

L'association des commerçants appuie l'idée de mettre en place un réseau de caméras. «On ne croit pas que c'est la solution pour régler tous les problèmes, mais ça va permettre au SPVM d'amasser plus de preuves», a dit Pierre Lessard-Blais, président des Promenades Hochelaga-Maisonneuve, lors d'un point de presse, lundi.

Comme les patrouilleurs du SPVM semblent être incapables de dissuader les vandales à eux seuls, l'arrondissement pourrait-il embaucher des agents de sécurité supplémentaires? «Je suis ouvert à toutes les propositions», a fait savoir Réal Ménard.

Solidarité réclamée

Devant cette vague de vandalisme, l'association des commerçants souhaite répondre en créant une vague de solidarité. Promenades Hochelaga-Maisonneuve a lancé lundi une campagne de soutien qui prévoit la mise en vente d'articles comme des autocollants «J'appuie mes commerçants contre le vandalisme», dont les profits iront aux commerces vandalisés. Le maire Réal Ménard espère que les résidents répondront à cette invitation d'appuyer leurs commerçants. «Il faut un extraordinaire élan de solidarité face aux commerçants, c'est une épreuve qu'ils vivent», a dit l'élu. Celui-ci n'exclut pas la possibilité que son arrondissement dédommage les commerçants vandalisés.

Le maire Ménard affirme que la vague de vandalisme ne l'ébranle en rien dans sa volonté de développer le quartier, mais il assure qu'il souhaite maintenir la mixité sociale de son arrondissement. «Dans le quartier, il doit y avoir de la place pour ceux qui y habitent depuis toujours, mais aussi pour ceux qui y habitent depuis peu», a indiqué l'élu.

Rappelons que l'arrondissement prépare actuellement des assises pour étudier la question de l'embourgeoisement.

- Avec la collaboration de Maryse Tessier et de Patrick Sanfaçon, La Presse